Stockage sans insecticide : pour un résultat optimal, combiner les solutions
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Stocker sans insecticides, c’est possible mais complexe ! Pour un résultat optimal, plusieurs solutions doivent souvent être combinées. Nettoyage, ventilation, outils de surveillance, solutions de biocontrôle… Les techniques s’affinent mais leur coût reste parfois un frein.
« Pour lutter contre les insectes, tout commence par un nettoyage soigné des infrastructures, explique Alain Lebel, responsable exécution chez Dijon Céréales. Le manque de propreté des installations est le premier facteur de développement des ravageurs. » Selon une enquête réalisée par FranceAgriMer en 2015, 94 % des OS pratiquent le vide sanitaire avant de rentrer leur récolte, afin de limiter l’utilisation d’insecticides préventifs. « Aujourd’hui, nous ne faisons que du curatif, illustre Benoît Confuron, responsable des opérations pour le groupe Carré. Notre objectif est que la collecte se fasse sans insecticide de stockage. » À ce jour, sur les 860 000 t de céréales collectées par le négoce, 80 % échappent à l’utilisation d’insecticides de synthèse. Du côté de Dijon Céréales, la moitié de la collecte conventionnelle en blé tendre entre dans ce cadre.
Stockage sans insecticide : des alternatives encore coûteuses
En préventif, les OS appliquent des poudres inertes pour éradiquer les éventuels insectes ayant échappé au nettoyage des locaux de stockage. La lutte biologique, avec le recours à des micro-guêpes parasitoïdes, est expérimentée pour accéder aux espaces inatteignables par les humains. « Mais cela revient cher pour des produits à faible valeur ajoutée comme les céréales » indique Ludovic Lignier, responsable conservation des grains chez Dijon Céréales, un poste créé il y a deux ans.
La plupart des alternatives aux insecticides de stockage demeurent coûteuses. « Arvalis préconise un nettoyage des grains à réception, pour éliminer les espèces secondaires. Mais cette pratique élimine aussi des grains brisés, qui auraient pu être valorisés : le lot perd de la valeur », explique Marine Cabacos, ingénieure au pôle stockage des grains d’Arvalis. Même problème pour les poudres inertes, qui font baisser le poids spécifique des lots.
Surveillance et refroidissement du grain
Après réception de la récolte, la priorité est de contrôler la présence d’insectes et le développement de mycotoxines à travers la température et l’humidité du grain. Des sondes connectées permettent d’automatiser la ventilation à distance, voire de détecter la présence d’insectes. Les ravageurs entrent en dormance en dessous de 12 °C, l’objectif est donc d’arriver rapidement à cette température. La programmation de la ventilation a également permis au groupe Carré d’économiser 80 000 € d’énergie en adaptant les créneaux de ventilation. Le recours à des groupes froids permet, selon les OS les ayant expérimentés, de descendre sous les 12 °C plus vite, sans surcoût énergétique : la ventilation à air froid nécessitant moins de pression que la ventilation à air ambiant.
« Si malgré nos efforts, nous repérons des insectes, nous faisons un nettoyage avec aspiration, indique Alain Lebel. Si le problème persiste, le lot est traité et sort du circuit sans insecticide. » Carré a commencé à expérimenter topgrain, un insecticide naturel composé de spinosad, sur plusieurs sites. « Il est tôt pour tirer un bilan, mais les résultats semblent convaincants », estime Benoît Confuron. La molécule est utilisée dans les deux silos de Dijon Céréales dédiés au bio. Les opérateurs des silos peuvent aussi recourir au chauffage du grain, une pratique efficace mais énergivore et qui fait perdre de la masse au lot. Dernière solution, pour le stockage sans insecticide : la pulvérisation d’azote, de CO2 ou de phosphine. « Cette pratique est efficace et il n’y a pas de réémergence, affirme Marine Cabacos. Mais elle nécessite de disposer de cellules parfaitement étanches, or le parc des silos français n’est pas adapté. »
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Les insectes primaires, comme les charançons et les capucins (à gauche), endommagent des grains entiers pour se nourrir et y pondre. Les insectes secondaires, comme le silvain et les triboliums (à droite), se nourrissent des débris et de poussières et pondent leurs œufs hors des grains. © DR[/caption]
Développement des OAD
Pour mettre en œuvre ces processus, la formation des opérateurs est indispensable. « Le poste de chef de silo ou d’agent de silo, ce n’est plus seulement gérer la fosse et charger un camion. C’est de l’enregistrement informatique, de la traçabilité, des compétences supplémentaires », appuie Alain Lebel. « Arvalis travaille à l’élaboration d’outils pour aider les OS à optimiser leur ventilation, explique Marine Cabacos. Venti-Lis permet d’évaluer si les installations et les conditions sont réunies pour atteindre les objectifs de ventilation. » Les OAD pourraient prendre une place de plus en plus importante dans l’évaluation de la qualité sanitaire du grain : Dijon Céréales travaille avec Unarix au développement d’une application smartphone reposant sur une intelligence artificielle, et permettant de déterminer grâce à une simple photo la présence de résidus d’insecticides sur le grain.
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