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Conseil stratégique, tous concernés !

Le | Cooperatives-negoces

Les agriculteurs n’ont plus que douze mois pour réaliser leur premier conseil stratégique phytosanitaire. Une étape que peu ont déjà franchi, par méconnaissance ou par manque de motivation. Or, ce conseil est désormais obligatoire pour renouveler son Certiphyto. Si certains distributeurs communiquent sur le sujet, les firmes phytosanitaires, elles, restent discrètes. Pourtant, ce dossier concerne tout le monde.

Conseil stratégique, tous concernés !
Conseil stratégique, tous concernés !

Les assemblées générales de fin d’année ont été l’occasion, pour l’équipe de Référence agro, d’évoquer, avec les présidents et directeurs généraux des coopératives, l’épineux dossier du conseil stratégique phytosanitaire (CSP). Tous reconnaissent que les agriculteurs sont peu, voire pas du tout, au fait du sujet ! Et pourtant, cela les concerne directement. Car pour rappel, chaque exploitant devra, d’ici au 31 décembre 2023, avoir réalisé son premier CSP. Un passage obligé pour, en retour, renouveler son Certiphyto et donc, être autorisé à utiliser des produits phytosanitaires. Distributeurs et fournisseurs de produits phytosanitaires devraient tous se sentir concernés pour communiquer sur le sujet… car le temps presse.

Un possible report ?

À moins que, comme l’évoquait Jérôme Calleau, le président de Cavac (85), en conférence de presse le 15 décembre, « tout le monde compte sur un report de la mise en place de ce conseil stratégique. » En juin, Sébastien Windsor, le président des Chambres d’agriculture, en avait déjà fait la demande au ministre de l’Agriculture. Ce à quoi Marc Fesneau avait répondu souhaiter « imprimer un calendrier volontaire, mais réaliste ». Un « oui » au report ? À date, nous n’avons aucune précision sur cette éventualité.

Mettre en place des partenariats…

En attendant, quelques coopératives et négoces jouent la carte de la pédagogie et de la communication pour informer les agriculteurs. Dans son dernier Cavac Infos de décembre 2022, la coopérative vendéenne consacre une page entière pour rappeler l’enjeu de ce conseil stratégique et surtout, préciser à ses adhérents vers qui se tourner pour le réaliser. Car les coopératives et négoces ayant, dans le cadre de la séparation du conseil et de la vente, opté pour la vente, ne peuvent pas prodiguer ce CSP. Ils orientent alors les agriculteurs vers les chambres d’agriculture, les CER ou des conseillers privés. Ynovae (89) a de son côté, dès le début de l’année 2022, initié un partenariat avec la Chambre d’agriculture de l’Yonne pour bâtir ce conseil stratégique.

…pour simplifier les démarches

Cavac en a fait de même avec la Chambre d’agriculture des Pays-de-la-Loire et le CER France Vendée pour, avec l’accord de l’agriculteur, fournir les données nécessaires aux organismes de conseils (assolement, IFT, plan de fumure…). Et ce, afin de simplifier les démarches administratives. La Cal (54) aussi souhaite faciliter les échanges avec les chambres. « J’ai contacté trois chambres d’agriculture (54, 57, 88) pour leur demander s’il était possible de leur envoyer des adhérents, explique Gilles Lassagne, directeur du pôle végétal, interrogé par Référence agro. Ces dernières estiment qu'il leur faudrait deux ans pour prodiguer un CSP à tous les agriculteurs du secteur ! Nos adhérents, de leur côté, sont au courant de cet impératif, mais peu s’en préoccupent réellement : beaucoup se disent qu’ils continueront à utiliser des produits phytosanitaires quand même, CSP ou pas… »

Entre 5 et 10 % des agriculteurs auraient déjà leur CSP

Et du côté des conseillers privés ? « Le conseil stratégique démarre doucement, mais démarre, indique Hervé Tertrais, représentant des conseillers privés et indépendants regroupés au sein du PCIA. Nous avons de la demande, les agriculteurs ont été informés de multiples manières. Certes, nous sommes sous pression, mais cela se comprend. Il aurait fallu donner des échéances à chaque exploitant pour échelonner l’obtention de ce conseil stratégique. À ce jour, j’estime entre 5 et 10 % le nombre d’agriculteurs qui l’a déjà réalisé. Toutefois, le PCIA n’est pas alarmiste comme certaines structures veulent le dire. Il faudra faire un point en septembre 2023. De notre côté, nous sommes prêts à le réaliser pour tous nos clients : il sera bien fait, par de vrais spécialistes en productions végétales et expérimentés. » Hervé Tertrais confie qu’en moyenne, le coût de ce conseil oscille entre 450 et 650 €.

Du retard du côté des chambres d’agriculture

Dans les faits, former tous les agriculteurs dans les temps semblent compliqué d’autant que le nombre de conseillers reste insuffisant. « Nous aurons du mal à être prêts à l’heure, confirme Sébastien Windsor, président de Chambres d’agriculture France interrogé par Référence agro. Plus de 280 conseillers des chambres sont déjà formés au conseil stratégique. Mais vu la faible demande, nous n’avons mobilisé que 90 équivalents temps plein. » Même avec cet effectif réduit, Chambres d’agriculture France n’a pas pu faire ce qu’elle espérait. « Ces conseillers auraient pu réaliser 25 000 conseils stratégiques, poursuit-il. Nous finissons 2022 entre 15 et 20 000 réalisations. » Au total, près de 370 000 agriculteurs sont concernés. Pour rappel, les exploitations HVE ou AB sont exemptées de ce conseil.