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Rémunération du carbone, un système démarre pour les grandes cultures

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Vingt agriculteurs belges et français sont déjà engagés dans la démarche de rémunération du carbone mis en place par Soil Capital. Se différenciant du label bas-carbone, elle se fonde sur un outil de quantification international et garantit un prix minimum de 27,5 euros la tonne de carbone. Explications avec les dirigeants de la société.

Semis de maïs dans un couvert végétal en agriculture de conservation des sols, semis direct sous cou - © D.R.
Semis de maïs dans un couvert végétal en agriculture de conservation des sols, semis direct sous cou - © D.R.

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Rémunération du carbone, un système démarre pour les grandes cultures - © D.R.
Rémunération du carbone, un système démarre pour les grandes cultures - © D.R.

Chuck de Liedekerke et Nicolas Verschuere, dirigeants de Soil Capital.[/caption]

La société de conseil agronomique Soil Capital a annoncé le 23 septembre le lancement du premier programme de rémunération du carbone européen pour les agriculteurs. En réflexion depuis un an, il se fonde sur le développement de l’agriculture de conservation des sols, que les dirigeants de la structure belge préfèrent nommer « agriculture régénérative ».

« Solide, crédible et pratique »

Pour la société, ce projet va permettre de développer ces pratiques vertueuses. Elle a réalisé un sondage en 2019 qui montre que les freins à leur adoption sont essentiellement de trois ordres : un manque de confiance face à ces changements (28 %), la crainte de subir une perte financière (25 %), et le faible intérêt du marché (23 %). « Il faut donc accompagner la prise de risque. C’est pourquoi, nous avons voulu rémunérer les pratiques qui vont dans le sens de la séquestration du carbone mais également celles qui limitent les émissions, insiste Nicolas Verschuere, co-fondateur de Soil Capital. Notre ambition est de créer un marché du carbone européen solide, crédible et pratique pour les agriculteurs. » Le dispositif s’adresse aux producteurs de grandes cultures. « L’élevage pourrait être concerné en 2021 », poursuit-il.

Quelle est la démarche ? Les agronomes de Soil Capital réalisent avec l’agriculteur un bilan de son exploitation, pour prioriser les actions qui amélioreront à la fois sa rentabilité et son impact en matière de gaz à effet de serre, GES. « C’est un protocole relativement classique de prise de données des pratiques, précise Nicolas Verschuere. Il faut environ trois heures pour le mener à bien. » Les bilans reposent sur le Cool farm tool, un outil de quantification de l’empreinte GES développé par des universités européennes. Le protocole est vérifié selon les critères de la norme de qualité des gaz à effet de serre ISO 14064-2.

5500 euros par an

L’agriculteur s’engage dans le programme pour cinq ans et reçoit des certificats carbone correspondants aux résultats obtenus par ses pratiques. 80 % du montant est perçu au bout des cinq ans et les 20 % restant sont reçus entre l’année 11 et 15 afin de s’assurer que l’exploitant ne modifie pas ses pratiques. Selon Soil Capital, la séquestration peut atteindre deux tonnes équivalent CO2/ha/an. Avec un prix d’achat de la tonne de carbone à 27,5 euros minimum, l’agriculteur peut donc recevoir 5500 euros par an, pour des frais de diagnostic et d’audit s’élevant à 980 euros par an. « C’est un prix qui nous semblait un minimum pour être intéressant pour les exploitants, explique Chuck de Liedekerke, CEO et cofondateur de la société. Mais, avec la demande croissante, le prix de la tonne de carbone devrait augmenter. »

Des passerelles possibles avec le label bas-carbone

Ces certificats sont commercialisés par South Pole, un expert mondial de fournisseur de solutions climatiques reconnu, notamment auprès d’entreprises qui souhaitent encourager la neutralité carbone des matières premières qu’elles commercialisent. « Il ne s’agit en aucun cas d’un droit à polluer, mais bien d’inciter les parties prenantes à agir concrètement dans leur propres filières et territoires. » précise Chuck de Liedekerke.

Quid du lien avec le label bas-carbone français, déjà opérationnel en élevage mais que les filières des grandes cultures tentent de mettre en place ? « C’est une excellente nouvelle que ce label arrive sur le marché français, indiquent les dirigeants de Soil Capital. Lorsqu’il sera prêt, nous nous alignerons dessus. »

Vingt agriculteurs ont déjà rejoint le programme en France et en Belgique.  L’ambition est de mobiliser 150 exploitants d’ici à la fin de l’année et 10 000 en 2025 dans les deux pays.

Côté acheteurs, Cargill, acteur mondial de l’industrie agroalimentaire, et la société belge IBA, se sont engagés dans la démarche avec l’achat de certificats.

Les inscriptions au programme Soil Capital Carbon sont ouvertes aux agriculteurs jusqu’au 31 décembre 2020 sur le site www.soilcapital.com/fr