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Le label bas-carbone doit « profiter aux territoires », Sarah Colombie, Chambre d’agriculture des Pays de la Loire

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« C’est un bon début. La démarche est originale et différente des financements publics éprouvés jusqu’alors. Ce label va permettre de valoriser les actions au sein des territoires », se réjouit Sarah Colombie, chargée de mission Innovation, climat, air, environnement, à la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire. Jointe par Référence environnement, elle commente le lancement du label bas-carbone, par le gouvernement, le 23 avril. Il doit permettre à des entreprises, des collectivités ou même des particuliers de financer des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou de stockage du carbone, portés par les agriculteurs, dans une logique de compensation de leurs propres émissions. « Le fait qu’une telle démarche soit vue d’un bon œil au niveau national, et que le gouvernement propose un cadre pour faire reconnaître économiquement des pratiques agricoles vertueuses, ça change complètement la manière d’aborder ces démarches », complète-t-elle.

Valoriser sans augmenter le prix

Parmi les avantages de la démarche, la chargée de mission cite la possibilité de pouvoir valoriser les pratiques vertueuses tout en permettant aux exploitants de continuer à vendre leurs productions, s’ils le souhaitent, au prix du marché. « Dans le cas d’autres démarches qualité, comme la HVE, le seul moyen de valoriser économiquement ces actions est de vendre plus cher, ce qui est compliqué, à l’exception de quelques segments de marché restreints. »

Autre intérêt de taille : ce label pourrait être un outil de renforcement de la coopération entre des acteurs d’un même territoire. Comme par exemple les agriculteurs et les entreprises, des partenaires n’ayant traditionnellement pas l’habitude de travailler ensemble. « Des particuliers peuvent aussi contribuer. Ce label a du potentiel pour créer du lien sociétal », souligne la chargée de mission. Si, pour le moment, aucun contrat n’a encore été signé, l’intérêt des entreprises pour la démarche n’est plus à démontrer, affirme-t-elle.

 Structurer la filière bois-énergie dans la région

Les applications à l’échelle de la région ne manquent pas. En lien avec l’Ademe et l’interprofession laitière de l’Ouest (Cilouest), le Conseil régional a lancé un grand plan pour réaliser le diagnostic de 500 exploitations par an et construire des actions vertueuses. « Ce serait une opportunité que celles-ci soient soutenues par le label », indique Sarah Colombie. Autre secteur suscitant l’espoir de cette dernière : celui des haies, pour lequel le label serait « un véritable coup de pouce ». En plus d’avoir un fort potentiel de stockage du carbone, quand elles sont bien entretenues, celles-ci pourraient aussi servir à structurer la filière bois-énergie. « Le bois issus des haies est plus cher à exploiter, car diffus et difficile d’accès. Il n’est pas non plus valorisé pour le bois d’œuvre. Le label permettrait de structurer cette filière et de proposer du bois déchiqueté, à substituer aux énergies fossiles dans les collectivités et entreprises. Et ce, à un prix raisonnable, qui assurerait également la gestion durable des haies et la valorisation de nos territoires », explique Sarah Colombie.

Le prix du carbone, un enjeu de taille

Pour pouvoir prétendre au label, des méthodes d’évaluation doivent être déposées et approuvées. Celle de la filière élevage, élaborée dans le cadre du programme CarbonDairy et BeefCarbon, devrait être validée en mai. La méthode concernant la gestion durable des haies, liée au programme Carbocage, est encore en cours de construction. Des méthodes qui doivent être assez fluides « pour créer du lien entre les acteurs » et dépasser la complexité administrative en se concentrant sur les projets. Celles-ci doivent notamment démontrer « l’additionnalité » des actions envisagées, c’est-à-dire le caractère essentiel du label dans leur réalisation.

« Ce label est un bon point de départ », résume Sarah Colombie. Dernier enjeu à relever, celui du prix du carbone. « Il n’y aura pas un seul prix. Mais cela devra être assez attractif pour que les agriculteurs s’engagent avec un prix minimum. On pourrait également envisager des prix un peu plus élevés pour des projets aux forts co-bénéfices », souligne-t-elle enfin.