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Pour l’Iddri, la HVE ne devrait pas bénéficier des éco-régimes

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Dans un « Policy brief » diffusé le 16 mars, l’Iddri remet en cause l’intégration de la HVE dans les dispositifs pouvant bénéficier des écorégimes de la prochaine Pac. Soulignant le manque d’ambition de la certification, l’organisme appelle à une révision de son cahier des charges, pour ne pas affaiblir le dispositif global des éco-régimes, et éviter d’ouvrir « une brèche dans les exigences environnementales pour accéder aux aides publiques ».

Pour l’Iddri, la HVE ne devrait pas bénéficier des éco-régimes
Pour l’Iddri, la HVE ne devrait pas bénéficier des éco-régimes

Nouveauté de la Pac post-2023, les éco-régimes pourraient mobiliser entre 20 et 30 % des fonds du premier pilier. Si une première liste de pratiques potentiellement éligibles a été diffusée par la Commission européenne, chaque pays pourra choisir celles qu’ils souhaitent voir être subventionnées dans son plan stratégique national. En France, la HVE pourrait être l’une d’entre elles. Mais, si certaines parties prenantes considèrent la HVE comme le moyen d’accompagner un maximum d’agriculteurs dans une démarche de progrès, d’autres insistent sur son manque d’ambition. Dans une étude diffusée le 16 mars, intitulée « La certification Haute valeur environnementale (HVE) dans la Pac : transition agroécologie ou greenwashing ? », l’Iddri fait le point sur cet enjeu.

Supprimer la voie B de la certification

Le think-tank ne mâche pas ses mots :« L’analyse approfondie des critères de la certification HVE fait apparaître qu’en l’état actuel de son cahier des charges, cette certification ne peut prétendre accompagner une réelle démarche de transition agroécologique ». Ses auteurs se prononcent pour une évolution de son cahier des charges. Première recommandation : supprimer totalement la « voie B », c’est à dire celle permettant à une exploitation d’être certifiée si la part d’intrants est inférieur à 30 % de son chiffre d’affaires, et si les infrastructures agroécologiques représentent plus de 10 % de la SAU (ou plus de 50 % pour les prairies permanentes). Des objectifs identiques pour l’ensemble des filières qui ne permettent pas de garantir un niveau d’exigence identique, selon l’étude : « les exploitations des filières à forte valeur ajoutée (viticulture) ou à fort coût de main d’œuvre (maraîchage) peuvent obtenir la certification sans aucune amélioration de leur performance environnementale ». Au contraire, elle défavoriserait l’élevage herbager extensif du fait de son faible produit brut hors primes. Dans le cas des infrastructures agroécologiques, pour la viticulture et le maraichage, les équivalences surfaciques permettent de comptabiliser un mètre linéaire de haie comme équivalent à 100 m² de surface équivalente topographique, contre 10 m² pour la Pac. Résultat : « une exploitation avec dix mètres linéaires de haie sur un hectare atteint le seuil de 10 % de SAU en infrastructure agroécologique selon le mode de calcul HVE, alors qu’elle n’est qu’à 1 % avec les règles de calcul de la Pac ».

Réviser profondément les critères des quatre piliers

En ce qui concerne la « voie A », reposant sur les quatre piliers (biodiversité, phytosanitaire, fertilisation, irrigation), l’Iddri se prononce, comme le CGAAER avant lui, pour une révision du cahier des charges. Selon l’organisme, le critères en place seraient trop peu exigeants. « L’analyse des indicateurs et critères utilisés fait apparaître des niveaux d’exigence très variables entre les indicateurs, et bien que la plupart des items soient intrinsèquement intéressants, les multiples possibilités d’obtenir des points et les systèmes d’équivalence retenus, en particulier pour la comptabilisation des haies, aboutissent à un niveau d’exigence environnementale au final très faible et de fait très peu à même de transformer les systèmes agricoles vers une plus grande durabilité. » Dans le cadre de cette révision, l’Iddri souhaiterait que soit ajouté des indicateurs pour prendre en compte la gestion des sols et du carbone, la contribution des exploitations agricoles à l’atténuation du changement climatique et leur efficacité énergétique.

Ne pas avancer seule sur le sujet

Pour l’Iddri, sans la mise en œuvre de ces évolutions, la HVE ne devrait pas être valorisée dans le cadre des écorégimes, car cela risquerait d’affaiblir le dispositif global, «  en ouvrant une brèche dans les exigences environnementales pour accéder aux aides publiques ». Au contraire, l’organisme plaide pour un soutien accru des certifications ayant « une réelle valeur ajoutée environnementale démontrée », comme le bio ou l’élevage extensif, notamment à travers la Haute valeur naturelle (HVN). De manière plus large, l’Iddri remet également en cause l’accès privilégie de la HVE à la restauration collective ou au crédit d’impôt dédié. Pour permettre à la France d’avancer sur ce sujet, l’Iddri insiste néanmoins sur l’adoption d’un « cadre ambitieux » au niveau européen, pour éviter toute distorsion de concurrence avec les autres pays de l’UE.