Plan eau, le secteur agricole entre soulagement et vigilance
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De l’enthousiasme, certes, mais mesuré. Suite à la présentation du Plan eau, le 30 mars, par Emmanuel Macron, de nombreuses parties prenantes agricoles ont salué ces annonces, tout en restant prudentes sur les suites qui leur seront données. FNE, pour sa part, regrette la revue à la baisse de l’ambition fixée lors des Assises de l’eau.
Chaque annonce politique forte a droit, dans les heures et jours qui suivent, au traditionnel bal de réactions. La présentation du Plan eau par le président de la République, le 30 mars 2023, ne déroge pas à la règle. Dans les rangs du secteur agricole, le soulagement prime en ce qui concerne la stabilisation des prélèvements pour l’agriculture. « Si nous partageons le constat du besoin d’économie de la ressource, on ne peut pas envisager de réduire les taux de prélèvements pour la production agricole : sans eau, pas d’alimentation », réagit ainsi Intercéréales.
Des mesures qui vont dans le bon sens…
Le constat est le même du côté des OPA agricoles, qui se sont exprimées de manière commune. La FNSEA, Jeunes agricultures, La coopération agricole, Chambres d’agriculture de France et Irrigants de France saluent ainsi, dans un communiqué, « [la protection de] la capacité de production de la Ferme France face au changement climatique ». Selon leur communiqué, plusieurs mesures vont dans le bon sens : remobilisation et modernisation des ouvrages existants, développement de nouveaux projets de stockage, valorisation des eaux non conventionnelles en agriculture et dans l’industrie agroalimentaire, intégration d’un diagnostic de l’exploitation en lien avec l’eau, le sol et l’adaptation, dès l’installation des agriculteurs, la création d’un fonds d’investissement hydraulique agricole, la suppression du plafond des dépenses des agences de l’eau, etc.
…mais un « mur administratif » qui inquiète
L’appréciation positive de ces annonces n’est cependant pas générale. S’inquiétant d’un « mur administratif », les cinq organisations dénoncent « la volonté de réduire unilatéralement, à brève échéance, les autorisations de prélèvement dans les secteurs en tension, quand les retards pour retrouver les équilibres ne sont en rien, imputables aux agriculteurs ». Intervenant en ouverture d’un événement centré sur la thématique de l’eau et organisé par La coopération agricole, le 4 avril, Dominique Chargé, le président de LCA, a ainsi parlé de mesures allant « dans le bon sens », mais « qui méritent des explications sur les finalités et les moyens ».
Des évolutions des modèles agricoles attendues chez les ONG
En ce qui concerne France nature environnement, le constat est plus mesuré. L’ONG salue, elle aussi, par voie de communiqué, la tonalité des annonces : « le chef de l’État a (enfin) parlé de sobriété ». Elle se félicite aussi « de la reconnaissance par le chef de l’État de la nécessité de « réinventer les modèles agricoles », et appelle le président à s’y engager dans la future loi d’avenir agricole. L’ONG s’étonne cependant de la revue à la baisse des objectifs des Assises de l’eau, à savoir le décalage de 2025 à 2030 des économies d’eau de l’ordre de 10 % à réaliser. « La France subit déjà à minima une baisse de 14 % de ses ressources en eau douce renouvelable depuis le début du siècle et presque rien n’a été fait pour s’y adapter, rappelle Arnaud Schwartz, président de France Nature Environnement. Reculer les échéances va inévitablement continuer à peser sur les écosystèmes. »
Le discours est beaucoup plus direct du côté de la Confédération paysanne, qui regrette pour sa part un plan « à contre-courant des urgences ». Selon le syndicat, « derrière des termes et des éléments de langage sur la »sobriété« , les propositions de ce plan ne changeront pas grand-chose face aux grands enjeux de la protection de la ressource en eau ». Il demande ainsi l’arrêt des projets de méga bassines.