Zéro perte de biodiversité en agriculture via les cahiers des charges
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Stopper l’érosion de la biodiversité en mobilisant les acteurs des filières alimentaires via des cahiers des charges intégrant cet enjeu. Tel est l’objectif du projet pilote mené en France par Solagro, en partenariat avec l’agence agoodforgood, depuis août 2016 dans le cadre du programme européen Life food and biodiversity. Comment ? En proposant une matrice commune à tous les industriels, en intégrant plus d’environnement dans les signes de qualité. Une présentation des recommandations consignées dans un guide disponible en anglais, et issu de l’analyse de 54 cahiers de charges régionaux, nationaux et internationaux* du secteur agroalimentaire, a été effectuée le 16 mars au ministère de la Transition Écologique à Paris-La Défense.
Ce lever de rideau a été présenté devant des acteurs de la transformation, de la grande distribution, du conseil agricole, des audits, des normes et de l’administration. Il se centre sur les leviers au niveau de la ferme. « Nous avons hiérarchisé les enjeux sans oublier la vision globale, a expliqué Philippe Pointereau, directeur de Solagro. Dans toutes les filières, des actions en faveur de la biodiversité sont possibles. Nous préférons les petites choses concrètes plutôt que les grands messages. »
Fixer les indicateurs et les plans d’actions
Chacun doit pouvoir se positionner sur les critères et sur les plans d’actions à promouvoir pour favoriser la biodiversité sur les fermes. « Nous souhaitons obtenir un socle commun d’indicateurs, sur lequel les industriels se seront accordés », complète Caroline Gibert, chargée de mission pour Solagro. Ces indicateurs sont regroupés en deux grands chapitres : le maintien des écosystèmes, essentiellement via les infrastructures agro-écologiques, et les très bonnes pratiques agricoles avec la réduction des impacts sur l’environnement. Elles passent par la couverture permanente des terres, la diversité de la rotation, notamment avec l’introduction de plus de légumineuses, une autosuffisance de 50 % pour la ration fourragère du cheptel avec principalement de l’herbe pâturée.
« Nous proposons d’aller plus loin que la sixième directive nitrate en cours de préparation », commente Philippe Pointereau. Les engrais organiques sont à privilégier. Des zones tampons de 10 mètres permettent de mieux protéger la ressource en eau. Côté réduction des produits phytosanitaires, les pratiques se centrent sur les solutions alternatives : opter pour le désherbage mécanique, n’utiliser les pesticides que si nécessaire et après mise en œuvre de mesures préventives, lutte biologique. L’agro-biodiversité se préserve avec les aides pour la mise en marché de variétés et races locales… Le développement de la formation et de la communication envers les consommateurs complète ces conseils.
Évaluer la biodiversité et les progrès effectués
La mise en place de ces recommandations dans les cahiers des charges implique de pouvoir effectuer un diagnostic au niveau de la ferme via un outil construit en parallèle à destination de toutes les fermes européennes. Cet outil de performance de la biodiversité évalue l’infrastructure agro-écologique, les modalités de gestion, les mesures prophylactiques, les mesures de protection et établit des points d’amélioration. Il est destiné aux agriculteurs et à leurs conseillers. C’est aussi un outil pour apprécier les progrès réalisés.
La prochaine étape du projet concerne la traduction du guide pratique en français, il sera prêt en fin d’année et devra être affiné avec les opérateurs. La version finale, en cinq langues, sera disponible en 2019. Même pas de temps pour l’outil de diagnostic : en cours de développement dans les fermes pilotes, il sera disponible en test cet été pour les industriels, la version définitive en 2019. Un programme gratuit de formation des conseillers est aussi prévu.
* L’étude a été menée dans les quatre pays pilotes du projet européen Life food and biodiversity : France, Allemagne, Espagne et Portugal.