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Les clés de réussite des projets de complémentarités culture-élevage dans les territoires

Le | Projets-territoriaux

Avec l’accentuation de la spécialisation des exploitations ces dernières années, de plus en plus de territoires veulent renouer avec la polyculture-élevage. L’Institut national de la recherche agronomique, Inra, et la tête de réseau des instituts techniques, Acta, ont analysé entre 2015 et 2019, les facteurs de déverrouillage et de pérennisation des projets collectifs d’agriculteurs mêlant céréaliers et éleveurs. Ils se sont appuyés sur les Groupements d’intérêts économique et environnemental, GIEE. « Dans la première vague d’approbation des projets de GIEE, 65 concernaient des interactions entre culture et élevage, explique Marc Moraine, ingénieur de recherche à l’Inra de Montpellier. Nous nous sommes dit qu’ils pouvaient être de parfaits champs d’investigation pour analyser les clés de réussite des démarches de développement de la polyculture-élevage en collectif. » Les résultats ont été présentés le 12 décembre lors du colloque sur la « complémentarités entre cultures et élevages pour des systèmes agri-alimentaires plus durables et résilients », à Poitiers.

Des structures intermédiaires entre l’élevage et les productions végétales

Une typologie des formes de complémentarités a été construite, permettant d’identifier trois situations types. D’une part, des projets dont l’objectif est de créer des passerelles entre des exploitations spécialisées animales et végétales ont été identifiés. De manière assez simple, les fermes peuvent décider de mettre en place une structure d’échange de fourrages et de grains pour l’alimentation des animaux ou de déjections animales pour fertiliser les cultures. « En s’impliquant davantage, les exploitations, peuvent aussi investir dans des unités de stockage et de séchage des fourrages, explique Marc Moraine. Ou encore, à un degré plus fort, de bâtir des structures communes de commercialisation en filières courtes. »

D’autre part, les experts ont analysé des formes de polyculture-élevage destinées à mieux valoriser des espaces à faible productivité pour les cultures, comme les friches viticoles. « L’élevage vient alors apporter une plus-value économique et en matière d’intégration du paysage », ajoute Marc Moraine. Enfin, la polyculture-élevage peut se structurer autour d’unités de méthanisation.

La légitimité des animateurs

« Chaque étape de ces projets nécessite la présence de différents acteurs », poursuit l’ingénieur. Ces acteurs doivent disposer d’une légitimité à proposer cette dynamique et apporter des ressources financières et techniques. Des chercheurs, des agriculteurs, une Cuma, une collectivité locale, des associations, des chambres d’agriculture ou encore des coopératives sont souvent des référents efficaces pour ces projets. Leurs forces peuvent être combinées.

La réussite des projets commence également par la formulation d’objectifs communs. Ils peuvent être d’ordre économique (complexité à valoriser une culture, problème d’approvisionnement), de recherche d’autonomie, environnementaux notamment sur l’accroissement de la biodiversité, d’organisation du travail, ou encore de solidarité.

Identifier un leader sympathique

« Au cours du projet, le financement, l’investissement, la réglementation, l’aspect technique, vont bien sûr être des éléments structurants, ajoute Marc Moraine. Tout comme la communication entre les acteurs, avec un leader qui doit disposer d’un capital sympathie indéniable. » Les investissements structurants, comme un méthaniseur, font également partie des clés de réussite des projets. « Il faut investir dans ces facteurs de déverrouillage, insiste le chercheur. Les acteurs peuvent aussi s’appuyer sur des outils comme

, réalisé par l’Inra de Toulouse. »

Les experts devraient poursuivre le travail sur 2020 avec le nouveau Réseau mixte technologique « Spicee », rassemblant l’Inra, l’Acta, l’Idele et de nombreux autres partenaires autour de projets innovants sur l’intégration culture-élevage. Un des axes de travail est de mettre en œuvre une approche de prospective sur le développement des complémentarités culture-élevage sur des territoires-pilotes, pour en évaluer les bénéfices et la faisabilité.