Référence agro

Algues vertes : les écologistes pas convaincus par les efforts des agriculteurs

Le | Projets-territoriaux

Un an après la mort, sur une plage bretonne, d’un cheval intoxiqué par un gaz issu d’algues vertes en décomposition, le ministre de l’agriculture Bruno Le Maire, et la secrétaire d’Etat à l’écologie, Chantal Jouanno, se sont rendus le 19 juillet sur une plage de la station balnéaire de Binic (Côtes-d’Armor). Les ministres étaient venus constater « la mise en œuvre » du plan de lutte contre les marées vertes lancé en février et doté de 134 millions d’euros, qui prévoit de réduire les flux de nitrates de 30 à 40 % à échéance de 2015. Bruno Le Maire et Chantal Jouanno ont également visité une unité de méthanisation, à Plélo, puis ont inauguré un centre de traitement des algues vertes, à Lantic. Les associations de protection de l’environnement ont boycotté l’inauguration, jugée « indécente ». Selon les écologistes, ce centre, qui transformera en compost 50 % des volumes récoltés en Bretagne, « est le symbole de l’échec de la lutte contre les marées vertes ». Ils réclament un « changement de modèle agricole ». Pour FNE, la prolifération des algues vertes ne sera enrayée que si on s’attaque à la cause du problème : la concentration de porcs sur le territoire breton. J.P Pour les associations environnementalistes, seule la diminution du cheptel permettrait de ramener le taux de nitrates dans les bassins versants sensibles autour de 5 à 10 mg par litre d’eau, et d’éradiquer les marées vertes. Jean-Claude Bévillard, chargé des questions agricoles à FNE, va plus loin : « il faut favoriser les productions adaptées au terroir, orientées vers la qualité, et donc rentables avec un cheptel réduit. L’agriculture biologique et l’agriculture de Haute Valeur Environnementale doivent être particulièrement encouragées ». Gilles Huet, délégué général de l’association Eaux et rivières de Bretagne regrette pour sa part que « le gouvernement agisse fortement sur le volet sanitaire, pas sur la prévention de la pollution ». Le comité scientifique de suivi du plan algues vertes a également critiqué, dans un rapport rendu public fin juin, le décalage entre l’ambition du plan et « le niveau des propositions stratégiques actuellement envisagées ». __Le taux de nitrates baisse en Bretagne__ « La prévention reste l’essentiel », a pourtant affirmé Bruno Le Maire, saluant les efforts déjà réalisés par les agriculteurs. « La Bretagne est la seule région de France où les taux de nitrates baissent », a-t-il souligné. Pour le ministre de l’Agriculture, « l’environnement et l’agriculture sont deux choses parfaitement conciliables ». « Il faut une agriculture durable, acceptée par la société. C’est aussi votre intérêt économique », a-t-il dit en appelant les producteurs à « concilier compétitivité, rentabilité et respect de l’environnement ». « Le défi est devant nous, a renchéri Chantal Jouanno. On peut le relever. Même les 10 mg de nitrates par litre d’eau ». __Vingt projets de méthanisation agricole sur les rails__ Chantal Jouanno s’est réjouie que le ramassage des algues vertes sur la côte soit effectué « dans les 24 heures », comme le préconisent les autorités sanitaires. Selon elle, le compostage des algues vertes, effectué à hauteur de 50 % du tonnage prélevé cette année, le sera à hauteur de 100 % l’an prochain. Concernant la méthanisation, qui permet, comme à Plélo, de transformer les effluents d’élevage en digestat utilisable en substitution partielle aux engrais minéraux, la secrétaire d’Etat a révélé que vingt projets seront sur les rails « dans les deux prochaines années » avec l’aide financière de l’Etat. % %% __20 000 tonnes d’algues vertes traitées__ Le site de Launay-Lantic, inauguré le 19 juillet, traitait déjà depuis une dizaine d’années quelque 2 500 tonnes d’algues vertes. Les 3, 8 millions d’euros injectés dans l’extension de l’usine de tri-compostage vont permettre de multiplier par huit les quantités qui, via un système thermique, seront transformées en compost agricole. « il sera revendu aux agriculteurs à un prix nettement inférieur au coût de transformation », confie Marc Briand, le directeur du syndicat mixte Smitom qui réunit 34 communes des Côtes-d’Armor. L’Etat prend à sa charge 80 % de l’investissement, le reste est financé par un emprunt souscrit par le Smitom. %% % __La région Bretagne, un partenaire exigeant__ « Les efforts sur le préventif doivent rester la priorité en intégrant l’ensemble des paramètres économiques, environnementaux et sociétaux », souligne dans un communiqué en date du 21 juillet, Jean-Yves Le Drian, président du Conseil régional Bretagne. « La nouvelle alliance entre la Bretagne et son agriculture ne pourra se décliner que dans un état d’esprit constructif, pragmatique et une volonté collective, poursuit Jean-Yves Le Drian. La région est prête à jouer son rôle, en appelle à la responsabilité de tous et souhaite que le plan « algues vertes » se poursuive. Mais elle veillera à ce que les annonces faites par les ministres (NDLR : Bruno Le Maire et Chantal Jouanno) soient suivies d’effets, y compris financiers ».