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Biodiversité, les chambres veulent une plus grande valorisation

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Si les initiatives des agriculteurs pour préserver la biodiversité se multiplient, celles-ci sont encore loin d’être systématiquement synonymes de valorisation économique. La construction de filières longues, la structuration des débouchés, une plus grande communication envers les consommateurs et la mise en place de PSE ont été listés comme des leviers à activer, lors d’un webinaire organisé le 12 novembre par les chambres d’agriculture.

© Alpina Savoie - © D.R.
© Alpina Savoie - © D.R.

Si des excès ont pu être commis par le passé, le secteur agricole n’a désormais de cesse de le répéter : l’agriculture peut-être une solution au réchauffement climatique et à la préservation de la biodiversité. Mais l’aménagement des exploitations à ces fins pose encore des questions en termes de revenu pour les agriculteurs, et de valorisation dans les filières alimentaires. « L’assolement et les rotations vont de paire avec la protection des milieux, mais de nombreuses cultures, comme par exemple la lentille, ont échoué localement faute de débouchés, car l’industrie agroalimentaire fait encore trop souvent le choix du prix et non de la proximité », regrette Pascal Ferey, élu référent biodiversité pour les chambres d’agriculture, lors d’un webinaire organisé, le 12 novembre, par l’APCA sur ces questions.

L’enjeu de la sécurisation des débouchés

En Meurthe-et-Moselle, une expérimentation est menée depuis trois ans par les chambres de la région pour relancer une filière lentille. Huit agriculteurs en polyculture-élevage cultivent de la lentille verte sur une aire d’alimentation de captage dégradée. L’objectif est multiple : protéger la ressource en eau et développer une culture à faible niveau d’impact mais à forte valeur ajoutée pour les agriculteurs. « Nous avons mis en place des petites parcelles de deux hectares maximum pour limiter le risque, témoigne Nicole Le Brun, de la Chambre d’agriculture de Meurthe-et-Moselle. La principale difficulté est la sécurisation des débouchés dans le temps. » Cette dernière souhaiterait que la restauration collective soit plus ouverte. Des efforts sont déployés pour positionner la production de lentilles dans le cadre du menu végétarien hebdomadaire. Une charte a par ailleurs été signée avec plusieurs collectivités, comme Nancy et Metz, pour assurer l’écoulement des stocks.

Valoriser des zones peu productives

Si des points de blocage sont encore à lever, la préservation de la biodiversité peut parfois être un moyen de valoriser les surfaces. C’est ce dont témoigne Ambroise Bécot, de la Chambre d’agriculture Pays-de-la-Loire, qui pilote le réseau Agriculteurs respectueux de la biodiversité et des richesses de l’environnement (Arbre). Il accompagne notamment la mise en place de haies et bandes enherbées, pour créer des zones refuges pour les auxiliaires. « Dans le cas d’un éleveur laitier en agriculture de conservation des sols, cela lui a permis de valoriser des zones peu productives sur ses parcelles, comme les lisières où il avait beaucoup recours à la mécanique pour peu de rendements », explique Ambroise Bécot.

Rapprocher consommateurs et agriculteurs

Quid du revenu et de la valeur ajoutée pour les agriculteurs ? Pour que ces derniers s’y retrouvent économiquement, Bernard Cressens, président de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) plaide pour un resserrement des liens entre agriculteurs et consommateurs. « Je regrette la disparition des ceintures vertes autour des villes, qui assuraient ce lien », explique-t-il. Pour recréer ce dialogue, et permettre la valorisation des actions des agriculteurs, Luc Servant, président de la commission environnement à l’APCA plaide pour la pédagogie. « Le consommateur peut avoir, à travers son alimentation, un impact sur la biodiversité. Pour cela, nous devons remettre de la connaissance pour combler le fossé entre agriculteurs et citoyens. »

L’enjeu du foncier

Pour assurer la viabilité de l’engagement des agriculteurs, plusieurs leviers ont été évoqués durant les discussions. De son côté, Bernard Cressens insiste sur l’enjeu du foncier. « Je voudrais qu’il y ait un objectif de zéro perte de biodiversité, comme pour l’artificialisation des sols, mais aussi un observatoire des espaces agricoles et périurbains, car pour aménager ces espaces en faveur de la biodiversité, nous devons sécuriser le foncier. » Les projets alimentaires territoriaux seraient également des alliés à ne pas négliger pour Luc Servant. Au niveau européen, Pascal Ferey plaide pour une mise à niveau des outils de subvention. « La Pac date de 1992, les choses ont changé depuis. Nous devons aller vers une rémunération des services environnementaux rendus, et ne plus seulement indemniser les pertes de revenus. »