Référence agro

Avec Leggo, le Grand Ouest œuvre pour la relocalisation des légumineuses

Le | Projets-territoriaux

Relocaliser le marché des protéines végétales à destination de l’alimentation humaine dans le Grand Ouest, c’est l’objectif du projet Leggo, porté par quatre chambres d’agriculture depuis 2020. Des travaux sont en cours pour mettre en œuvre des démonstrateurs territoriaux et mieux appréhender le surcoût, pour la distribution agricole, du stockage et du triage. Explications avec Thierry Bordin, chargé de mission eau et autonomie protéique à la Chambre du Centre-Val de Loire.

Avec Leggo, le Grand Ouest œuvre pour la relocalisation des légumineuses
Avec Leggo, le Grand Ouest œuvre pour la relocalisation des légumineuses

Créée en 2020 par les chambres d’agriculture de Bretagne, de Normandie, des Pays-de-la-Loire et du Centre-Val de Loire, l’association Leggo, pour Légumineuses à graines du Grand-Ouest, réunit une cinquantaine d’adhérents, répartis en cinq collèges (1). Celui des coopératives et négoces compte une petite quinzaine de membres. « Notre ambition est de nous organiser collectivement pour structurer un marché des protéines végétales à destination de l’alimentation humaine, explique Thierry Bordin, chargé de mission eau et autonomie protéique à la Chambre du Centre-Val de Loire. Nous voulons ainsi contribuer à l’atteinte des objectifs du plan protéines et de la mise en œuvre d’un repas végétarien hebdomadaire dans la restauration collective, inscrite dans la loi Égalim. »

Évaluer les surcoûts pour la distribution agricole

À l’approche des trois ans du lancement de l’association, un observatoire de l’offre et de la demande, ainsi qu’un centre de ressources, ont été mis sur pied. Plusieurs études viennent d’être lancées. L’une d’entre elles concerne le sujet du stockage et du triage. « L’objectif est de caractériser le coût économique et voir comment créer de la valeur pour les transformateurs et les acteurs de la distribution agricole », précise Thierry Bordin. 

Le recours à du triage optique, comme l’utilisation de cellules de stockage spécifiques et plus petites, augmentent en effet les coûts des opérateurs. « L’aval demande par exemple du sans traces de gluten, nous étudions l’impact de ce type d’exigence », glisse le chargé de mission. L’enjeu de la prise de risque, pour les agriculteurs, est aussi exploré. « Celle-ci doit être valorisée par une prime dédiée, pour attirer les producteurs qui continueront sinon à faire du blé ou du colza, poursuit Thierry Bordin. Cela demande encore à être chiffré. » Le premières réunions ont eu lieu pour discuter de ces enjeux. Des résultats pourraient être annoncés courant 2023.

L’export plus intéressant économiquement

Si la relocalisation de la production de légumineuses fait partie des missions essentielles de l’association, la mise en adéquation de l’offre et de la demande, au niveau français, n’est pas toujours évidente. « Nous avons du mal à satisfaire les demandes formulées par les opérateurs français, car les contrats sont plus rémunérateurs à l’export », concède Thierry Bordin. Cela s’explique par les plus petits volumes demandés au niveau national, qui ne sont pas forcément rentables compte tenu des coûts plus élevés de stockage, de triage et de logistique. L’association souhaite, dans ce sens, accélérer la dynamique dans la restauration collective. C’est d’ailleurs une de ses priorités. « Nous voulons davantage communiquer vers ce secteur sur la possibilité d’avoir recours à un approvisionnement local, notamment en RHD », précise le chargé de mission.

Des démonstrateurs de filière

L’association souhaite inscrire son action dans la durée. Elle est néanmoins dépendante de ses financements. Leggo bénéficie du soutien du plan de relance, jusqu’à la fin de l’année prochaine. « Nous sommes encore en phase d’émergence, explique Thierry Bordin. Nous sommes intervenus dans d’autres régions, car la vocation de notre démarche est d’être répliquée ailleurs. » De nombreux territoires se sont d’ailleurs d’ores et déjà lancés dans une démarche multi-partenaire, comme Fileg en Occitanie

Pour Leggo, le dernier projet en date concerne la mise en œuvre de démonstrateurs territoriaux, autrement dit des plateformes d’essais pour déceler les freins à la production. « Un premier site a été testé en Bretagne cette année, rappelle Thierry Bordin. Cela nous a permis notamment de voir que certaines variétés n’étaient pas adaptées au marché, car leur transformation était trop difficile. » L’installation d’une deuxième plateforme d’essais est prévue en Normandie, pour 2023. 


(1) Amont et production, négoces et coopératives, transformation, distribution, restauration collective

Favoriser les synergies entres les territoires

Installée sur quatre territoires, l’association Leggo mise sur leur synergie. Si le Centre produit beaucoup mais transforme peu, la Bretagne affiche un profil totalement inverse. « L’objectif des chambres est de mettre en relation des acteurs pour concrétiser des projets et créer un courant d’affaires entre les différents maillons de la chaîne de valeur, pour relocaliser la production », explique Thierry Bordin. Une complémentarité d’autant plus nécessaire que les rendements ont baissé sur l’ensemble des quatre régions, en pois et féverole, du fait des aléas climatiques et des impasses techniques pour la gestion des bioagresseurs. Pour soutenir au mieux les producteurs, l’association a commandé une étude à Terres Inovia sur l’adéquation de la production de légumineuses avec les territoires couverts par Leggo. Des cartes de risques climatiques ont ainsi été réalisées. « Cela nous permet d’évaluer les possibilités d’implantation de légumineuses en fonction des territoires pédoclimatiques, mais aussi de dire aux acteurs de l’aval s’il est réaliste de pouvoir produire près de chez eux ou à l’échelle des quatre régions Grand Ouest », souligne Thierry Bordin.

Les légumineuses dans le Grand Ouest en chiffres : 

-31 % de la production nationale de graines protéagineuses

-40 % de la production de féverole

-29 % de la production de pois

-25 % de la production de lentilles