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Roger Genet, directeur d’Irstea : « mieux affirmer nos missions »

Le | Recherche-developpement

Fini le Cemagref, bonjour Irstea ou Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture. Recherche pluridisciplinaire, expertise et appui aux politiques publiques agro-environnementales, partenariat avec les collectivités territoriales et les acteurs du monde économique, telles sont les caractéristiques affichées d’Irstea. Entretien avec Roger Genet, son directeur. Référence environnement : Avec Irstea, vous affirmez votre mission en agriculture et environnement. Cela correspond-il à un changement d’objectifs ? Roger Genet : absolument pas. Avec Irstea, nous voulons mieux affirmer nos missions. Le Cemagref est né il y a 30 ans, axé sur le machinisme agricole et le génie rural. Or, il a évolué, notamment au cours des dix dernières années, en développant fortement sa recherche : nos publications dans les revues internationales ont été multipliées par trois, nous nous sommes ouverts aux disciplines telles que l’économie, la sociologie, les sciences politiques, et en mettant en place une véritable approche pluridisciplinaire sur les projets. Nous sommes devenus un institut national de recherche, scientifique et technologique, pour l’environnement et l’agriculture. Notre nom n’avait plus rien à voir avec nos activités et nous le vivions comme un handicap. R.E. : Comment vous positionnez vous par rapport aux autres instituts de recherche ? R.G. : D’une part, nous avons une capacité à mettre en œuvre des connaissances pour apporter des solutions concrètes vers les décideurs politiques ou les acteurs de terrain. Nous sommes en fait plus « terrain » que les autres centres de recherche. Autre différence majeure : nous nous situons à l’échelle du territoire. Nous travaillons sur la modélisation de l’eau à l’échelle du bassin versant ou sur l’évolution prévisible de la forêt méditerranéenne suite au réchauffement climatique. A contrario, l’Inra oeuvre plutôt au niveau de la plante et de la cellule, et le CNRS à l’échelle de la planète. Sur le climat, il existe des données à un jour, un mois, ou sur des siècles, mais peu à l’échelle de dix ans sur laquelle les décisions doivent pourtant porter. C’est ce niveau intermédiaire de temps et d’espace qui nous intéresse. R.E. : Quels sont pour vous les leviers majeurs en matière d’agriculture et d’environnement ? R.G. : Indéniablement, la prise en compte rationnelle des questions environnementales. La recherche n’est pas militante, elle doit apporter des réponses les plus fondées possibles pour aider les politiques publiques. Ce qui manque aujourd’hui : un socle suffisamment solide de connaissance. Du coup, le principe de précaution est brandit à tort et à travers, notamment sur les OGM, les nanotechnologies ou les ondes électromagnétiques. La science doit éclairer mais ce n’est pas à elle de prendre des décisions. Il faut donner les moyens à la recherche de faire son travail. R.E. : Justement, quel est votre budget ? R.G. : Il est de 115 millions d’euros en 2011 et s’établira à 118 M€ en 2012. Les subventions publiques baissent légèrement, mais les ressources partenariales augmentent. Elle sont passées de 16 M€ en 2006 à 39 M€ en 2012, soit presque deux fois et demie de plus. R .E. : Sur quoi vont porter les projets d’Irstea ? R.G. : L’imagerie satellitaire fait partie de nos axes majeurs. Nous allons renforcer notre centre de recherche sur la télédétection à Montpellier, un centre commun avec le Cirad, l’IRD et AgroParisTech, sur les problématiques de l’utilisation de l’information satellitaire appliquée aux questions agricoles et environnementales : la pression urbaine sur les terres agricoles, la mise en place des trames vertes et bleues, ou encore l’évaluation des risques liés aux feux de forêt. Autre secteur, les biotechnologies, notamment sur la transformation et la valorisation des déchets organiques et ménagers. Sans oublier la réduction des pesticides dans le cadre d’Ecophyto 2018. Nous avons déjà beaucoup œuvré aux Antilles. Nous avons par exemple produit une cartographie des zones d’exclusion d’épandage aérien en Guadeloupe et Martinique, qui a été intégrée dans les GPS pour sécuriser les zones à protéger, habitations et cours d’eau, au cours des traitements.