Débats et réflexions autour de l’étude prospective d’Inrae sur l’avenir de l’agriculture en 2050
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Quel serait l’impact de l’évolution de la demande et des régimes alimentaires sur l’évolution des agricultures européennes et mondiales, en 2050, dans un contexte de changement climatique ? C’est sur cette vaste question que s’est penchée une équipe de chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique et de l’environnement (Inrae), dont les résultats ont été présentés le 14 février. Un temps d’échange était prévu, le jour-même, entre plusieurs acteurs du système agro-alimentaire, d’ONG ou de la Commission européenne, sur leur perception de ces enjeux, et la manière dont chacun, à son niveau, pouvait se saisir des résultats avancés.
Entre prospectives et scénarios de rupture
L’étude présentée par l’Inrae proposait deux scénarios : un tendanciel, c’est-à-dire dans la continuité des pratiques actuelles, un second qui étudiait les conséquences de l’adoption de régimes sains selon les recommandations de l’OMS. « Les hypothèses présentées ne sont pas des scénarios de rupture, alors il y en aura. On le voit aujourd’hui avec le cas du coronavirus, et on peut envisager que l’évolution des normes sur le développement durable auront des impacts conséquents », prévient Patrick Caron, président du Comité directeur du Groupe d’experts de haut niveau. Un point de vue partagé par Arnaud Gauffier, de WWF France, qui regrette le manque d’inclusion de critères environnementaux à l’étude.
« L’idée était de voir les conséquences d’un scénario précis, d’une tendance ‘laisser-faire' », expliquent en réponse les auteurs. Des analyses qui sont néanmoins loin d’être dénuées d’intérêt. « Ces travaux prospectifs sont importants pour donner une voie à suivre aux politiques, notamment compte-tenu de l’incertitude ambiante sur ces enjeux », estime Florence Buchholzer de la DG Agri à la Commission européenne. Selon elle, l’instance a remis en avant le sujet de la prospective dans les zones rurales, dans le cadre notamment de ses projets phares tels que le Green Deal et la stratégie Farm to fork qui ont aussi pour échéance 2050.
Donner les moyens d’innover
Concernés au premier titre par ces enjeux, les agriculteurs étaient représentés par le président de la coopérative Axéréal, Jean-François Loiseau. Pour ce dernier, la décarbonation de l’agriculture ne pourra se faire sans un soutien fort à l’innovation. Mais il prévient : « On a l’impression que tout pourra se faire sans intrants, mais ce sont la nourriture du sol, nous en aurons toujours besoin ! » Ce dernier se félicite cependant de la possibilité évoquée par l’étude, de relocaliser en Europe une filière soja, suite à un potentiel surplus de terres cultivables dans les décennies à venir. Tout en insistant : « Pour relocaliser, il faudra investir, pour que ce ne soit pas toujours le même maillon de la chaîne qui paye. Le consommateur doit accepter de payer pour ce qu’il demande. »