Selon le CGAAER, « les pratiques vertueuses peinent à être valorisées à leur juste valeur »
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La valorisation économique des démarches de qualité reste compliquée pour les agriculteurs. Selon un rapport du CGAAER publié le 28 octobre, le prix demeure le frein principal à la généralisation d’une alimentation durable. L’instance appelle à un « changement de paradigme » pour réellement rémunérer les pratiques agroécologiques.
Si les labels et initiatives se portant garants de pratiques agricoles vertueuses foisonnent, la valorisation de la production reste encore difficile pour les exploitants. C’est le constat tiré par le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, CGAAER, dans un rapport diffusé le 28 octobre, portant sur la politique RSE des entreprises et la transition agroécologique. Si des bonnes pratiques sont à noter, comme la contractualisation ou le référentiel HVE, cités par les auteurs, ces derniers insistent sur le fait que « le prix reste à la fois un argument de compétitivité des distributeurs et le principal frein invoqué pour basculer vers une alimentation plus durable ». Le document souligne ainsi que « les pratiques vertueuses peinent à être rémunérées à leur juste valeur ». Ces conclusions s’inscrivent dans la lignée d’un précédent rapport du CGAAER, publié en octobre 2020, qui avançaient que « les pratiques agroécologiques sont souvent mises en œuvre de manière silencieuse et donc peu visibles ».
Les GMS peu disposées à payer plus
Le changement de pratiques implique pourtant une hausse des coûts pour l’agriculteur. Selon le CGAAER, le label bio est, à ce jour, le seul dispositif permettant de valoriser les pratiques agricoles vertueuses. « Mais pour combien de temps encore, alors que la grande distribution tend à faire du « bio » un produit d’appel dans une logique de massification ? », interroge le rapport. Selon lui, les grandes et moyennes surfaces, GMS, considéreraient ainsi, en ce qui concerne la gestion des intrants, les pratiques agroécologiques et l’approvisionnement local, « que ces pratiques se banalisent, deviennent un passage obligé voire un socle standard, qui ne justifie pas de rémunération en sus ».
Tout ne doit pas reposer sur le consommateur
Pour inverser la donne, les auteurs appellent donc à un changement de paradigme pour rémunérer l’acte de production agroécologique à sa juste valeur. Pour assurer l’accès de tous à cette alimentation durable et revalorisée, le rapport plaide pour la mise en place d’un « soutien aux plus démunis », qui pourrait prendre la forme d’un « bon alimentaire », tel que mis en œuvre depuis plusieurs années aux Etats-Unis. Néanmoins, si « le consommateur est clé pour le développement de pratiques vertueuses », ce dernier « ne doit pas être le seul à financer les externalités de l’agriculture, insiste le CGAAER. Le développement de l’obésité, les pollutions croissantes de l’air et de l’eau, l’usage des pesticides et l’impact carbone associés au modèle agroalimentaire actuel, entraînent des coûts croissants pour la société qui n’apparaissent pas dans les prix des produits agricoles. Tant que ces coûts ne seront pas traduits en valeurs monétaires réelles dans les transactions commerciales, les systèmes moins-disants sur le plan social ou environnemental continueront à bénéficier d’une forme de concurrence déloyale. La comptabilité environnementale peut contribuer à rétablir la vérité des coûts. »
Dans ce cadre, le rapport appelle le ministère de l’Agriculture à « initier et soutenir des études permettant d’objectiver les coûts de transition et de production en modes alternatifs, et de rééquilibrer les chaînes de valeur en faveur du producteur. »