Pac, le plan stratégique de la France moins ambitieux que ceux de ses voisins
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Pour mieux situer le plan stratégique national français, PSN, par rapport à ceux de ces voisins, la plateforme Pour une autre Pac a mis en ligne une carte interactive. La France est devancée sur de nombreux sujets, notamment en ce qui concerne l’ambition des éco-régimes, l’aide à l’agriculture biologique ou le bien-être animal. Des constats partagés par la Commission européenne dans sa lettre d’observation à l’Hexagone.
La Commission européenne a fait son retour à la France et à 18 autres États membres sur leurs plans stratégiques nationaux respectifs, fin mars. Si la France a été encouragée à revoir sa copie, notamment pour relever son ambition environnementale, comment se place-t-elle par rapport à ses voisins ? La plateforme Pour une autre Pac a mis en ligne une carte interactive pour comparer le PSN français à celui de douze autres États membres*. « Nous avons pris la proposition française comme référentiel pour voir qui faisait mieux, en vulgarisant le contenu de ces documents », expliquait Juliette Sainclair, chargée des dossiers politiques pour la plateforme, lors d’une conférence de presse organisée le 6 avril. L’outil compare les différents États sur huit enjeux, parmi lesquels le soutien aux petites fermes, à l’installation ou aux fermes bio, le bien-être animal et la rémunération des pratiques durables.
Les éco-régimes français mal positionnés
En ce qui concerne ce dernier point, la plateforme s’est appuyée sur les travaux de comparaison des éco-régimes réalisés par Birdlife, WWF et le Bureau européen de l’environnement. Selon ces données, huit des douze pays analysés feraient mieux que la France (l’Irlande, le Portugal et le Danemark et la Pologne faisant moins bien). Deux tiers des pays auraient d’ailleurs globalement une appréciation supérieure à celle de l’Hexagone. Les Pays-Bas proposent ainsi un système à points donnant accès à trois niveaux de rémunération. Le lien entre le niveau d’ambition et la rémunération est également jugée plus pertinent dans les éco-régimes allemand et belge.
Dans une synthèse résumant son appréciation des 19 éco-régimes sur lesquels elle a fait un retour, la Commission européenne insiste sur l’hétérogénéité des rendus : « Les éco-régimes proposés varient considérablement dans leur niveau d’ambition environnementale, que ce soit concernant les pratiques soutenues ou l’organisation des dispositifs à plusieurs entrées. »
205 €/ha pour le bio en Autriche
Pour le soutien à l’agriculture biologique, huit pays sont là encore considérés comme plus ambitieux (tous sauf l’Espagne, l’Irlande, les Pays-Bas et la Pologne). En France, l’éco-régime dédié est fixé à 82 €/ha. En Autriche, une aide-plancher de 205 €/ha est prévue dans le second pilier. Elle peut être revalorisée selon les productions. En Italie, l’aide au maintien et les montants par hectare sont également plus élevés qu’en France, et jugés suffisants par les organisations de défense du bio pour atteindre les 25 % de la SAU en bio en 2027 (15 % aujourd’hui). Les organisations suédoises se montrent également confiantes pour passer de 20 à 30 % de surfaces en bio, compte tenu des budgets affichés dans le PSN.
La France fait mieux en ce qui concerne l’item « Réduire le budget dédié aux aides favorisant un modèle agro-industriel », seuls trois pays se classant devant elle : l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Autriche. Les Pays-Bas transfèreront ainsi progressivement une part plus importante de leur budget du premier vers le deuxième pilier, partant de 15 % en 2023 pour aller jusqu’à 30 % en 2027. L’Autriche a, quant à elle, fait le choix d’avoir un second pilier très fort pour renforcer ses actions en matière de développement rural. Il représentera 43 % du budget Pac total.
Des efforts à faire sur le bien-être animal
Enfin, concernant l’enjeu du bien-être animal, sept PSN sont considérés comme plus ambitieux que celui de la France : Pays-Bas, Belgique, Allemagne, Pologne, Autriche, République Tchèque, Suède. Ces pays envisagent de couvrir une part importante de leur cheptel par des mesures d’amélioration du bien-être animal : 16,5 % en 2027 en Wallonie, 35 % en République Tchèque, 19 % en Pologne, 17 % en Suède… contre 4 % en France. Le sujet est en effet absent des pratiques valorisées par les éco-régimes français. Dans la proposition néerlandaise, trois pratiques le sont, dont la limitation de la densité et le temps de pâturage. « Neuf États membres ont prévu des interventions pour le bien-être animal dans les éco-régimes, 13 le feront sous forme de soutien aux investissements dans les exploitations et 14 dans les Maec, résume la Commission dans sa synthèse. La majorité des PSN ne prévoient pas d’interventions spécifiques pour la réduction de l’usage des antimicrobiens. »
* Allemagne, Autriche, Belgique (Wallonie), Danemark, Espagne, Irlande, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Suède.