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« Le conseil stratégique n’est pas notre seule priorité », Philippe Boullet, CERFrance

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Où en sont les Centres d’économie rurale sur la mise en place du conseil stratégique ? Interrogé par Référence agro, Philippe Boullet, directeur du pôle performance et prospectives de CERFrance, dévoile la stratégie des CER en matière d’accompagnement des agriculteurs, qui va bien au-delà du conseil stratégique et comprend des enjeux que le CER estime actuellement davantage prioritaires.

« Le conseil stratégique n’est pas notre seule priorité », Philippe Boullet, CERFrance
« Le conseil stratégique n’est pas notre seule priorité », Philippe Boullet, CERFrance

Référence agro : Où en êtes-vous du conseil stratégique ?

Philippe Boullet : Nous n’avons pas encore appuyé sur l’accélérateur, parce que la demande est très faible, les agriculteurs attendent l’échéance de renouvellement de leur Certiphyto. Nous avons mis en place un outil qui sera en phase industrielle lorsque la demande enflera. Cinq CERFrance de Normandie, Pays de la Loire et Hauts de France ont obtenu leur renouvellement sur le conseil stratégique. Cinq autres sont en cours de demande, et une dizaine d’autres devraient suivre, sur 57 structures capables de réaliser des conseils stratégiques d’ici un an. Une petite cinquantaine de nos salariés ont été formés, sur 1400 conseillers. Les formations vont se poursuivre en 2022, mais pas uniquement sur le conseil stratégique.

R.A. : Partagez-vous l’inquiétude des chambres d’agriculture sur la capacité des structures présentes dans les territoires à réaliser le conseil stratégique ?

P. B. : Non, je ne suis pas inquiet. Nous prendrons notre part et nous en avons les capacités humaines et les outils. Les CERFrance sont pragmatiques : nous proposons des services dimensionnés au marché, qui n’existe pas encore aujourd’hui. Mais nous serons prêts ! D’ailleurs la demande ne se limite pas aux produits phytosanitaires

R.A. : Justement, quels sont les marchés stratégiques selon vous ?

P. B. : En ce moment, la demande des agriculteurs est clairement sur le carbone. Nous avons répondu à l’appel d’offres de l’Ademe concernant les « bons diagnostics carbone » sur l’ensemble du territoire et à ceux portés par France carbone agri dans les départements du Grand Ouest. 80 conseillers ont été formés à la réalisation des diagnostics carbone. Autre sujet pour nos conseillers : la nouvelle Politique agricole commune et les éco-régimes. Nous avons lancé en novembre un simulateur sur ce thème. Les conseillers sont notamment formés à l’évaluation de tous les critères en jeu, et en particulier ceux relatifs aux infrastructures permettant de protéger la biodiversité.

R.A. : Avez-vous noté une évolution du paysage du conseil depuis la séparation de la vente et du conseil ?

P. B. : Absolument pas. Les coopératives et les négoces ont choisi la distribution et cela n’a pas entraîné de demande pour un conseil spécifique qui viendrait à manquer aux agriculteurs. Ce qui transforme le paysage du conseil, ce sont les nouvelles attentes et l’évolution de la Pac. Le conseil ne porte plus uniquement sur la recherche de l’amélioration de la marge ou du bilan comptable, il est plus global et stratégique. Il porte sur la valeur ajoutée que les exploitants agricoles pourra aller chercher en 2030 pour rester dans la course et sur les engagements d’ordre environnemental et social qu’ils prendront à cet effet. Nous formons nos conseillers économiques dans ce sens.