Les sociologues se penchent sur la diffusion des pratiques en agriculture biologique
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Quels sont les facteurs qui permettent le développement de l’agriculture biologique ? C’est la question sur laquelle se sont penchés des sociologues lors d’un colloque organisé par l’Institut national de la recherche agronomique, Inra, le 28 avril 2016, à Agrocampus Ouest à Rennes.
Le développement local est considéré comme un facteur clé. De nombreux projets territoriaux concernent la bio. Philippe Fleury, directeur du département agriculture, systèmes alimentaires et territoire de l’Isara-Lyon (Ecole d’ingénieurs en alimentation, agriculture, environnement et développement rural) cite plusieurs actions : la création d’une filière de plantes aromatiques et médicinales en Languedoc-Roussillon, Manger bio en Vendée pour la restauration collective, la création d’une zone maraichère près de Toulouse à Blagnac, ou encore le village bio Correns dans le Var. « Ces projets associent tous deux finalités : le développement local de l’agriculture biologique, et sa contribution au développement local », explique-t-il. Une réciprocité des retombées qui permet une expansion du bio.
Le sens du métier
Pour Annie Dufour, tout juste retraitée et ancienne sociologue à l’Isara-Lyon, la conversion vers l’agriculture biologique implique la redéfinition du sens du métier. Recherche d’autonomie, reconnaissance professionnelle et sociale ou encore recherche d’une éthique sont des composantes souvent mises en avant.
Ces critères ne sont pas spécifiques à l’AB. « On les retrouve aussi pour d’autres formes d’agriculture alternatives : agro-écologie, agriculture paysanne, citoyenne… », explique-t-elle. L’enjeu pour l’exploitant, au-delà d’une adhésion à la bio, est de s’identifier comme professionnel, de retrouver une reconnaissance sociale et professionnelle, et une cohérence de fonctionnement. A chaque fois, la transition s’effectue grâce à de nombreux échanges avec d’autres agriculteurs biologiques et au sein d’organisations professionnelles engagées dans l’AB (coopérative, point de vente collectif, chambres d’agriculture, etc). « Cela montre l’importance des réseaux de dialogues dans l’adoption de nouvelles pratiques », poursuit Annie Dufour.
L’importance du groupe
Claire Ruault, sociologue au Groupe d’expérimentation et de recherche, Gerdal, situé à Angers, met également en avant le rôle du groupe. Elle a étudié la diffusion des pratiques dans des réseaux mixant agriculture biologique et conventionnelle en élevage de ruminants. Ces groupes permettent la création d’une culture commune, avec une homogénéisation des critères de raisonnement par exemple, même si tous n’ont pas les mêmes pratiques. Toutefois, les techniques de médecine alternative s’avèrent trop complexes pour être diffusées facilement par ce biais. « Les réseaux sont un facteurs de changement, mais ils ne suffisent pas, indique Claire Ruault. Le changement nécessite aussi du temps. »