Protéines végétales, les coopératives pointent un équilibre offre et demande encore fragile
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Les coopératives Bourgogne du Sud et Arterris se sont lancées sur le marché des protéines végétales, l’une pour le feed et l’autre pour le food. Si les perspectives sont prometteuses, elles pointent des difficultés pour organiser le marché et des impasses techniques complexifiant l’approvisionnement des filières aval.
Les protéines végétales gagnent du terrain. « La demande augmente depuis quatre ans. Nous avons décidé de multiplier par trois notre capacité de production pour 2020 », explique Patrice Bassot, directeur de Sotexpro lors des troisièmes rencontres francophones sur les légumineuses qui se sont tenues les 24 et 25 février 2021. La société commercialise des protéines extrudées vers des marchés de plats cuisinés vegan, dont 70 % à l’exportation.
Toutefois, les coopératives agricoles pointent un équilibre entre l’offre et la demande fragile. « Nous oscillons entre une suroffre et un déficit de l’offre qui font fluctuer les cours et désorientent les producteurs, explique Nicolas Prevost, responsable commercialisation collecte grandes cultures chez Arterris. Notre travail est de réussir à construire un débouché durable et rentable avec nos partenaires. » La coopérative a misé sur le pois chiche, une culture adaptée au Sud de la France et qui peut s’insérer dans des rotations essentiellement construites autour du tournesol et du blé dur.
Pour Christophe Marcoux, directeur de Bourgogne du Sud, l’équilibre offre et demande passe par le dialogue. Avec ses partenaires, la coopérative avance en toute transparence et dans une démarche équitable sur le partage de la valeur. Les prix sont fixés avec l’agriculteur très en amont afin que celui-ci organise ses assolements. L’objectif est d’atteindre un prix de 400 à 450 euros la tonne de soja pour rendre la culture intéressante vis-à-vis du maïs.
Investir dans les outils de production et valoriser la production française
Chez Bourgogne du Sud, l’histoire des protéines végétales est une vraie saga qui a démarré il y a plus de quarante ans. Les premiers pas n’ont pas été concluants car la structure, qui commercialise du soja pour l’alimentation animale, manquait d’outils de transformation. La coopérative a créé Extrusel en 1988, avec d’autres partenaires. « Cela n’a pas marché non plus car nous n’avons pas su donner de la valeur à la production française sans OGM », poursuit-il. La coopérative est repartie en 2014 avec du soja trituré « Désormais nous valorisons bien notre production par rapport à l’origine brésilienne », indique Christophe Marcoux. Les protéines à destination de l’alimentation animale sont valorisées dans des cahiers des charges de qualité, pour les fromages, la volaille, etc. « Nous voulons désormais convaincre les entreprises, indique-t-il. Danone vient de signer avec nous. C’est qui le patron ou Carrefour sont en train d’arriver. Nous voulons également aller vers le food. »
Les coopératives, un maillon central
La filière aval mise sur le maillon des coopératives agricoles. Elise Bourcier, présidente de C&Dac, reconnaît que sa société a vite été confrontée au problème de l’approvisionnement. Elle accompagne les entreprises agroalimentaires sur la mise en place des produits à base de légumineuses fermentées, un procédé qui améliore le goût, et travaille en étroite relation avec les coopératives notamment pour le choix des variétés de féverole. Ses protéines servent à fabriquer des desserts lactés. La culture est encore inconnue du consommateur mais « produit localement et avec un goût moins prononcé que d’autres légumineuses. »
Des difficultés d’approvisionnement
Patrice Bassot déplore de son côté une pénurie de féverole sur le marché français : « Depuis deux ans, nous sommes obligés de nous approvisionner en Angleterre. De plus, cette année, les rendements, comme ceux du pois, ont baissé de 2 %, ce qui nous pose un problème de coût par rapport au soja. » Les impasses techniques sur ces cultures peuvent expliquer cette baisse de production. « Depuis deux ans, nous avons des problèmes en traitement de semences et pour lutter contre certains insectes, reconnaît Nicolas Prévos. Nous nous sommes donc engagés dans un pool de recherche sur la génétique pour tenter d’y remédier. »