Alimentation animale, point chaud pour les filières d’élevage dès cet automne
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Les pâturages ayant souffert de la canicule, de nombreux élevages sont obligés de piocher dans les réserves de fourrage pour nourrir les ruminants. Les éleveurs pourraient avoir recours à des achats d’aliments supplémentaires pour l’hiver. Mais dans les cas de trésoreries tendues, la solution pourrait plutôt être de réduire les cheptels, voire d’arrêter l’exploitation, comme le craignent plusieurs acteurs du secteur.
Les conférences de rentrée se suivent, et toutes renvoient à la fragilité du secteur agricole, que le Covid, la guerre en Ukraine et la sécheresse ont éreinté depuis deux ans. Parmi les constats partagés, chez les chambres d’agriculture, au Snia et à la FNSEA : les filières d’élevage sont particulièrement vulnérables. Les élevages de ruminants, qui s’appuient habituellement sur le pâturage, souffrent. « Les prairies ont grillé. Dans beaucoup de régions, les ruminants ont attaqué les fourrages d’hiver dès le mois de juin », constate la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert. « Les pluies sont très attendues pour cette fin d’été, début d’automne, abonde le président du Snia François Cholat. L’avenir de certaines fermes dépendra de leur capacité à envoyer les bêtes au pré avant l’hiver. »
Le prix de l’alimentation animale augmente
Plusieurs circuits d’approvisionnement de compléments sont d’ores et déjà saturés. « Dans le Sud, les exploitations misant sur la luzerne d’Espagne voient leurs fournisseurs tripler les prix, affirme Sébastien Windsor. Même ceux qui sont prêts à payer ne sont pas sûrs d’être servis, car les volumes produits sont insuffisants. » Le Snia sait que la filière alimentation animale pourrait être un recours pour compléter les stocks de fourrages d’hiver. Les industriels se gardent toutefois de se réjouir, car rien ne prouve que les éleveurs auront les moyens d’investir le moment venu. D’autant que les fabricants font face eux aussi à des hausses de charges et des matières premières, et comme le rappelle François Cholat, « nous avons trop peu de marge pour ne pas répercuter ces coûts sur le produit fini ».
Des cultures d’automne comme plan B
Dans certaines zones où les moissons ont été précoces, des cultures ont été implantées dans le but de créer des stocks supplémentaires. « Des ray-grass ou des sorghos ont été semés pour augmenter les volumes de fourrages disponibles après l’automne, mais ces cultures sont aussi dépendantes de la pluie », glisse Sébastien Windsor. Les éleveurs espèrent donc un automne favorable aux pâtures et aux parcelles cultivées. Sous peine de conséquences définitives.
Le spectre de la décapitalisation
Un mot est en effet revenu dans toutes les bouches : décapitalisation. Autrement dit, vente de bêtes pour adapter les cheptels aux stocks de fourrages. « Une stratégie qui dans les cas extrêmes pourrait aboutir à des reconversions dans des filières strictement végétales, voire des arrêts d’exploitation purs et simples », affirme Sébastien Windsor, président des chambres d’agriculture. « Cette perspective est réelle, commente Christiane Lambert. Les produits ne sont pas toujours valorisés à leur juste valeur. Ajoutez à cela les contraintes du métier et la défiance sociétale, les éleveurs sont à bout. »