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« Une émergence des projets collectifs pour appréhender le numérique » : Léo Pichon, AgroTIC

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Référence environnement : Peut-on dater le moment où les acteurs du numérique ont clairement opté pour les projets collectifs afin de mieux appréhender le numérique ?

Léon Pichon : La tendance aux projets collectifs d’ampleur remonte à deux ou trois ans. À notre niveau, nous l’avons constaté en 2014, quand la réflexion autour de la chaire AgroTIC a commencé, avant d’aboutir en 2016. Nous avons identifié des besoins communs : la nécessité d’organiser une veille sur les nouveautés, d’être davantage capable d’identifier le potentiel de d’innovations technologiques en agriculture, de rapprocher l’enseignement agricole et les entreprises, et plus globalement de consolider les réseaux.

R.E. : Comment expliquer ce phénomène ?

L.P. : Sur un marché très éclaté, aucune structure ne se détachait clairement comme un mastodonte, capable d’assumer l’ensemble des activités liées au numérique. Chaque PME, start-up, a son domaine d’action bien précis. Or, le très gros enjeu d’interopérabilité entre les outils et services impose de sortir de son champ d’action. Et pour le faire, une seule solution : faire appel au partenariat. Y compris, parfois, entre concurrent, comme le montre l’association Agro ADI Europe, qui existe depuis longtemps et s’applique à définir des standards et normes harmonisées en agriculture.

R.E. : Comment la distribution agricole gère-t-elle ce tournant ?

L.P. : Nous avons réalisé récemment un travail de prospection. À la question « quelle est votre place dans l’agriculture numérique ? », les distributeurs ont répondu qu’ils se voyaient dans un rôle central. Nous avons eu la même des grosses firmes de l’agrofourniture ou des prestataires de services, ce qui montre bien que le sujet touche tous les acteurs. Et cela dépasse la déclaration d’intention : plusieurs structures, coop ou négoces, se positionnent. Le virage numérique questionne sur le rôle et les modalités du conseil.

R.E. : Quelle part la distribution prend-elle dans la chaire AgroTIC ?

L.P. : La chaire compte 23 membres. À côté de « pure players » comme Isagri, Agriscop, Smag ou Cap2020, de la Chambre d’agriculture de l’Hérault, la distribution est présente avec Maïsadour, Arterris, Tutiac ou encore AgroSud. Cette dernière est très attentive au virage numérique, et prête à se réinventer. Plus globalement, la tendance est à la curiosité et l’envie de ne pas rater la vague, même pour les coopératives ne proposant pas de service numérique à ce jour.

La chaire propose un lien avec les étudiants, une source possible de recrutement pour un secteur qui peine parfois à pourvoir ses postes. La veille, l’anticipation, sont également prisées. Notre observatoire des usages de l’agriculture numérique, qui identifie notamment les freins à l’adoption des outils numériques, intéresse beaucoup Arterris ou AgroSud. La chaire est enfin un terreau de partenariats R&D.