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Thierry Blandinières, InVivo, « instaurer un « quoi qu’il en coûte » agricole »

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Thierry Blandinières, InVivo, « instaurer un « quoi qu’il en coûte » agricole »
Thierry Blandinières, InVivo, « instaurer un « quoi qu’il en coûte » agricole »

Lors d’une conférence de presse organisée le 2 mars au salon de l’agriculture, Thierry Blandinières, directeur général d’InVivo, a évoqué la situation de l’Ukraine, pays dans lequel le groupe est implanté. « Nous avons 350 salariés ukrainiens répartis dans une malterie, une activité agriculture, qui vend des intrants et collecte des céréales, ainsi qu’un bureau de trading pour exporter les blés. Tous nos sites sont fermés à ce jour, et nos salariés français sont rentrés dès jeudi 24 février (jour de la première offensive russe, ndlr). Nous avons, par sécurité, coupé tous nos circuits informatiques. Nos salariés ukrainiens sont chez eux, certains ont pris les armes pour défendre leur pays. Nous avons mis en place une cellule de crise et communiquons avec nos équipes sur le terrain tous les jours. »

Livrer les 2000 clients agriculteurs d’Ukraine de Soufflet

Les salariés situés à Kiev ont quitté la capitale, et les équipes d’InVivo sont plutôt situées dans des zones calmes. L’Ukraine représente 25 % du chiffre d’affaires de Soufflet Agriculture, qui représente 20 % du groupe InVivo. Soufflet dispose de 2000 clients agriculteurs en Ukraine, qui devraient commencer à semer d’ici un mois. « En termes logistiques, nous sommes en mesure de livrer les agriculteurs, si la situation se détend », a précisé Thierry Blandinières. Le groupe dispose de suffisamment de semences sur place, alors que le marché des semenciers est fortement bouleversé par la situation.

Autoriser la culture de blé sur les jachères

Mais outre les activités du groupe sur place, InVivo compte influencer les actions à effectuer à court terme. « Nous rappelons que l’Ukraine produit 30 Mt de blé par an, dont 20 à 25 Mt sont exportées. Il existe un risque que ces volumes manquent, auquel cas nous devons pouvoir les produire dans d’autres régions du monde, faute de quoi les conséquences en termes de sécurité alimentaire seront catastrophiques. » InVivo, l’AGPB et La Coopération agricole demandent à ce que les 10 à 15 % de surfaces en jachère au sein de l’Union européenne puissent être utilisées pour la production de céréales pour la prochaine campagne. « Le dossier est sur le bureau de Julien Denormandie, qui doit convaincre ses homologues européens, car la réponse ne peut qu’être européenne », renchérit Thierry Blandinières.

Une aide publique européenne pour endiguer la flambée des engrais

Autre demande d’InVivo : qu’une subvention publique permette de sécuriser les approvisionnements en engrais au cours des prochaines campagnes. « Il nous faut une garantie de l’Europe pendant un an ou deux pour éviter une flambée des prix pour les agriculteurs. Nous avons joué la carte du « quoi qu’il en coûte » pour la situation sanitaire, aujourd’hui, il nous faut un quoi qu’il en coûte agricole ». Dans le cas où l’approvisionnement en gaz serait insuffisant pour produire des engrais, « l’Algérie aura un rôle à jouer pour approvisionner l’Europe », a précisé Thierry Blandinières à Référence agro.

La crise en Ukraine pourrait durer deux ou trois ans

Comme la Coopération agricole, InVivo demande un système assurantiel pour protéger ses actifs en Ukraine, alors qu’aucune assurance ne maintient sa couverture en temps de guerre. « Les assurances pourraient être couvertes par l’État ou la BPI pour garantir nos stocks et la qualité de nos paiements » a indiqué le directeur général d’InVivo, qui a fait part de difficultés d’ordre financières pour payer le salaire des employés.

Enfin, sur le long terme, la filière demande que le programme Farm to fork soit modifié pour ne pas provoquer de baisse de la production, suite aux études d’impact faisant état d’une baisse de 10 à 20 % de la productivité. « La crise sanitaire, puis la crise ukrainienne, réveillent les consciences, a conclu Thierry Blandinières. Nous devons nous préparer dès maintenant. Cette crise ne durera pas quelques mois, mais au moins deux ou trois ans. Il faut se mobiliser collectivement pour éviter que les cours du blé ne montent encore. » Le prix du blé tendre a atteint, le 2 mars, un nouveau pic sur Euronext, à 378,5 €/t.