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Rapport Rise Foundation : l'élevage européen, hors de contrôle ?

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Entre un élevage performant, qui joue un rôle clef dans l'agriculture et le système alimentaire européen, et ses effets sur le climat, la qualité de l’air ou de l’eau, les auteurs du rapport « What is the Safe Operating Space for EU livestock ? », publié par The Rural Investment Support for Europe (Rise) Foundation le 12 septembre, ont tenté de définir un « espace de travail sûr » pour l’élevage du Vieux Continent. En d’autres termes, ils ont identifié un équilibre compris entre un niveau minimum de production et de consommation, qui permette de profiter des « atouts santé, culturels, environnementaux, sociaux et psychiques » de l’élevage, et un plafond défini par « les seuils acceptables d’impacts négatifs sur la santé, l’environnement et le bien-être animal ». Quatre limites ont ainsi été étudiées : la nutrition humaine et l’utilisation des pâturages pour caractériser le minimum, et les émissions de GES et les flux d’azote pour le niveau maximum.

Réduire le cheptel européen, un « choix inconfortable »

Outre le fait de rappeler que l’élevage en Europe dépasse largement le plafond de durabilité identifié, les auteurs expliquent que les recommandations alimentaires nationales et l’utilisation des pâturages supposent des niveaux de production supérieurs à ceux requis pour respecter la limite des émissions de GES. Avant d’ajouter : « Ces résultats impliquent des choix inconfortables pour la société. Cependant, il est clair que le respect des limites environnementales supérieures devrait primer sur les limites culturelles inférieures. » En clair, même si l’innovation promise arrive et que l’élevage améliore ses performances, le cheptel européen doit baisser et la consommation s’adapter, notamment en se diversifiant.

Des résultats d’analyse de cycle de vie compilés

« Ce rapport ne fait que citer la littérature, et même s’il a le mérite de reprendre les points positifs de l’élevage, ces résultats sont déjà connus, explique Jean-Louis Peyraud, directeur scientifique adjoint agriculture de l’Inra, qui a été invité à donner son avis lors de la discussion finale du rapport. Si on prend toujours les mêmes méthodes, en particulier l’analyse de cycle de vie, on arrive aux mêmes conclusions. Et après ? Une baisse drastique de cheptel ne réduira pas les impacts environnementaux de manière aussi proportionnée. Ce n’est pas en raisonnant l’élevage au niveau européen que nous trouverons les solutions : c’est en jouant sur la complémentarité entre animal et végétal que nous pourrons y arriver. »

Le besoin de réorienter les ressources du 1er pilier de la PAC

Sur les politiques publiques, le rapport pointe une partie du problème : la compartimentalisation. Entre les enjeux de santé, d’alimentation, d’agriculture, d’environnement et d’économie, il manque une « une approche plus stratégique du système alimentaire européen ». Sur la PAC, les auteurs précisent de « mieux cibler les ressources du pilier 1 » actuellement fournies sous forme de paiements directs, « en les déployant pour stimuler et permettre des changements structurels nécessaires pour aider le secteur de l’élevage à faire la transition. » Sur ce point Jean-Louis Peyraud insiste et conclut : « Nous devons intégrer le paiement pour services écosystémiques afin de soutenir les élevages de montagne. Il serait plus cohérent de livrer des paiements pour service rendu, que pour le maintien de cheptel en zone défavorisée ».