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La filière pomme de terre redoute le statut de culture attractive pour les pollinisateurs

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Dans le cadre du plan pollinisateurs, la liste des cultures dites attractives pour les pollinisateurs doit être publiée en ce début d’année 2022. Avec des contraintes à la clé pour les cultures concernées. La filière pomme de terre s’est mobilisée pour prouver qu’elle ne devait pas intégrer cette liste, mais elle craint que ses travaux ne soient pas pris en compte.

Crédit : Arvalis-Institut du végétal - © D.R.
Crédit : Arvalis-Institut du végétal - © D.R.

Depuis début 2021, les acteurs de la filière pomme de terre se consacrent à caractériser l’attractivité des parcelles pour les pollinisateurs. Des travaux lancés, initialement, dans le cadre des dérogations prévues à l’interdiction des néonicotinoïdes. En effet, les cultures attractives ne doivent pas être implantées, entre 2022 et 2024 selon les cas, suite à l’utilisation des insecticides de cette famille sur betterave. Mais avec la parution du plan pollinisateurs, fin 2021, ces travaux prennent une autre dimension.

La filière pomme de terre mobilisée

En effet, ce plan prévoit que chaque produit appliqué en période de floraison, sur les cultures jugées attractives, doit posséder la mention « abeilles ». Ce qui signifie des contraintes : traitements nocturnes, ou a minima entre deux heures avant et trois heures après la nuit. Tout aussi inquiétantes sont les craintes de voir les firmes renoncer à la commercialisation de certaines spécialités. « Les fabricants ne veulent pas prendre de risque, glisse Didier Lombart, président du comité professionnel pomme de terre chez Arvalis. Les démarches de réhomologations sont lourdes, et le sujet est explosif vis-à-vis de l’opinion publique. » Selon lui, six molécules insecticides sur onze sont d’ores et déjà inutilisables. « Même en bio, le cuivre ne serait pas utilisable en période de floraison », prévient encore Didier Lombart.

Inquiétude autour de la posture de l’Anses

La filière pomme de terre ne prend donc pas le sujet à la légère. « Dès le printemps 2021, nous avons échangé avec l’Anses pour mettre en place les bons protocoles et lui apporter des données pertinentes pour le classement de notre culture, relate Didier Lombart. Nous avons rendu une étude rentrant dans ce cadre à l’automne. » Selon cette étude, la pomme de terre n’est pas attractive pour les abeilles. « Les grains de pollen sont 500 fois plus lourds que ceux des autres fleurs, on n’en retrouve pas dans les ruches », glisse Didier Lombart. Même si certains autres pollinisateurs, dont les bourdons, sont susceptibles de passer sur les parcelles, les signaux sont donc plutôt positifs.

« Conséquences mortifères »

Mais la filière s’inquiète. « L’Anses n’a pas accusé réception de ces travaux quand nous leur avons envoyés et affirme que nous n’avons pas apporté la preuve que la pomme de terre n’est pas attractive, peste Didier Lombart. Nous avons pourtant joué le jeu et partagé nos conclusions, basées sur un jeu de plus de 20 000 données. » La publication définitive de la liste des cultures non-attractives au bulletin officiel du ministère de l’Agriculture, prévue a priori pour ce début d’année 2022, est attendue avec d’autant plus de fébrilité que dans la liste mise en consultation en novembre dernier, la pomme de terre était absente. « Si cette liste est confirmée, les conséquences en termes de distorsion de concurrence avec les autres pays producteurs seraient importantes », redoute Didier Lombart.