Stockage de carbone, de premiers résultats pour le projet Dycasol de l’Apad
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Mesurer les taux de matière organique de parcelles travaillées en agriculture de conservation des sols, c’est l’objet du projet Dycasol, lancé en 2018 par l’Apad. De premiers résultats ont été présentés lors d’un webinaire organisé le 11 décembre par la structure, qui a par ailleurs insisté sur la nécessaire valorisation financière de ces pratiques.
Publication de nouvelles méthodes pour le label bas-carbone, création d’un indicateur de santé des sols, ou mise en œuvre de diagnostic carbone chez les jeunes agriculteurs : indéniablement, le thème du stockage du carbone dans les sols agricoles est au cœur de l’actualité de cette fin d’année. Au sein de l’Apad, les travaux se poursuivent, notamment à travers le projet Dycasol. Lancé en 2018 pour cinq ans, il s’attache à mesurer les taux de matière organique des sols. 672 parcelles, soit 10 000 hectares, sont mobilisées au sein de 120 fermes, dans le Perche et en Centre Atlantique. « L’objectif est de récupérer des données pour alimenter les réflexions et justifier le stockage du carbone, si demain cela était rémunéré », explique la cheffe du projet, Gwendoline Lechat, lors d’une conférence en ligne, organisée le 11 décembre, par l’Apad. Les travaux de l’association se sont portés sur la matière organique, car « c’est un indicateur simple à mesurer voir se rendre compte de l’impact de l’ACS », indique Laurent Monnet, agriculteur en ACS depuis 11 ans, et membre du projet Dycasol.
Des résultats très variés
Un livre blanc publié en décembre 2020 et recensant les connaissances à disposition sur les potentialités de stockage de carbone en ACS, résume les premiers résultats du projet. Les composantes physiques du sol influent fortement sur les mesures réalisées, les sols argilo-calcaires ont significativement des taux de MO plus élevés que les sols limoneux. Ainsi, « sur 0-20cm, il existe à la fois des situations à état organique très faibles (0.61 %MO) comme plus conséquentes (7.75 % MO). 50 % des parcelles se situent entre les taux 2.16 % et 3.68 %. » Par ailleurs, les apports de matière organique extérieure à la ferme ont un impact significatif sur le taux entre 0 et 20 cm. Enfin, l’hypothèse des agriculteurs que l’irrigation peut privilégier un taux de MO plus élevé n’est pas validée. « Nous avons maintenant besoin des scientifiques pour prouver l’impact de l’ACS en matière de biodiversité, la qualité de l’eau, etc », appelle Gwendoline Lechat.
L’enjeu de la rémunération
Si le constat de ce potentiel est partagé, la question de la rémunération de ce service reste encore en suspens. « Pour pratiquer l’agriculture de conservation des sols, nous réalisons des investissements, nous devons utiliser de nouvelles semences, mais nous avons l’impression d’un manque de reconnaissance de ces efforts par la société », regrette Diane Masure, agricultrice. Pour répondre à cet enjeu, le label bas-carbone est perçu comme un bon point de départ. « L’ACS semble bien intégrée dans la méthode grandes cultures qui vient d’être déposée au ministère de la Transition écologique », souligne Diane Masure. Le label n’est cependant pas la seule piste envisagée. Les cofinancements par les secteurs privés et publics sont encouragés. « Nous espérons que les entreprises qui nous écoutent et qui sont préoccupées par la biodiversité vont s’engager, nous avons des quantités de carbone issues directement de la ferme qui sont prêtes à être vendues », appelle l’agricultrice. Une démarche également encouragée par Claudine Foucherot, directrice du programme Agri-forêt chez I4CE, qui cite d’autres pistes : « Les grosses entreprises polluantes du marché carbone peuvent aussi êtres des sources de financement, tout comme la Pac. Enfin, la Commission européenne devrait lancer dans le cadre du Green Deal une certification carbone européenne, annoncée pour 2023. » L’experte salue par ailleurs les « bons diagnostic carbone », dont l’appel à projets vient d’être diffusés par le Gouvernement. « Les diagnostics sont une première étape pour se lancer dans une démarche de certification, mais ils ont un coût ; s’ils peuvent être couverts par les aides publiques, c’est très bien ! »
200 exploitations, soit 30 000 ha, ont par ailleurs reçus le label « Au cœur des sols », lancé par l’Apad, il y a un an. « Nous sommes au début d’une nouvelle manière de faire reconnaître notre métier, et les services rendus, dont le carbone en est le pilier, c’est cette histoire que nous voulons porter auprès des acteurs économiques », conclut François Mandin.