Carbone, Soil Capital veut engager 1000 agriculteurs en 2022
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Lier la rémunération du carbone à la rentabilité des exploitations agricoles, c’est l’ambition de l’entreprise Soil Capital, qui a lancé il y a un an son programme dédié. Si 150 agriculteurs sont déjà engagés, l’ambition affichée par les dirigeants, lors d’un point organisé le 16 septembre, est de réunir 1000 exploitants pour la deuxième année du programme. Des travaux sont également en cours pour étendre la démarche à l’élevage.
Un après son lancement, le programme européen de rémunération du carbone, porté par l’entreprise de conseil agronomique Soil Capital, affiche une belle dynamique. Le cap des 150 agriculteurs à rejoindre la démarche est atteint, couvrant près de 35 000 hectares, principalement sur une grande moitié Nord de la France, en Belgique et, depuis deux mois, en Grande-Bretagne. Les 800 autres exploitants qui ont fait connaître leur intérêt ne perdent néanmoins rien pour attendre. « Notre objectif pour la deuxième saison est d’accueillir 1000 agriculteurs », affirme Chuck de Liedekerke, co-fondateur de Soil Capital, lors d’une visioconférence, organisée le 16 septembre. La première vague d’agriculteurs aurait stocké près de 15 000 tonnes de CO2, selon les diagnostics réalisés pour établir les références de l’année zéro, et le profil stockeur ou émetteur des agriculteurs.
Des certificats pour rémunérer le carbone à 27,50 €/t
Le programme proposé par Soil Capital se déroule sur une période de 15 ans. Après le diagnostic initial, l’agriculteur recevra des certificats ISO pour chaque tonne de carbone stockée ou évitée, en fonction de son profil. 80 % de ces certificats pourront être acquis par des entreprises au cours des cinq premières années. Les agriculteurs seront payés chaque année, au tarif minimum de 27,50 € la tonne de carbone. Les exploitants s’engageront ensuite à maintenir le carbone stocké pendant dix ans. A partir de l’année 11 par rapport à celle de lancement de la démarche, les 20 % de certificats restants, affectés à une réserve d’assurance destinée à compenser un « événement de perte » en cas de dégagement imprévu de carbone sur l’exploitation, seront payés à l’agriculteur.
Si le programme a d’abord été pensé pour les grandes cultures, Chuck de Liedekerke l’assure : « Il n’y a pas de recette unique ou d’usage prescriptif en matière de carbone, notre programme s’adresse à tout le monde. » Selon les premiers retours, un tiers des agriculteurs de la première saison sont des stockeurs nets de carbone dès leur bilan de référence, et toutes les cultures sont susceptibles de stocker au moins 2t/ha de carbone, y compris les cultures industrielles telles que la betterave et la pomme de terre. Des travaux sont par ailleurs en cours pour construire un module bétail, et étendre la démarche à l’élevage.
Lancement d’un simulateur au service des agriculteurs
À travers son programme, Soil Capital veut contribuer à l’atteinte de son objectif, pris en 2019 : atteindre un million d’hectares convertis à l’agriculture régénérative d’ici à 2025. Pour permettre aux agriculteurs d’y voir plus clair, avant de s’engager, les dirigeants de l’entreprise ont annoncé le lancement d’un simulateur, Simone, dont l’accès est gratuit depuis le site internet de l’entreprise. « Le but est de permettre aux exploitants de tester l’impact et le potentiel carbone de leurs pratiques en quelques minutes, explique le cofondateur de Soil Capital. Cet outil se base sur les résultats des 150 agriculteurs déjà engagés, afin de fournir des trajectoires types aux intéressés. »
Compenser les émissions incompressibles
La démarche bénéficie déjà du soutien de nombreux groupes, comme L’Oréal, Nestlé, Kellog’s, Cargill mais aussi de coopératives comme Axéréal ou Terres Atlantique. Invités à réagir sur le potentiel « droit à polluer » permis par ce type de démarche, les dirigeants de l’entreprise ont assuré que les acheteurs ne pourraient pas avoir recours aux certificats pour compenser leurs émissions. « Cela ne doit pas les dispenser de faire des efforts, indique Nicolas Verschuere, cofondateur de Soil Capital. Les acheteurs avec qui nous discutons sont déjà engagés dans une démarche de réduction de leurs émissions propres, nous intervenons pour les émissions incompressibles. Ainsi, par exemple, un pétrolier comme Total ne pourra pas acheter de certificat pour compenser ses émissions. » Enfin, bien que se félicitant de la validation de la méthode grandes cultures pour le label bas carbone, et notant des similarités, les dirigeants de l’entreprise ont affirmé qu’il était « trop tôt » pour envisager une jonction avec le label public. « L’échéance des paiements reste encore flou pour le label. Si celui-ci est plus pratique pour les agriculteurs, nous le rejoindrons, mais pour l’heure, nous continuons d’avancer de notre côté. »
Le prix du diagnostic est de 980 €/an, et déduits de tous les gains annoncés par Soil Capital. Les inscriptions pour la deuxième saison sont ouvertes jusqu’à février 2022.