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Affichage environnemental, le ton monte au niveau européen

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Dans moins d’un mois, la Commission européenne devrait communiquer une proposition de réglementation pour légiférer sur les Green Claims ou allégations environnementales. Au cœur de ce règlement se trouve la validation de la méthode d’évaluation des impacts environnementaux. Le 26 octobre, deux conférences se sont déroulées pour indiquer à la Commission européenne que sa méthode, le PEF pour Product Environmental Footprint, n’était pas adaptée et qu’elle conduirait à un greenwashing généralisé sur les produits biosourcés.

Affichage environnemental, le ton monte au niveau européen
Affichage environnemental, le ton monte au niveau européen

Alors que la Commission européenne devrait présenter le 30 novembre une proposition de règlement pour les allégations environnementales (Green Claims), contenu dans le package II Economie circulaire, la pression s’intensifie sur le PEF. La méthode européenne pour calculer l’empreinte environnementale des produits de consommation (Product Environmental Footprint), basée sur l’ACV, a été vivement critiquée le 26 octobre à l’occasion d’une conférence de presse organisée par l’UFC-Que choisir au Parlement européen, ainsi que lors d’une conférence en ligne organisée par le groupe politique des Verts/Alliance libre européenne, intitulé « Sustainable or not ? That is the question ! ».

Greenwashing et systèmes intensifs

« La méthode PEF est trop primaire : elle acceptera des allégations mensongères, prévient Olivier Andrault, chargé de mission alimentation à l’UFC-Que choisir. Nous allons adouber le greenwashing ! » Le PEF est remis en cause pour sa difficulté à englober tous les impacts de l’agriculture, qu’il s’agisse de pression sur la biodiversité ou de services rendus, avec le stockage de carbone par exemple. Plus récemment, des exemples dans la filière textile ont révélé que le PEF notait mieux les produits synthétiques que les fibres naturelles. « L’ACV permet à la fast fashion d’avoir de bonnes notes », confirme Philippe Schiesser, fondateur et consultant pour Ecoeff Lab, face aux députés Verts/ALE. Dans l’alimentaire, le constat est désormais identique, sous la montée en puissance du nombre de produits évalués : l’ACV favorise les systèmes intensifs, au détriment des systèmes extensifs et biologiques. « Entre une pomme conventionnelle provenant d’Argentine et une poire bio de Belgique, le PEF attribue la même note : A ! », s’étonne Olivier Andrault. Sabine Bonnot, présidente de l’Itab et porte-parole du collectif Planet-Score, va plus loin lors de la conférence du groupe politique européen : « Quelle que soit la pomme et la façon dont elle a été produite, elle est bonne pour l’environnement. À l’inverse, si on suit le PEF, il faut arrêter tout de suite l’éco-pâturage, car les ovins seraient une bombe pour l’environnement. »

Le PEF, pas adapté à la transition

Ces deux événements font suite à plusieurs prises de position au niveau européen, notamment par le Bureau européen des unions de consommateurs, BEUC, et le Bureau européen de l’environnement (EEB), mais aussi en France avec des acteurs comme FNE, Agir pour l’environnement, le Synabio, CIWF,…demandant un affichage environnemental « au service des consommateurs et de la transition ». Car c’est là que réside le reproche fait au PEF et in fine à la Commission européenne, comme le précise Olivier Andrault : « il faut définir le type de productions que nous voulons, est-ce une intensification durable ou une transition écologique ? » En d’autres termes, pour assurer une transition, le PEF doit être complété par d’autres indicateurs permettant de mieux saisir les impacts sur la biodiversité, le carbone, le bien-être animal,…Et indiquer une trajectoire, révéler une vision comme le demandait l’Iddri dans son rapport de l’année passée. Pour Xavier Poux, chef de projet au sein du bureau d’études et de recherche AScA, qui intervenait sur l’invitation du groupe Les Verts/ALE : « le PEF est une boussole qui indique le Sud. »

Jérôme Caillé, administrateur de Terrena et président de Terrena Bio, a quant à lui fait son choix. Il l’explique lors de la conférence de presse de l’UFC-Que Choisir au Parlement : « Le PEF ne permet pas nécessairement de faire évoluer le modèle de production, tandis que le Planet-Score permet d’améliorer le bilan carbone et de réaliser une transition progressive, sans rupture. » En se basant sur les limites planétaires et en complétant l’ACV par d’autres indicateurs, le Planet-Score séduit de plus en plus d’entreprises et de pays, poussant la société civile à s’engager pour cette méthode, plutôt que pour le PEF. « Nous ne disons pas que le Planet-Score est la seule méthode qui existe, mais elle marche », conclut Olivier Andrault. Les Green Claims n’étant pas un outil de contrainte mais d’incitation, pour les entreprises comme pour les consommateurs, la Commission européenne entendra-t-elle ces critiques ?