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Écophyto, les distributeurs cherchent un moyen de donner une suite aux groupes 30 000


Les coopératives et négoces ayant choisi la vente des produits phyto, plutôt que le conseil, ne peuvent plus accompagner des groupes 30 000. Sur le terrain, ces structures s’efforcent de trouver une voie pour que les collectifs perdurent. Certains expriment l’espoir de voir le Gouvernement rendre aux distributeurs le droit et les moyens d’animer de tels groupes.

Atelier pulvérisation, lors de la journée Innovations organisée le 20 juin 2023 par Eureden (photo E - © D.R.
Atelier pulvérisation, lors de la journée Innovations organisée le 20 juin 2023 par Eureden (photo E - © D.R.

Le 20 juin dernier, Eureden organisait une journée sur la thématique des innovations pour ses adhérents engagés dans des groupes 30 000.  La coopérative bretonne en accompagne dix, réunissant quelque 140 agriculteurs, sous la coordination de Muriel Guernion, qui anime elle-même trois de ces collectifs. Comme partout en France, toutefois, les distributeurs ayant choisi la vente plutôt que le conseil n’ont plus le droit d’engager ou de poursuivre l’animation de groupes 30 000. « Fin 2023, nous arrivons à la fin de la période de trois ans suite à l’inscription de ces groupes en 2020, et perdons la reconnaissance de l’administration, ainsi que les moyens financiers qui vont avec », regrette-t-elle.

Naca, 20 négoces ont animé des collectifs

Un peu plus au sud, le négoce agricole Centre-Atlantique (Naca) connaît la même problématique. Depuis le lancement du dispositif en 2017, quinze négoces de Nouvelle-Aquitaine et cinq dans la région Centre, adhérents du Naca, ont lancé une trentaine de groupes 30 000. À ce stade, il n’en reste plus que trois qui ont encore cette étiquette, également jusqu’à la fin 2023. « Ces groupes n’existaient pas avant, car les négoces avaient jusqu’alors peu la culture de la démarche collective, indique Nicolas Pugeaux, responsable environnement du Naca. Les négoces ont bien joué le jeu, mais sans financement, peu des collectifs demeureront. » D’autant que tous les groupes n’auraient pas forcément souhaité renouveler leur agrément. « Certains estimaient le dispositif un peu lourd, administrativement parlant, pour ce qu’il apportait », remonte Nicolas Pugeaux.

En Nouvelle-Aquitaine, en 2022, douze des 30 groupes 30 000 étaient animés par des distributeurs. En Bretagne, la même année, ce chiffre s’élevait à quinze, sur 42 groupes mis en place au total.

Un budget de 14 à 16 000 € par an

Le groupe piloté par Lamy-Bienaimé (Deux-Sèvres) fait partie de ceux qui veulent perdurer. « Nous travaillions sur l’agriculture de conservation des sols, et nous avons perdu l’agrément en mars 2021, précise Clémence Marsault, animatrice au sein du négoce. Nous touchions 14 à 16 000 € via le dispositif. » Pendant un temps, le collectif est resté au point mort, mais depuis un an, le négoce cherche des financements pour le relancer. Pour le moment, Lamy-Bienaimé puise dans ses fonds propres de quoi financer le temps que Clémence Mersault et ses deux co-animateurs consacrent au projet. Le Naca s’efforce d’accompagner le négoce dans l’identification d’appels à projets, tels que Solnovo, pour lequel la démarche de Lamy-Bienaimé n’a pas été retenue.

De « groupes 30 000 » à « groupes de progrès »

Du côté d’Eureden, les agriculteurs souhaitant continuer, l’idée est donc de pérenniser l’ensemble des groupes. La coopérative a déjà mis en place deux « groupes de progrès », mobilisant 40 agriculteurs. L’objectif serait de convertir chaque groupe 30 000 en groupe de progrès. « Les adhérents sont moteurs, affirme Muriel Guernion. En 2020, alors que nous prévoyions de créer sept groupes 30 000, nous avons dû en créer trois de plus devant la mobilisation. Nous voulons garder un groupe sur chacun de nos douze territoires. » Mais pour Eureden, qui compte quatre animateurs et animatrices, soit l’équivalent de deux temps pleins, l’équation financière est encore en cours de résolution. « On nous suggère de monter des GIEE, mais cela est bien moins incitatif que les groupes 30 000 », glisse Muriel Guernion.

Espoirs d’un retour en arrière du Gouvernement

Entre le lancement d’une mission de l’Assemblée nationale sur la séparation du conseil et de la vente et la publication prochaine du plan Écophyto 2030, Nicolas Pugeaux veut espérer que ces groupes pourront être remis sur les rails, pourquoi pas sous un autre nom ou format : « Au fond, si ces groupes peuvent avoir une vocation de conseil, interdire leur animation par les OS dans le cadre de la séparation du conseil et de la vente est-elle bien dans l’esprit de la mesure ? » Une relance qui ne soulagerait pas seulement les coopératives et négoces. Car, selon Muriel Guernion et Nicolas Pugeaux, en Bretagne comme dans le Centre ou en Nouvelle Aquitaine, les Draaf déplorent l’arrêt des groupes pilotés par les distributeurs.