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Projet de loi d’avenir agricole : tout ce que le Sénat a modifié

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Dans la nuit du 15 au 16 avril, les sénateurs ont adopté le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt par 175 voix pour et 135 contre. Alors que le calendrier prévoyait une fin des discussions au 12 avril, les débats ont du reprendre le 14 avril. Ils ont notamment introduit plusieurs amendements sur les pesticides et les médicaments vétérinaires. Le texte doit encore passer à l’Assemblée nationale en deuxième lecture.

  • Encadrement de l’utilisation des antibiotiques vétérinaires (articles 20 et 20 bis)
Les sénateurs ont décidé d’interdire la pratique des tarifs différenciés selon la catégorie des clients auxquels seront vendus les antibiotiques et ont supprimé le plafonnement à un maximum de 15 % de la marge avant sur la vente de certains antibiotiques. L’article 20 bis comprend un objectif de réduction des antibiotiques critiques pour éviter le développement de bactéries multi-résistantes. Les amendements UMP visant à laisser des marges de manœuvre aux groupements de producteurs ont été écartés.
  • Les pesticides (articles 21 à 23)
Dans le cadre de l’encadrement de la publicité sur les produits phytopharmaceutiques, les sénateurs ont permis la publicité professionnelle dans les publications qui leur sont destinées, et non plus uniquement dans la presse professionnelle agricole. Ce qui pourrait permettre une communication sur les sites internet des entreprises par exemple. Ils ont intégré l’abeille domestique en qualité de bio-indicateur particulièrement performant dans le compartiment biodiversité de surveillance des produits phytopharmaceutiques. Le transfert de la DGAL à l’Anses de la compétence de délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires et des matières fertilisantes, malgré les réticences d’un bon nombre de professionnels, a été acté. Par ailleurs, la désignation du comité de suivi autour de l’Anses ne se fera pas par cette loi, mais probablement par décret. La consultation du comité sera optionnelle afin de ne pas allonger les délais. Le ministre de l’Agriculture pourra refuser une AMM de l’Anses uniquement dans un objectif de supplément de précaution. Enfin L’Anses devra présenter un rapport annuel au Parlement sur les AMM et le suivi des effets des pesticides sur la santé. Certains décrets en Conseil d’Etat, relatifs notamment à la protection des aires d’alimentation des captages d’eau potable, peuvent « prévoir l’interdiction de l’usage de substances dangereuses pour la santé ou l’environnement sur ces zones », selon les sénateurs. Ils ont prévu des sanctions en cas de trafic et l’introduction de distances de sécurité entre habitations et zones d’utilisation. L’obligation d’information et de conseil des utilisateurs professionnels et non professionnels a été assouplie : pour les achats récurrents du même produit, il suffira d’un conseil individuel à l’agriculteur « une fois par an » au lieu de « à chaque achat ». Les sénateurs ont aussi légèrement assoupli le certiphyto : il est proposé d’instituer une dérogation à l’obligation de certification d’entreprise lorsque la prestation est réalisée à titre accessoire par un exploitant titulaire du Certiphyto-décideur en-deçà d’un seuil fixé par décret, seuil qui pourrait être exprimés, soit en surface, soit en chiffre d’affaires.
  • Sécurité sanitaire (articles 18 à 19)
Les sénateurs ont adopté les mesures concernant la police sanitaire des animaux de la faune sauvage (article 18), les contrôles sanitaires des aliments plus efficaces et plus approfondis (article 19) et l’article 19 bis qui reconnaît la participation des laboratoires départementaux d’analyses des conseils généraux dans la politique publique de sécurité sanitaire de la France.
  • Semences (article 25)
L’article 25 bis vise notamment à exclure du champ de l’application du mécanisme de protection des brevets le cas d’une présence fortuite d’une information génétique dans des semences. L’amendement adopté permet de fixer, par décret simple, et non plus par décret en Conseil d’Etat, la liste des espèces végétales pour lesquelles les agriculteurs ont le droit d’utiliser sur leur propre exploitation, sans l’autorisation de l’obtenteur, à des fins de reproduction ou de multiplication, le produit de la récolte obtenu par la mise en culture d’une variété protégée.
  • Enseignement
Les sénateurs socialistes ont adjoint un conseil d’orientation stratégique et un conseil des membres dans l’Institut Agronomique, Vétérinaire et Forestier de France (IAV2F), inscrit dans le projet de loi. L’objectif est d’assurer la représentativité du monde agricole national et international.
  • Parmi les autres articles et amendements adoptés la semaine dernière :
- La création des groupements d’intérêt écologique (article 3), qui pourront donc être soutenus par des aides publiques. Ils doivent permettre d’encourager des collectifs d’agriculteurs à s’engager dans l’agro-écologie et viser la double performance économique et environnementale. Les sénateurs ont supprimé la possibilité d’échanges de semences dans le cadre de l’entraide entre agriculteurs. - L’élargissement du droit de préemption des Safer (article 13), les sociétés d’aménagement et de foncier agricoles, dans le respect de la politique d’aménagement rural. Cet amendement a été particulièrement discuté : la Cour des Comptes a épinglé récemment les Safer pour les conflits d’intérêts qu’elles pouvaient générer parce qu’elles sont composées des représentants des Chambres d’agriculture et du Crédit agricole. Désormais, un représentant des associations de la nature et de l’environnement et un représentant des fédérations des chasseurs devront faire partie de la gouvernance des Safer. - Le principe de compensation en nature des terres agricoles (article 12 ter) perdues dans le cadre de la politique d’aménagement rural, à l’instar de la compensation écologique. Objectif : maintenir le potentiel de production agricole. Il s’agira de prévoir des modalités de chantiers moins nuisibles pour la production agricole et d’artificialiser en priorité les friches. Les effets qui n’auront pu être évités seront compensés en nature dans le cadre d’une participation à la réalisation de travaux d’investissements collectifs agricoles pour réhabiliter des friches, développer de la valeur ajoutée en créant des outils collectifs de transformation, de ventes de produits agricoles, ou de valorisation de la biomasse. - L’article 8 bis imposant aux télévisions et radios publiques de prévoir des espaces d’informations sur les produits frais agricoles. - L’article 10 bis qui crée pour les appellations d’origine protégées (AOP) et indications géographiques protégées (IGP), un droit d’opposition au dépôt de marque. Lequel pourra s’étendre au-delà des produits similaires