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Grandes cultures, les rotations longues du projet Syppre s’adaptent à l’actualité

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En 2015, l’ITB, Arvalis-Institut du végétal et Terres Inovia lançaient Syppre, programme visant à tester des rotations déployées sur dix ans. Au fil du temps, le projet a dû être adapté à un contexte mouvant et à certains imprévus, imposant de l’agilité aux trois instituts, qui réussissent toutefois à garder le cap, comme l’explique Rémy Duval, de l’ITB, à Référence agro.

Le projet Syppre planifie des rotations sur dix ans en grandes cultures (crédit Syppre).  - © D.R.
Le projet Syppre planifie des rotations sur dix ans en grandes cultures (crédit Syppre). - © D.R.

C’est le jeu des programmes déployés sur un temps long. Le programme Syppre, imaginé en 2014 et lancé en 2015, rassemble l’Institut technique de la betterave (ITB), Arvalis-Institut du végétal et Terres Inovia autour de rotations déroulées sur dix ans. Cinq sites aux propriétés pédoclimatiques typiques sont suivis, de front, par les trois instituts. Syppre, acronyme de systèmes de production performants et respectueux de l’environnement, a atteint son rythme de croisière, avec quelques beaux succès. Sur le site de Champagne, par exemple, les conduites de culture en maximisant les interventions de désherbage mécanique, ou la diminution des apports d’engrais minéraux azotés, entrent dans cette catégorie, témoigne Rémy Duval, référent du projet à l’ITB. « Le cap fixé initialement est tenu, se réjouit-il. Pour autant, des adaptations ont été nécessaires, au fil de l’eau. »

Une gymnastique agronomique…

Dès le départ, cette marge de manœuvre était prévue. Les aléas climatiques, réglementaires ou tout simplement techniques ont incité les responsables des cinq sites à modifier, à la marge, certaines rotations. « En Champagne, nous projetions de tester des couverts de légumineuses pluriannuelles, maintenus sur trois ans, illustre Rémy Duval. Les conditions ont rendu cette option difficile. Nous relancerons peut-être l’idée plus tard, mais en attendant, nous avons opté pour un relais de plusieurs couverts successifs. » Toute la difficulté est de déterminer à quel moment une suite de cultures imaginée il y a sept ou huit ans n’est plus adaptée. « Nous essayons de ne par sur-réagir, à la fois pour donner sa chance au dispositif, et pour prendre le temps de déterminer, le cas échéant, une alternative convaincante », affirme Rémy Duval.

…et réglementaire !

Lors du lancement de Syppre, les trois instituts ont tenté d'anticiper les évolutions réglementaires à venir, notamment les possibles fins d’homologation pour des produits phytosanitaires en sursis, afin d’imaginer des systèmes de culture compatibles avec leur probable interdiction. Un produit, et non des moindres, a rejoint cette catégorie en cours de route. « Nous avons tablé sur une utilisation du possible glyphosate dans les situations où nous visons le non-labour par exemple, explique Rémy Duval. Dès 2017, nous nous sommes rendu compte que l’avenir de la molécule était plus incertain que prévu ! Même si rien n’est encore sûr pour le glyphosate, les responsables de sites le considère désormais comme un dernier recours uniquement, ce qui est à la fois intéressant sur le fond, et un peu inconfortable ! »

Des avancées propres à chaque plateforme Syppre

À côté de ces expérimentations au long court, Syppre poursuit d’autres objectifs. La construction de réseaux locaux, afin de diffuser les informations issues du programme, avance à différentes vitesses selon les sites. « Nous constatons que peu de groupes d’agriculteurs déjà existants abordent frontalement un ensemble de problématiques comme nous le faisons, détaille Rémy Duval. Leur intérêt pour nos travaux est donc un peu variable, selon leurs centres d’intérêts. » L’ambition de créer des « observatoires » de fermes situées dans le même contexte que chaque site, pour en faire des références comparatives, est également plus avancée dans certaines régions.

Pas de nouveau site pour le moment

Quid de la possibilité d’intégrer de nouveaux sites, et d’autres partenaires, en cours de programme ? « Nous avons lancé un appel à projets, et reçu des candidatures intéressantes, précise Rémy Duval. Malheureusement, les contraintes très pointues de Syppre se sont avérées difficiles à reproduire ou à harmoniser dans des projets déjà existants. Pour le moment, nous sommes en stand-by sur ce point. » Dans ses déclinaisons régionales actuelles, Syppre ne couvre pas les modes de production bio ou polyculture élevage. « Nous avons eu des contacts, dans ces deux registres, glisse Rémy Duval. Mais à ce stade, nos attentes mutuelles n’étaient pas compatibles. » Les trois instituts techniques réfléchissent à la manière dont ce cadre pourrait être rendu plus accessible.

En attendant, et après sept années d’expérimentations, Syppre commence déjà à livrer des enseignements précieux. Des analyses les synthétisant sont déjà en préparation. « Nous aurons bientôt de la matière à partager », promet Rémy Duval.