Décarboner sans décapitaliser, le plaidoyer du Snia pour réduire de 20 % les émissions de l’élevage
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Réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 : c’est l’ambition affichée par le Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale, Snia, lors de sa conférence de presse de rentrée, le 30 août. Un objectif qui s’appuie sur de nombreuses mesures, notamment au niveau du sourcing et de la formulation des aliments, posées en alternatives à la décapitalisation de l’élevage comme moyen de réduire l’empreinte du secteur.
Malgré le constat d’une « perte de rentabilité généralisée », le Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale, Snia, n’en demeure pas moins mobilisé pour agir en faveur de la décarbonation de l’élevage. Lors de sa conférence de presse de rentrée, organisée le 30 août 2023, la structure a ainsi affiché l’objectif de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre des activités d’élevages, via la part alimentaire, entre 2020 et 2030. Une ambition pour laquelle un fil rouge a été défini : la décarbonation ne doit pas passer par la décapitalisation de l’élevage. « C’est notre combat quotidien, pose Philippe Manry, vice-président du Snia. La part des importations dans la consommation de viande est en hausse pour toutes les espèces. Or, les importations ne sont pas prises en compte dans le calcul des émissions de GES de la stratégie nationale bas carbone, qui table sur une réduction des cheptels (1). Le carbone s’arrête à la frontière, c’est bien connu… », ironise-t-il.
Se tourner massivement vers du soja non déforestant
Pour atteindre son objectif, le syndicat a défini trois axes d’action. Le premier concerne la formulation. « Les matières premières représentent 95 % de l’empreinte carbone de la nutrition animale, un gros travail est à réaliser au niveau du sourcing », commente Aurélien Simbelie, membre du bureau du Snia. Pour cela, le Snia va s’appuyer sur la démarche Duralim, afin d’avoir recours à du soja non déforestant. « L’objectif est d’atteindre les 100 % au 1er janvier 2025, rappelle Ludovic Michel, vice-président du Snia. Pour l’heure, nous sommes déjà en avance sur les engagements pris pour 2023, à savoir d’atteindre le palier des 50 %. » Cette initiative devrait permettre, selon le Snia, de réduire de 1,5 Mteq CO2/an les émissions liées à la nutrition animale.
Au niveau de l’amont, le syndicat prévoit également d’optimiser et d’économiser les ressources agricoles, avec le réseau Les Coproduits, lancé en février dernier, et de quantifier précisément les émissions directes et indirectes du secteur, en partenariat avec Carbone 4 et Agrosolutions.
Formulation et limitation des rejets
Le deuxième axe porte sur la performance nutritionnelle. Aurélien Simbelie rappelle, à ce sujet, que les efforts déjà mis en œuvre ont permis de réduire de 10 % les émissions de GES de la filière nutrition animale. « Le cœur de notre métier demeure la formulation », commente-t-il. En dix ans, une baisse de 15 % de l’impact CO2 a ainsi été mesurée pour la filière poulet standard. « L’enjeu est désormais de l’appliquer à tous les segments de marché », note Ludovic Michel.
Enfin, le dernier axe concerne les rejets, et doit bénéficier du travail combiné des deux autres leviers d’action, afin de limiter les effluents en porcs et volailles, et de réduire les émissions entériques chez les ruminants.
Le syndicat prévoit également d’améliorer la performance énergétique des usines, de mieux connaître les usages de l’eau pour les optimiser, et de décarboner les flux logistiques.
La nutrition animale est le coeur du réacteur pour décarboner l’élevage, nous voulons le faire savoir.
Philippe Manry
Vice-président du Snia
Coproduits et méthanisation
A l’amont des filières, le plan d’action du Snia prévoit des mesures pour mieux valoriser la biomasse. Les représentants du syndicat ont profité de leur présentation pour rappeler leur position sur la valorisation des coproduits, qui pèsent pour 50 % des approvisionnements de la filière, par la méthanisation. « C’est un vrai sujet, car on se retrouve en situation de concurrence, estime Ludovic Michel. La méthanisation peut avoir un vrai rôle à jouer dans le maintien de l’élevage. Mais si elle est uniquement mise au service de la production d’énergie, nous sommes moins d’accord. » Le vice-président du Snia met également le doigt sur un autre enjeu. « Certains coproduits humides, comme la pulpe de betterave, devant être séchés, pourraient être menacés par le coût de l’énergie. Étant donné que nous en avons toujours besoin aujourd’hui, cela nous pousserait à importer de la matière sèche et donc à décaler le problème. »
(1) Selon le Snia, la SNBC3 mise sur une réduction de 12 % des bovins, de 8 % des porcs, et une stabilisation des volailles avec une hausse de 55 % des importations.