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Les protéines végétales peinent encore à se développer

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Trois années de travail et encore beaucoup d’efforts à fournir ! À l’occasion de la clôture du projet ProtéiNEW, en janvier 2024, les acteurs des filières de protéines végétales ont une nouvelle fois rappelé les nombreux freins à débloquer pour permettre à ces cultures de prendre leur envol. Le retrait de substances, l’innovation semencière à accélérer ou encore la rémunération des agriculteurs font partie des points soulignés.

Les protéines végétales peinent encore à se développer
Les protéines végétales peinent encore à se développer

Faire de la France un leader des protéines végétales : c’était l’objectif du projet ProtéiNEW, lancé en septembre 2021 et clôturé en janvier 2024, lors d’un colloque organisé le 18 janvier par Terres Univia et Protéines France. « La France est bien placée pour atteindre cette ambition car elle dispose d’un collectif d’acteurs allant du champ à l’assiette, souligne Paul-Joël Derian, président de Protéines France, en ouverture du colloque. Nous avons cependant vu que le collectif a besoin de nouveaux outils et de nouvelles connaissances. »

« Être conscient d’où l’on part »

Après trois ans de travail, et malgré une consommation toujours en croissance, dans un contexte inflationniste, la marche à gravir reste en effet encore très haute. Un défi de taille, que n’a pas manqué de souligner le directeur de Terres Univia, Laurent Rosso : « Tout reste à faire, résume-t-il. Nous devons mener en parallèle les investissements dans la recherche, la gestion des risques, l’organisation des filières, sinon nous perdrons du temps et nous aurons du mal à enclencher la dynamique. » Certains outils manquent encore, à l’image des capacités lacunaires chez FranceAgriMer, pour faire le recensement des cultures de légumes secs. « Il faut être conscient d’où on part », appuie Laurent Rosso.

Temporiser les retraits de substances

Le directeur de Terres Univia insiste par ailleurs sur l’enjeu des produits phytosanitaires. « Les cultures les plus ciblées par le retrait de molécules sont celles de diversification et notamment les légumineuses », indique-t-il. Les solutions de désherbage seraient tout particulièrement concernées. « Nous devons absolument réussir à temporiser les décisions, cela ne sert à rien que nous nous mobilisons tous dans ce type de projet si nous ne pouvons plus produire », déplore Laurent Rosso. La problématique phytosanitaire aurait également des conséquences sur la dynamique exportatrice de la France. « Pour la féverole, nous avons perdu le marché égyptien en raison d’un manque d’insecticides, poursuit-il. Nous redécouvrons actuellement l’intérêt de cette culture mais nous ne sommes pas prêts, il faut tout redécouvrir, resegmenter, réinventer. »

Débloquer l’innovation semencière

Un effort colossal à fournir qu’abonde Raphaëlle Senio-Girerd, directrice innovation et filière chez Sofiprotéol. « Nous sommes presque au creux de la vague, historiquement, de la production de protéines végétales, souligne-t-elle. Les frémissements sont très légers. Or, l’envie et la demande sont là. Pour l’heure, les conditions ne sont pas réunies en termes de prix payé et de la prise de risque, compte tenu des impasses techniques. » Pour surmonter ces obstacles, Raphaëlle Senio-Girerd plaide en faveur de la définition d’un socle commun garantissant la compétitivité des productions et la capacité à produire des agriculteurs. Parmi les priorités identifiées par Sofiprotéol : la levée de frein dans l’innovation semencière. « Nous devons sortir du cercle vicieux où nous produisons moins et donc nous

investissons moins, plaide-t-elle. La priorité de Sofiprotéol est de rattraper 30 à 40 ans de retard en investissant dans l’innovation semencière. Nous espérons pouvoir répondre à la demande avec une offre locale dans les prochaines années. »

Le pari du collectif

Cette dernière veut cependant croire aux bénéfices apportés par les projets collectifs associant de nombreux acteurs, à l’image de ProtéiNEW. « Ils permettent de créer une masse critique, et un lieu d’échanges où les industriels peuvent être clairs sur leurs attentes. Par ailleurs, dans un effort de décarbonation, les entreprises souhaitent favoriser l’introduction de légumineuses dans les rotations, explique-t-elle. Les consommateurs ne doivent pas être les seuls à assumer cette transition. »

Des ateliers organisés avec les participants du colloque doivent permettre de finaliser les différents livrables du projet.