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« Une année très compliquée pour la HVE », Cédric Caillau, Chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne

Le | Projets-territoriaux

Afin de répondre aux exigences de la nouvelle Politique agricole commune, le gouvernement français a décidé de réviser le référentiel de la Haute valeur environnementale, HVE. Le dossier est important : depuis le 1er janvier 2023, cette V4 de la HVE permet d’accéder à l’écorégime de la Pac. Dans le Tarn-et-Garonne, Cédric Caillau, référent Haute valeur environnementale de la Chambre d’agriculture, retrace un début chaotique, où le manque d’informations et de clarté a entravé le travail des conseillers HVE.

« Une année très compliquée pour la HVE », Cédric Caillau, Chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne
« Une année très compliquée pour la HVE », Cédric Caillau, Chambre d’agriculture du Tarn-et-Garonne

Référence agro : Comment s’est déroulée cette première année avec la V4 de la HVE ?

Cédric Caillau : Cela a été très compliqué. Au début 2023, nous avons eu du mal à avoir les informations. Or, nous sommes obligés de réaliser les audits entre janvier et mars. Nous avons donc dû aller vite, avec des informations pas claires et des nouvelles références que nous ne savions pas toujours interpréter. Nous avons deux conseillers dédiés à la HVE en arboriculture, deux en viticulture, un en élevage et deux en céréales. Le temps nécessaire à ces audits a été multipliés par deux, voire par trois pour certains cas. Nous avons dû passer entre trois et six heures par dossier avec la sensation d’avoir beaucoup trop de choses à indiquer. Or, nous ne sommes pas des auditeurs. Le temps passé à renseigner ces nouvelles informations, c’est du temps en moins pour le conseil en gestion des entreprises. Nous ne nous y sommes pas retrouvés.

R.A. : Est-ce que tous les exploitants concernés ont réussi à obtenir la V4 de la HVE ?

C.C. : Lorsque nous avons présenté les nouvelles règles aux agriculteurs, la sensation première a été qu’elles n’apportent pas de plus-value, avec encore beaucoup de flou. Sur les 171 exploitants de notre groupe HVE, seulement la moitié ont décidé de passer en V4, ceux qui se sentaient le plus proche des nouvelles conditions. Tous l’ont obtenue. Il y avait la possibilité de prolonger l’ancien référentiel jusqu’au 31 décembre 2024 pour les exploitations qui finissaient leur cycle entre le 1er janvier 2023 et 31 décembre 2024. Pour les exploitations certifiées en 2022, elles ont jusqu’en 2025 pour passer en V4.  Maintenant, ça va mieux car les règles de la nouvelle politique agricole sont sorties et nous voyons davantage comment elles s’articulent avec la V4 de la HVE.

R.A. : Quels sont les points les plus compliqués du nouveau référentiel ?

C.C. : Le module biodiversité est clairement plus exigeant. Il faut réaliser un inventaire exhaustif des infrastructures agroécologiques en différenciant les milieux (aquatiques, herbacés, ligneux) et la taille des parcelles de moins de six hectares. Les exploitations très spécialisées ont du mal à gagner des points sur ce module. Sur l’irrigation, tout est axé vers les nouvelles technologies et non sur la gestion des volumes d’eau. Ce qui pénalise nettement les exploitants qui n’ont pas la capacité à investir.

Par ailleurs, les calculs d’Indicateurs de fréquence de traitement, IFT, sont plus longs avec les nouvelles références du ministère de l’Agriculture. Parfois il faut tout refaire ! Sur les grandes cultures, nous avons toujours autant de mal à trouver des leviers pour réduire les solutions phytosanitaires. Sur les contrats de semences, c’est également compliqué car les cahiers des charges imposés réduisent les solutions possibles.

En fertilisation, qui était une des grandes craintes de la profession, les exploitants s’en sortent chez nous, même si la note est souvent moins bonne qu’avant. Mais, sur notre département, nous comptons beaucoup d’exploitations en polyculture élevage qui sont favorisés par les nouvelles règles. C’est peut-être plus difficile pour les exploitations spécialisées qui doivent réduire les nous craignons que cette V4 décourage les agriculteurs d’accéder à la HVE. Par ailleurs, cette année, nous avons fait deux groupes de 85 agriculteurs, ceux qui sont déjà en V4 et ceux qui sont encore en V3. Nous aurons donc deux fois plus de contrôle !  Or, nous n’avons pas répercuté le coût du temps supplémentaire passé. Mais nous ne pourrons pas tenir ainsi. Si nous augmentons le prix des audits, avec un référentiel plus contraignant, la dynamique de la HVE se poursuivra-t-elle ?

Beaucoup de structures collectives s’interrogent sur l’intérêt de poursuivre l’accompagnement collectif dû à la complexité et la lourdeur de l’application du plan de contrôle. Elles font appel à nous pour préparer les audits.