Agroécologie

Étude de l’Ademe : 76 % des échantillons analysés de sols agricoles contiennent des microplastiques

Par Stéphanie Ayrault | Le | Résultats scientifiques & techniques

L’Ademe a publié une étude sur la présence des microplastiques dans les sols agricoles français. Fondée sur l’analyse de 33 échantillons issus du Réseau de mesure de la qualité des sols (RMQS), elle montre que 76 % d’entre eux contiennent des particules plastiques. Les grandes cultures sont les plus concernées, suivies des prairies, des vignobles et des forêts.

Étude de l’Ademe : 76 % des échantillons analysés de sols agricoles contiennent des microplastiques
Étude de l’Ademe : 76 % des échantillons analysés de sols agricoles contiennent des microplastiques

Si la majorité des recherches sur la pollution plastique dans l’environnement s’est jusqu’à présent concentrée sur les milieux marins, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) a publié, le 26 décembre 2024, une étude sur la contamination des sols agricoles par les microplastiques. Intitulée « Microplastiques présents dans les produits résiduaires organiques » , cette recherche met en évidence une pollution préoccupante des terres cultivées par ces particules invisibles à l’œil nu.

Entre un million et un milliard de particules

D’après cette étude, chaque année, entre un million et un milliard de particules se déposeraient sur les sols agricoles via l’épandage de produits résiduaires organiques (PRO). Ces apports proviennent notamment de l’utilisation de composts, de boues d’épuration ou de digestats issus du traitement des déchets organiques. Cette pollution encore peu étudiée pourrait avoir des conséquences environnementales et sanitaires importantes.

L’enquête s’inscrit dans le cadre du projet Microsof, dont l’objectif est d’établir des références nationales sur la contamination des sols français par les microplastiques. « À notre connaissance, il s’agit de la première étude cherchant à caractériser l’ampleur de cette contamination à l’échelle de la métropole française sur des sols soumis à différentes utilisations », précise l’Ademe.

L’étude repose sur l’analyse de 33 échantillons de sol issus du Réseau de mesure de la qualité des sols (RMQS), un programme de surveillance piloté par le groupement d’intérêt scientifique Sol, qui regroupe plusieurs organismes de recherche et institutions publiques, dont les ministères de l’Agriculture et de la Transition écologique, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), l’Ademe et l’Institut de recherche pour le développement (IRD).

Les grandes cultures, les plus touchées

79 microplastiques ont été identifiés dans 25 sols.

Les résultats montrent que :

  • 76 % des échantillons analysés contiennent des microplastiques, avec des concentrations variant entre 0,3 et 4 microplastiques pour 50 grammes de sol sec.
  • Les grandes cultures apparaissent comme les plus touchées, avec une contamination détectée dans 17 sites sur 21, suivies des prairies (4 sur 4), des vignobles (3 sur 4) et des forêts (1 sur 4).
  • 79 microplastiques ont été identifiés dans 25 sols, dont plus de la moitié (45) dans les parcelles dédiées aux grandes cultures.

« Ces résultats suggèrent un risque accru de pollution par les microplastiques des sols agricoles », souligne l’Ademe.

L’étude met également en lumière la nature des polymères retrouvés dans les sols :

  • Le polyéthylène, utilisé principalement dans les emballages et les films plastiques agricoles, est le polymère dominant, représentant 56 % de la totalité des microplastiques détectés. Sa présence varie selon l’usage des sols : il constitue 44 % des particules trouvées dans les grandes cultures, 68 % dans les prairies et jusqu’à 79 % dans les vignobles et vergers.
  • Derrière lui, le polypropylène représente 30 % de l’ensemble des microplastiques identifiés, avec une proportion plus élevée dans les grandes cultures (38 %).
  • D’autres polymères sont également présents en quantités moindres : un mélange de polyéthylène et de polypropylène (5 %), du polystyrène (3 %) et du polychlorure de vinyle (3 %).

L’activité humaine sur les sols agricoles joue un rôle déterminant dans la dispersion des microplastiques.

Bien que cette étude ne vise pas à identifier précisément les sources de pollution, l’Ademe rappelle que l’activité humaine sur les sols agricoles joue un rôle déterminant dans la dispersion des microplastiques. Or, les conséquences toxicologiques et écotoxicologiques de cette contamination restent encore largement méconnues. L’agence insiste sur la nécessité d’approfondir les recherches pour mieux comprendre l’impact de ces particules sur la qualité des sols, la faune et la santé humaine.

Approfondir les études

Par ailleurs, l’enquête s’est principalement concentrée sur des parcelles agricoles et horticoles ayant reçu des apports de boues d’épuration ou du paillage plastique, au détriment des zones industrielles, naturelles ou des sols n’ayant pas connu d’apports plastiques identifiés. Cette sélection des sites étudiés pourrait donc influencer les résultats obtenus et nécessite d’être élargie à d’autres types de sols pour une vision plus exhaustive du phénomène.

Face à ces constats, l’Ademe recommande plusieurs mesures pour limiter la dispersion des microplastiques dans les sols. Elle préconise notamment de restreindre l’usage des plastiques dans l’agriculture, d’améliorer leur collecte et leur recyclage, et de perfectionner les outils de déconditionnement des déchets organiques avant leur épandage. L’agence insiste également sur la nécessité de poursuivre les recherches et de mettre en place un système de surveillance à l’échelle nationale afin de mieux comprendre l’évolution de cette pollution et d’harmoniser les méthodologies d’analyse des microplastiques dans les sols.