S-métolachlore, la profession agricole mobilisée sur les alternatives dans les zones de captage
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Herbicide très utilisé sur maïs, sorgho, tournesol et soja, le S-métolachlore fait l’objet d’une surveillance particulière, en raison de la présence de l’un de ses métabolites dans les zones de captage d’eau. Dans l’Ain, la Chambre d’agriculture s’est emparée du dossier et souhaite mobiliser les distributeurs autour de cet enjeu.
Dans l’Ain, l’ESA-métolachlore a été détectée au-delà de la limite de 0,1 µg/l sur plusieurs captages de l’ouest du département. Les collectivités y sont désormais contraintes de se pencher sur le cas de la molécule S-métolachlore, dont elle est l’un des métabolites. Cet herbicide est utilisé notamment sur maïs, sorgho, soja ou tournesol. Les responsables locaux sont tenus de prendre des mesures à la fois curatives et préventives.
Action auprès de la distribution agricole
La prévention ? C’est ici qu’intervient la Chambre d’agriculture. Laurence Garnier, chargée de mission agronomie-environnement, explique avoir pris contact avec l’ensemble des distributeurs départementaux (1) pour les informer de cette problématique et des conséquences pour les gestionnaires des captages d’eau potable. Elle se fait également le relais des élus de la Chambre d’agriculture qui se sont engagés à accompagner les collectivités dans la reconquête d’une eau conforme à la réglementation. L’objectif est d’inviter les distributeurs à ne plus proposer cette matière active dans les zones à enjeux eau, et ainsi répondre collectivement à la préservation de la qualité de l’eau. « Les échanges sont plus avancés avec certains d’entre eux, mais nous réfléchissons aux moyens d’aller plus loin avec l’ensemble des distributeurs », détaille Laurence Garnier. Pas question, toutefois, de stigmatiser les agriculteurs, ni de les laisser sans solution.
Tester les alternatives au S-métolachlore
Sur une plateforme située à Saint-André-de-Corcy, différents essais ont été menés sur 2021, panachant les solutions mécaniques et chimiques, hors S-métolachlore (nicosulfuron et mézotrione notamment). « Selon les modalités, on arrive à des rendements tout à fait honorables, commente Yann Faynel, technicien agronome chez Oxyane, qui a visité la plateforme. Même le binage, peu favorisé par les conditions météo de 2021, a tiré son épingle du jeu. » Une modalité « tout mécanique » a même été mise en place : « Pour celle-ci, le rendement décroche, admet Laurence Garnier. Mais c’est le reflet d’une année et d’un contexte précis, cela demande confirmation. » Autre point de vigilance : les alternatives au S-métolachlore testées présentent des charges parfois plus élevées en raison du nombre de passages, et le temps passé sur le tracteur est plus important pour les chantiers mécaniques.
Anticiper sans déplacer le problème
Si la plateforme avait pour vocation d’aiguiller les agriculteurs dans l’évolution de leurs pratiques, elle avait aussi pour but de sensibiliser… les responsables des collectivités. « Plusieurs d’entre eux sont passés, et ils ont été très à l’écoute, témoigne Laurence Garnier. Ils comprennent la complexité du changement et se veulent porteur d’une collaboration avec le secteur. »
Et du côté des distributeurs ? « Depuis deux ans, nous respectons les préconisations de Syngenta, qui commercialise le produit : pas de S-métolachlore sur les aires de captage, et dosage inférieur à la dose homologuée sur les autres parcelles », glisse Yann Faynel. En cela, la coopérative a devancé le changement d’AMM intervenu fin 2021, instaurant ces mesures comme obligatoires. Elle utilise aussi l’outil Quali’cible proposé par Syngenta, précisant la situation de chaque parcelle des exploitants vis-à-vis des situations d’usages du S-métolachlore. Mais l’expert agronome avertit : gare, en cas de suppression totale de la molécule, à ne pas déplacer le problème sur d’autres herbicides, qui seraient alors beaucoup plus utilisés, et à leur tour mis sur la sellette. « Être dans la proactivité et l’anticipation sur ce dossier, c’est justement l’objectif de la Chambre », conclut Laurence Garnier.
(1) Oxyane, Bernard, maison Cholat, Diffus’Agri, Capdis, Bresse Mâconnais.