Référence agro

L’Unaf et les produits phytosanitaires : l’histoire sans fin

Le | Projets-territoriaux

''__D’un côté l’Unaf, syndicat des apiculteurs, accuse le traitement de semence Cruiser d’être dangereux pour les abeilles et de ne pas avoir fait l’objet d’une procédure d’homologation conforme. De l’autre, l’Afssa, le ministère de l’Agriculture, confirment respectivement, par communiqués de presse, leurs avis et leurs décisions d’autorisation pour un an, dans le cadre d’une mise sur le marché « surveillée et évaluée. » La firme Syngenta Agro estime, de son côté, avoir présenté un dossier conforme aux exigences du processus d’homologation dans le cadre de la reconnaissance mutuelle entre Etats membres de l’Union européenne.__'' __Sans abeilles, sans bourdons… il n’ y’aurait plus d’agriculture… ni d’apiculture… ni de fournisseurs d’intrants pour l’agriculture ! Personne n’a donc rien à gagner sur ce point là. Et chacun en est conscient. Pour autant, les dossiers sur les phytosanitaires font toujours l’objet de bras de fer avec le syndicat des apiculteurs.__ ((/public/./.unaf_s.jpg| |L))C’est la récente autorisation du traitement de semence Cruiser de la firme Syngenta Agro, qui a ravivé ce dossier difficile. L’Union nationale de l’apiculture française (Unaf), lors d’une conférence de presse organisée le 29 janvier a d’ailleurs annoncé « resserrer ses rangs » et privilégier deux voies pour faire front : le juridique et la mobilisation générale. Ainsi, pour le traitement de semence Cruiser, autorisé, depuis le 7 janvier, pour un an sur maïs sauf en maïs doux et portegraine mâle, le syndicat appelle, d’ores et déjà, à une mobilisation générale le 21 février 2008 devant les ministères de l’Agriculture et de l’Environnement pour demander son retrait. Il a aussi déposé devant le conseil d’Etat une requête d’annulation de la décision ministérielle d’autorisation de mise en marche de ce traitement de semences. Pour étayer sa demande, Bernard Fau, avocat de l’Unaf, soulève un dysfonctionnement dans les procédures d’homologation : « le dossier présente un problème d’équivalence, relève-t-il. Il a été autorisé dans le cadre de la procédure de reconnaissance mutuelle. C’est donc le dossier allemand qui a été pris comme base de travail. Or, en Allemagne, l’autorisation porte sur une dose de 69,3 mgr/ha alors qu’en France le pétitionnaire a fait une demande auprès de l’Afssa pour 88,2 mgr/ha, dose qui correspond à la densité de semis préconisée. La reconnaissance mutuelle ne peut donc être appliquée sur des critères d’évaluation différents au départ, » assure-t-il. __Pour Syngenta, pas de versions différentes entre les dossiers d’homologation__ Toutefois, Syngenta Agro, la firme qui a déposé la demande d’homologation auprès de l’Afssa (Dive) précise que le Cruiser a reçu une autorisation du ministère de l’Agriculture en France sur la base d’une densité maximale de 110 000 graines/ha avec 0,09 l par unité de 50 000 gr ce qui correspond à 69,3 mgr/ha. « Avant d’engager la procédure de reconnaissance mutuelle, explique André Fougeroux, du service homologation de Syngenta Agro, nous avons effectivement présenté à la Dive un dossier avec une demande d’homologation pour une dose maximale de 140 000 graines /ha qui correspond à certaines pratiques dans le Sud Ouest. De fait, cela portait la dose à 88,2 mgr/ha. Mais, dans le cadre de la reconnaissance mutuelle entre Etats membres, nous nous sommes alignés sur le dossier allemand en prenant la même densité de semis et la même dose. Il n’ y a pas de différence. » L’Unaf pointe aussi des recommandations qui figureraient sur le rapport de l’Afssa du 20 novembre : « Cruiser est dangereux pour les abeilles pendant la période de floraison, les ruches doivent être placées au delà d’un rayon de 3 km et des plantes mellifères ne doivent pas être introduites dans la rotation ». Pour la firme, cette précaution d’éloignement de 3 km a été avancée par l’administration parce qu’il n’y a pas eu d’étude spécifique sur maïs doux et porte graine mâle. « Nous avons décidé de simplifier et de ne pas proposer le Cruiser à l’homologation pour ces deux usages. » __L’Afssa et le ministère de l’Agriculture confirment leurs décisions__ Le ministère a en parallèle prévu de placer un système de surveillance sur des ruchers sur trois régions, très certainement dans les Sud-Ouest, grande zone de maïs où les problèmes de taupins sont importants et où les agriculteurs devraient le plus avoir recours à l’enrobage des semences. Une réunion au ministère de l’agriculture est prévue le 15 février. Elle devrait préciser en partenariat avec les apiculteurs, des associations protectrice de l’environnement, la localisation de ces ruchers ainsi que les modalités de suivis. Autre point de contestation repris par l’Unaf dans sa conférence, l’étude de Luc Belzunces de l’Inra d’Avignon : « son étude montre que les abeilles sont perturbées et ne rentrent pas à la ruche. » Après son audition et celle de Franck Altru (voir lettre du 21 janvier) le 16 janvier, l’Afssa a rendu son avis. Et c’est aussi le 29 janvier qu’elle a communiqué à la presse : « Mr Luc Belzunces a présenté des résultats expérimentaux de toxicité aiguë, réitérée ou chronique, obtenus en laboratoire avec diverses substances actives, parmi lesquelles le thiamétoxam, administré aux abeilles dans du sirop. Mr L. Belzunces a convenu que ces résultats sont très difficilement extrapolables à des résultats que l’on pourrait attendre après une exposition au travers du pollen. » Enfin, le ministère de l’Agriculture a rappelé dans un communiqué daté du 31 janvier que : « le Cruiser a été évalué dans des conditions de précaution maximale prévoyant notamment une autorisation limitée de 1 an suivie d’une nouvelle évaluation, d’une limitation de la période avant le 15 mai afin de réduire la période de floraison, d’une utilisation autorisée uniquement sur le maïs grain, ensilage et porte-graine femelle (…). L’autorisation du Cruiser permettra aux agriculteurs d’utiliser des préparations dont l’évaluation a été effectuée conformément aux procédures communautaires et nationales. » Anne Delettre