Biocontrôle, l’Inrae lance une thèse pour mettre au point des OAD
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L’utilisation des solutions de biocontrôle est plus complexe que celle des produits phytosanitaires classiques. Pour les déployer sur le terrain et accroître leur efficacité, les outils d’aide à la décision doivent se développer pour toutes les cultures. C’est l’objectif de la thèse de Thomas Pressecq, portée par l’Inrae. Il explique à Référence-agro les étapes et l’originalité de son travail.
Optimiser l’usage du biocontrôle par le développement d’outils d’aide à la décision, OAD. Telle est l’ambition de la thèse de Thomas Pressecq lancée en novembre 2019 par l’unité de pathologie végétale de l’Institut national de recherche en agriculture, en alimentation et en environnement (Inrae) d’Avignon. Elle est codirigée par l’Aprel, l’Association provençale de recherche et d’expérimentation légumière qui travaille avec les conseillers des Ceta maraîchers et de la Chambre d’agriculture de Provence-Alpes-Côte-d’Azur.
Atteindre des efficacités régulières et durable
« Du fait des caractéristiques particulières des agents de biocontrôle à base de micro-organismes, leur déploiement est plus complexe que l’application de molécules chimiques, explique-t-il. Actuellement leur usage manque souvent d’efficacité et de constance. En effet, certaines solutions vont diminuer la contamination de seulement 30 % par rapport à un non-traitement ce qui n’est pas acceptable pour les agriculteurs. D’autres vont pouvoir atteindre des réductions de sévérité de 60 % voire plus, ce qui commence à être très intéressant. Pour atteindre ces efficacités de manière plus régulière et durable, il est nécessaire de développer des OAD intégrant les propriétés biologiques des agents de biocontrôle microbiens, celles des agents pathogènes et les caractéristiques des systèmes de culture. »
La thèse, axée sur les agents de biocontrôle microbiens (ABM), se déroulera en plusieurs étapes. Le travail s’attachera à hiérarchiser les facteurs régissant l’efficacité des ABM, identifier ceux qui pourraient faire l’objet de règles de décision dans les itinéraires techniques, et enfin à développer un prototype générique d’OAD, de le paramétrer et de l’évaluer pour un exemple spécifique, encore à définir. Les travaux impliqueront la réalisation d’enquêtes auprès de professionnels et d’une méta-analyse de la littérature scientifique et technique complétée par des expérimentations biologiques. « Je suis à la recherche de témoignages d’acteurs du terrain, à l’avant-garde des pratiques agricoles, précise Thomas Pressecq. Les professionnels concernés peuvent remplir le questionnaire, en moins de cinq minutes, en ligne via ce lien : https://forms.gle/o98fTMvR3g1svsyB8 . »
« L’avis des sociétés privées est primordial »
Pour l’heure, les sociétés privées ne sont pas directement impliquées. « Mais elles sont interrogées grâce au questionnaire, leur avis est primordial, poursuit-il. Il n’est également pas exclu que nous ayons des contacts plus serrés avec le secteur privé lors de la mise au point de l’OAD. »
S’il existe déjà des OAD sur le biocontrôle, la thèse entend prendre le sujet par un autre bout. « Les outils actuels sont fondés sur les conditions météorologiques et la progression du ravageur, à l’instar de ceux sur les pesticides classiques, explique Thomas Pressecq. Ici, nous voulons mettre le comportement de l’agent de biocontrôle au cœur de la règle de décision, et donc réfléchir à l’efficacité de la protection de manière plus globale. »
Un travail pour toutes les cultures
Le travail entend poser les bases pour une utilisation plus large, même sur les grandes cultures. « Je suis fils d’agriculteur céréalier et oléoprotéagineux, où l’usage du biocontrôle est moins important et moins performant que dans d’autres secteurs, reconnaît-il. Toutes les filières ne sont pas logées à la même enseigne et ne peuvent pas mettre le même prix à l’hectare dans la protection phytosanitaire biologique. Pour les grandes cultures, je pense que l’avenir est de coupler le biocontrôle avec des variétés résistantes et des pratiques agronomiques plus adaptées aux enjeux du moment. »
La thèse est suivie par trois encadrants Inrae, Marc Bardin, Philippe Nicot et Marc Tchamitchian, ainsi que d’une encadrante de l’Aprel, Aurélie Rousselin.