Les objectifs du plan protéines pour le soja sont très loin d’être atteints, selon Terres Inovia
Le
À l’occasion de la présentation des résultats d’observatoires menés dans l’ouest de la France sur la culture du soja, lors d’un webinaire organisé le 6 avril par Terres Inovia, le manque de rentabilité du soja par rapport à d’autres cultures, comme le blé ou la maïs, a été souligné. Selon Thomas Maer, ingénieur au sein de l’institut technique, les ambitions du Plan protéines pour la filière vont être difficiles à atteindre.
Lancé à la fin de l’année 2020, le plan protéines a pour objectif de doubler, d’ici à 2030, les surfaces de cultures riches en protéines végétales, pour atteindre les deux millions d’hectares. En ce qui concerne le soja, l’ambition est d’atteindre les 250 000 hectares en 2025, et les 300 000 hectares en 2030. Alors qu’un projet de recherche a été lancé en début d’année par un consortium d’acteurs publics et privés afin de démontrer la faisabilité d’une production de soja français de grande ampleur, Terres Inovia insiste sur la marche à gravir pour y parvenir. « Il y a encore du travail, indique Thomas Maer, ingénieur chez Terres Inovia, à l’occasion d’un webinaire consacré à la culture du soja dans l’ouest de la France, le 6 avril. Nous allons être très en dessous des objectifs fixés par le Plan protéines. Il faudrait quasiment doubler les surfaces pour y parvenir. »
Le soja manque encore de rentabilité
L’ingénieur appuie son propos sur les résultats présentés par ses soins, découlant d’un réseau d’observatoires piloté par Terres Inovia dans le cadre de Cap Protéines, dans le Grand Ouest. 62 parcelles ont été suivies en 2021, 35 en 2022. Dans ce cadre, un travail de simulation a été réalisé concernant l’introduction de soja dans des rotations, dans les Pays de la Loire. Quatre types de fermes ont été caractérisés (1). Dans le cas d’une exploitation en polyculture-élevage de bovin lait, les résultats montrent que de nombreuses externalités positives sont associées à l’introduction de soja (moindre temps de travail, baisse des émissions de gaz à effet de serre, de l’IFT, meilleur bilan azoté), mais que sur le plan économique, l’impact est défavorable.
Les conclusions sont du même ordre pour les autres types de ferme. « Le potentiel maximum du soja se rapproche des marges acceptables des autres grandes cultures, mais il reste trop peu rentable face au blé ou au maïs », résume Thomas Maer. Le manque estimé est de l’ordre de 150 €/t. « L’absence de rentabilité pour les agriculteurs a été souligné lors des réunions d’échanges avec les partenaires agricoles, indique l’ingénieur chez Terres Inovia. Il est compliqué d’ancrer cette culture dans les rotations. »
Vigilance sur l’accès à l’eau
La mise en œuvre de primes de filières pourrait-elle être une solution, pour améliorer la rentabilité de la filière ? Là aussi, Thomas Maer reste mesuré. « L’origine France est remplacée par la garantie de soja non-déforestant dans les cahiers des charges. La valorisation du soja reste insuffisante pour concurrencer les autres cultures. »
À cela s’ajoutent des conditions pédoclimatiques encore parfois bloquantes. Les rendements observés sont mitigés et en dessous de la moyenne nationale de 22 qt/ha, en raison notamment de conditions froides et humides en début de cycle. De manière assez surprenante, peu de différences ont été notées entre les parcelles bio et conventionnelles. « L’évolution à la hausse de la température pourrait permettre de créer d’autres bassins de production, c’est plutôt positif », envisage Thomas Maer, avant de nuancer : « L’accès à l’eau risque d’être plus compliqué, tout dépendra de la politique en place à ce sujet. »
(1) Polyculture-élevage bovin lait en sec ; polyculture-élevage monogastriques, en sec et en irrigué ; grandes cultures en irrigué.