Agrotendances

Digital : « Une vingtaine de passerelles avec d’autres solutions du marché », Thomas Voisin, Smag


Smag souhaite renforcer son engagement en faveur de l’interopérabilité et du partage des données. Son directeur général, Thomas Voisin, souligne à Agro Matin l’importance de créer un écosystème numérique ouvert, permettant aux conseillers et aux agriculteurs de tirer pleinement parti des innovations du marché.

Thomas Voisin, dg de Smag - © Ludovic Letot / Smag
Thomas Voisin, dg de Smag - © Ludovic Letot / Smag

Quels sont les messages que vous allez faire passer au Salon de l’agriculture ?

Notre rôle n’est pas de verrouiller les agriculteurs dans un écosystème fermé.

Dans le secteur agricole, un malentendu persiste autour de la question du partage des données et de l’interopérabilité des solutions. Chez Smag, notre mission est claire : accompagner la digitalisation du monde agricole pour simplifier la vie des agriculteurs. Nous nous engageons à offrir des solutions où une seule saisie d’information suffit à répondre à tous leurs besoins, qu’ils soient liés à la gestion technique, au pilotage réglementaire ou aux exigences des filières. Nous défendons une vision basée sur un écosystème collaboratif et ouvert, où les données agricoles peuvent être partagées tout en préservant la souveraineté des agriculteurs sur leurs informations. C’est le message que nous allons diffuser au Salon de l’agriculture. Les outils numériques doivent pouvoir accéder à certaines données agricoles, comme le parcellaire ou les itinéraires techniques, pour offrir des services pertinents. Nous affirmons haut et fort que notre rôle n’est pas de verrouiller les agriculteurs dans un écosystème fermé, mais de leur permettre de profiter de toutes les solutions disponibles sur le marché. C’est dans cet esprit que nous tendons la main à tous les acteurs désireux d’apporter de la valeur ajoutée à l’agriculture.

Comment cela se concrétise-t-il dans vos solutions ?

Grâce à des protocoles API robustes, nous facilitons les échanges avec divers acteurs.

Nos technologies favorisent activement l’interopérabilité. À ce jour, nous avons développé une vingtaine de passerelles avec d’autres solutions du marché, et nous prévoyons d’accélérer cette dynamique. Nous insistons sur le fait que nous ne sommes pas propriétaires des données des agriculteurs : ce sont eux qui, en toute transparence et avec leur consentement, décident quels services ils souhaitent utiliser. Grâce à des protocoles API robustes, nous facilitons les échanges avec divers acteurs, tout en respectant scrupuleusement la volonté des exploitants.

Nos collaborations s’étendent aussi bien aux solutions de liaison avec les machines (comme celles proposées par Aptimiz, Karnott, ou Scopix) qu’aux grands acteurs internationaux tels que Xarvio (BASF), Avizio (Syngenta), Fieldview (Bayer) ou Farmstar (Airbus) ainsi que des startups (Abelio, Wanaka…). Ces entreprises partagent notre objectif commun de simplifier et d’automatiser la saisie des données. Une fois les données collectées, notre priorité est de les rendre fluides, exploitables et directement utiles aux agriculteurs, mais également à leurs conseillers techniques ou fournisseurs.

Depuis trois ans, nous œuvrons à promouvoir cette vision collaborative, notamment dans des domaines comme la réduction des émissions de gaz à effet de serre ou le suivi du stockage de carbone. En 2025, nous souhaitons intensifier nos efforts pour valoriser les bonnes pratiques agricoles et la qualité des productions.

Ce message n’est-il pas unanime ?

Nous évoluons dans un contexte informatique où le partage des données reste un défi.

Ce message peine encore à trouver un écho dans le monde agricole, particulièrement dans le domaine du numérique, où les acteurs restent trop souvent cloisonnés. Il est important de convaincre l’ensemble des parties prenantes - agriculteurs, coopératives, négociants, et entreprises de l’AgTech - qu’il faut fédérer les forces en présence pour rendre les outils plus performants et réellement utiles aux exploitants.

Nous évoluons dans un contexte informatique où le partage des données reste un défi. Certains modèles économiques, ainsi que la perception de la valeur immatérielle des données, constituent encore des freins. Mais pour nous, le principe est clair : les données appartiennent exclusivement à l’agriculteur.

Que pensez-vous de la déroute d’Agdatahub ?

L’arrêt d’Agdatahub illustre bien le besoin d’une structure neutre pour incarner l’intermédiation des données. Ce rôle, selon nous, ne peut pas être assumé par un acteur économique : il doit relever de l’État. Malheureusement, l’État n’a pas pris cette responsabilité jusqu’au bout. Chez Smag, nous gérons le consentement des utilisateurs depuis 15 ans, en mettant en réseau les agriculteurs, leurs techniciens, leurs conseillers, voire leurs clients industriels. Notre système est conçu pour garantir ce consentement de manière fine, au niveau de chaque parcelle, et, cela, depuis nos débuts.

Quelle est votre actualité ?

Nous enregistrons une croissance notable : une hausse de 50 % d’abonnements payants sur les douze derniers mois. Nous continuons à travailler sur trois axes stratégiques :

  • respect des exigences réglementaires, où nous progressons constamment ;
  • ergonomie et simplification des saisies, avec des innovations prometteuses, notamment grâce à l’intelligence artificielle ;
  • valorisation autonome des données, grâce au développement de calculateurs performants et d’interfaces intuitives.

Nous avons déjà déployé cinq calculateurs pour les émissions de GES et le stockage de carbone auprès d’une dizaine de coopératives et de négociants. Ces outils contribuent à notre ambition de rendre la digitalisation de l’agriculture plus fluide, performante et accessible à tous.