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Glyphosate en arboriculture, difficile de s’en passer à court terme selon le CTIFL

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Durant l’automne 2019, le CTIFL a interrogé 959 exploitations en arboriculture pour dresser un état des lieux des pratiques de désherbage mais surtout, évaluer l’impact et les enjeux relatifs à la sortie du glyphosate prévue pour la fin d’année. Si des alternatives existent, elles s’avèrent souvent plus coûteuses et pas généralisables en raison de la diversité des systèmes et des productions de l’arboriculture française.

Glyphosate en arboriculture, difficile de s’en passer à court terme selon le CTIFL
Glyphosate en arboriculture, difficile de s’en passer à court terme selon le CTIFL

Malgré une sortie prévue par le Gouvernement pour la fin de l’année, le glyphosate reste un produit assez central dans les stratégies de désherbage de l’agriculture française. Face au manque de données publiques et d’études solides sur les pratiques de désherbage en arboriculture fruitière, le CTIFL a mené sa propre enquête, et rendu ses résultats le 26 mai. Cet état des lieux se penche sur techniques utilisées, les alternatives possibles et les impacts technico-économiques du retrait du glyphosate.

La méthodologie de l’enquête

À l’automne 2019, le CTIFL a interrogé 959 exploitations. Elles représentent 12,1 % de la surface des vergers français et couvrent 27 des principales espèces cultivées en France métropolitaine. L’échantillon comprend 65 % de vergers en production fruitière intégrée (PFI), 25 % en bio ou en conversion et 10 % mixte (PFI et bio).

Le glyphosate, central dans les stratégies herbicides

Chez les professionnels utilisant des produits phytosanitaires pour le désherbage, le glyphosate est très fréquemment utilisé (98 %), grâce à son efficacité et sa souplesse d’emploi. « Chez ce type d’utilisateur cette substance active reste au cœur des stratégies herbicides appliquées en production fruitière », explique le CTIFL. Toutefois, l’inter-rang est souvent enherbé. L’application d’herbicides s’effectue alors de manière ciblée sur le rang dans 25 à 50 % des cas. Les exploitations en production fruitière intégrée (PFI) ont quant à elles réduit leur utilisation d’herbicides : 18 % les ont totalement exclus et une sur cinq a recours aux méthodes alternatives.

Le désherbage mécanique moins rentable

Parmi les techniques alternatives citées comme facilement transférables, deux d’entre elles ressortent : la tonte des lignes de plantation et le travail mécanique du sol. Elles pénalisent toutefois la production. « L’impact sur les systèmes racinaires des arbres du désherbage par travail du sol se traduit, à minima, par une perte de rendements transitoire de 10 % sur les trois années suivant l’adoption de cette pratique », souligne le CTIFL. Il estime que pour une baisse de la production de 10 à 20 %, les pertes économiques sont de l’ordre de 1 840 à 3 680 €/ha en pomme, et de 1 600 et 3 200 €/ha en abricot. À cela, s’ajoutent des surcoûts de production : entre 62 €/ha/an et 206 €/ha/an de plus pour la méthode de tonte des rangs de plantation, et jusqu’à 470 €/ha/an pour le travail mécanique du sol. Même dans les systèmes où l’introduction de ces pratiques est techniquement et économiquement envisageable, le parc matériel existant ainsi que les ressources en main d’œuvre qualifiée constituent deux freins à la généralisation à court terme de ces méthodes.

Les alternatives difficilement applicables partout

De plus, les méthodes mécaniques ne semblent pas sans risque pour le développement des adventices et la prolifération de nuisibles. « Le travail du sol favorise la multiplication des adventices vivaces en venant morceler leurs organes de multiplication souterrains. La tonte des rangs de plantation, pratiquée avec les outils existants aujourd’hui, favorise les pullulations de campagnols, qui peuvent mettre en péril la viabilité des plantations », argumente l’institut. En matière d’alternative au désherbage chimique, « il semble impossible de mettre au point et valider des solutions pour toutes les productions fruitières dans un délai extrêmement court », conclut l’institut.

« Si des solutions techniques alternatives au désherbage chimique existent, elles ne sont pas encore adoptables par tous les arboriculteurs. Il est encore à ce jour impossible de prédire que l’adoption généralisée des méthodes alternatives ne soit pas sans risque agronomique et économique pour l’avenir des productions fruitières en France »

Glyphosate en arboriculture, difficile de s’en passer à court terme selon le CTIFL - © D.R.
Glyphosate en arboriculture, difficile de s’en passer à court terme selon le CTIFL - © D.R.

CTIFL

Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes