Le 7e programme d’actions nitrates bientôt en consultation
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Censée entrer en vigueur au 1er septembre 2021, la septième version du Programme d’actions national (PAN) sur les nitrates se fait encore attendre. Une V2 devrait néanmoins être mise en consultation au cours des prochaines semaines, une fois que les derniers arbitrages seront rendus. Explications avec Jean-Paul Hamon, en charge du dossier nitrates à la Chambre d’agriculture de Bretagne.
La Commission européenne a récemment appelé à accélérer la lutte contre la pollution des eaux liées aux nitrates. En France, le PAN7, prochaine mouture du programme d’actions national sur les nitrates, dont l’entrée en vigueur était prévue le 1er septembre, est encore en cours de rédaction. « Une V2 sera prochainement soumise à la consultation du public, explique néanmoins Jean-Paul Hamon, en charge du dossier nitrates à la Chambre d’agriculture de Bretagne. L’ambition du ministère de l’Agriculture est de la lancer à l’automne, afin que le texte soit adopté avant la fin de l’année et qu’il entre en application au 1er septembre 2022. »
Des arbitrages attendus sur les couverts végétaux…
Plusieurs arbitrages sont néanmoins encore attendus, expliquant en partie le retard pris. Certains d’entre eux concernent les couverts végétaux. « Le PAN6 prévoyait des exceptions à l’obligation de couverts pour les sols argileux, indique Jean-Paul Hamon. Le ministère souhaite réviser les critères de taux d’argile pour caractériser ces sols, ce qui pourrait réduire le champ d’application des dérogations. » Par ailleurs, des réflexions seraient également en cours au sujet de la couverture des sols en cas d’interculture courte, fixée à 75 jours, après laquelle l’implantation de couverts serait obligatoire, si la mesure était retenue en zone d’action renforcée.
… mais aussi sur les nouvelles zones vulnérables
Un autre chantier majeur porte sur les zones vulnérables. Suite aux travaux menés entre 2019 et 2021, les préfets de bassin seraient en train d’adopter des nouvelles cartes, avec des extensions notamment dans l’est du pays, où ces zones seraient étendues. « Des exploitations vont se retrouver sous le champ du PAN pour la première fois, avec une obligation de mise en conformité, notamment en élevage, indique Jean-Paul Hamon. Cela va être un gros enjeu pour ces exploitations au cours des six prochains mois. » Dans ces territoires nouvellement concernés, des déclarations d’intention d’engagement, DIE, pourront être réalisées.
Expérimenter une nouvelle approche via des objectifs de résultat
Autre idée qui irrigue les réflexions : celle de l’opportunité d’expérimenter sur des territoires volontaires, un système fondé sur des objectifs de résultats et pas seulement d’obligation de moyens. « Cela peut sembler séduisant mais peut aussi s’avérer en réalité compliqué à mettre en place, d’où une nécessité de bien cadrer les objectifs et les finalités », poursuit-il. L’idée ne laisse néanmoins pas indifférent au sein des ministères. « Un appel à manifestation d’intérêt devrait être lancé l’hiver prochain, vers les territoires et les collectifs souhaitant expérimenter cette nouvelle approche », indique ainsi Jean-Paul Hamon.
Plusieurs problématiques à déverrouiller
En la matière, les défis à relever sont nombreux. « L’interprétation des nombreux types de reliquat d’azote n’est pas simple, car ils dépendent des pratiques agricoles, des conditions météo, de l’historique de la parcelle, etc, liste Jean-Paul Hamon. En ce qui concerne l’eau, l’inertie des milieux complique aussi l’interprétation des résultats. Avec des obligations de résultats territoriaux, l’agriculteur est jugé à l’aune des pratiques de tous mais aussi celles du passé. »
L’arrêté du PAR attendu pour la rentrée 2022
L’ensemble de ces points sera précisé dans des arrêtés dédiés. Un autre concernera tout particulièrement les plans d’actions régionaux, PAR. Normalement, les discussions les concernant auraient dû faire suite à l’entrée en vigueur du PAN. Mais compte tenu du bouleversement du calendrier initial, celles-ci s’opèrent en parallèle. Elles sont actuellement engagées dans la quasi-totalité des territoires. « Le calendrier fixé tend vers une finalisation pour l’été 2022 et une entrée en vigueur au 1er septembre suivant, précise Jean-Paul Hamon. Selon ce dernier, des précisions pourraient être introduites pour le déploiement des zones d’action renforcée, ZAR, mais aussi sur le sujet de la flexibilité agrométéorologique, permettant de moduler certaines dates du calendrier d’épandage, par exemple. « La Bretagne a déjà expérimenté cette pratique, mais cela serait une première au niveau national », affirme Jean-Paul Hamon. Il indique néanmoins qu’étant donné que « la campagne aura déjà débuté, il restera à préciser la date d’entrée en application. »
Le cas particulier de la Bretagne
En Bretagne, bien que la région affiche une évolution favorable des teneurs en nitrates, les discussions autour du prochain PAR sont tendues. Certaines propositions de l’administration n’ont pas été bien accueillies par la profession agricole. La situation de la région est particulière, en raison notamment des échouages d’algues vertes, soumis à de fortes variations interannuelles. Suite à une plainte d’Eau et Rivières de Bretagne, le préfet de région a été mis en demeure le 4 juin par le tribunal administratif de Rennes, et a pour obligation de compléter le PAR6 pour les territoires concernées par ces échouages. « Un arrêté PAR6 bis en Bretagne pourrait être adopté d’ici à la fin de l’année et laisse présager une nouvelle inflation réglementaire pour ces territoires, avec un arsenal de nouvelles obligations qui s’annonce sur des sujets aussi divers que le risque lié au surpâturage, la vérification de l’étanchéité des stockages, les reliquats post absorption ou encore l’élargissement des bandes enherbées », explique Jean-Paul Hamon. Le préfet doit également préciser le cadre réglementaire en cas d’échec des mesures volontaires des Plans d’action algues vertes, Plav, qui doivent être révisés au premier semestre 2022.