Affichage environnemental, le projet ambitieux de l’Itab
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L’Institut de l’agriculture et de l’alimentation biologique, Itab, a déposé un projet d’affichage environnemental auprès de l’Ademe et du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire, dans le cadre de l’expérimentation nationale lancée en 2020. Alors que les travaux de recherche continuent pour améliorer la prise en compte des impacts positifs dans l’évaluation environnementale, l’Itab n’a que quelques mois pour proposer un méthodologie robuste pour un affichage plus complet… et facile à comprendre par les consommateurs.
« Nous ne prendrons pas les résultats ACV d’Agribalyse tels qu’ils sont car ils sont incomplets, ce constat est consensuel aujourd’hui », annonce Sabine Bonnot, référente professionnelle du pôle Durabilité de l’Institut de l’agriculture et de l’alimentation biologique (Itab). Alors qu’une expérimentation nationale est en cours pour élaborer un affichage environnemental des produits alimentaires, l’Itab a annoncé le 7 avril, par la voix du Synabio et de onze structures qui se mobilisent pour la transition écologique, avoir déposé un projet auprès de l’Ademe et du Ministère de la Transition Ecologique et Solidaire, le 15 mars. Ce projet a pour objectif de refléter de manière plus complète les impacts environnementaux des produits alimentaires, et notamment de rendre compte des bénéfices pour l’environnement des systèmes extensifs dans l’analyse de cycle de vie (ACV). L’objectif annoncé est d’éviter que l’information du consommateur ne soit tronquée ou que l’affichage puisse donner lieu à du greenwashing.
Actualiser les GES et la toxicité, ajouter la biodiversité et le stockage de carbone
« Notre projet propose de travailler sur les paramètres de certains impacts qui ne sont pas à jour dans la base de données Agribalyse, comme les gaz à effet de serre, notamment le protoxyde d’azote lié aux engrais chimiques dont on entend beaucoup parler ces jours-ci, ou encore la toxicité des pesticides pour les milieux et pour les humains, explique Sabine Bonnot. Ce dernier enjeu est essentiel et ne représente pourtant rien aujourd’hui dans les scores ! En parallèle, nous travaillons à ajouter d’autres indicateurs, aujourd’hui très mal pris en compte dans l’évaluation, comme la biodiversité et le stockage de carbone. Nous souhaitons également vérifier la cohérence du dispositif avec les enjeux du bien-être animal, qui sont malmenés en ACV. » Dans la mesure du possible compte tenu du calendrier très contraint, l’institut compte aussi étudier les options pour « mieux rendre compte, plus complètement qu’ils ne le sont actuellement en ACV, les impacts liés à la déforestation via les importations ».
16 indicateurs et plusieurs méthodologies
Le projet de l’Itab considère les 16 indicateurs de la méthode ACV EF3.0 du Joint Research Center de l’Union européenne, incluant les catégories d’impact écotoxicité eau douce et toxicité humaine cancer et non-cancer, qui sont prévues dans la méthodologie validée par la Commission Européenne. En s’appuyant notamment sur les résultats du projet Olcapest, qui témoigne de difficultés liées à l’intégration des impacts des pesticides dans l’ACV, l’Itab mise sur une hybridation avec d’autres cadres méthodologiques.
Pour mener à bien ses travaux préliminaires, qui sont destinés à se prolonger au-delà de l’expérimentation, l’institut a mobilisé une large palette d’expertises : quatre personnes dédiées, deux partenaires externes et un collège d’experts scientifiques pour chaque thématique abordée.
De la France à l’Europe
Lancée en février 2020 pour une durée initiale de dix-huit mois, l’expérimentation de l’Etat a vu son calendrier chamboulé par la pandémie mais aussi par des aléas liés à la diffusion de la base de données Agribalyse : « Elle n’a finalement été publiée qu’en octobre 2020, et a encore subi des modifications début janvier 2021 », précise la référente professionnelle. Ces aléas poussent l’Itab et ses partenaires à demander une mise à jour du calendrier.
A l’échelle européenne, même combat. « La France a un rôle d’exemplarité dans la production d’une méthode d’évaluation environnementale des produits alimentaires qui prenne acte des faiblesses et lacunes de l’ACV, poursuit Sabine Bonnot. C’est le sens de l’action actuelle de l’Etat à travers l’expérimentation pour l’affichage environnemental. La France portera probablement ce sujet à l’agenda du Conseil Européen, dont elle prend la présidence au 1er semestre 2022. C’est un enjeu très important pour l’orientation des futures politiques publiques alimentaires et agricoles. »