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« IPM Works déploie 22 groupes d’agriculteurs type Dephy à travers l’Europe », Nicolas Munier-Jolain, Inrae

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Le 1er octobre 2020, l’initiative européenne IPM Works voyait le jour. L’ambition ? Créer des groupes de fermes favorisant les échanges sur le sujet des réductions d’usage des pesticides. Pour Référence agro, le coordinateur du projet Nicolas Munier-Jolain, chercheur à l’Inrae, évoque la filiation entre IPM Works et Dephy, et dresse un premier bilan, un an après le lancement de l’initiative.

Le coordinateur du projet IPM Works, Nicolas Munier-Jolain, (Inare). - © D.R.
Le coordinateur du projet IPM Works, Nicolas Munier-Jolain, (Inare). - © D.R.

Référence agro : Dans quelle mesure IPM Works s’est-il inspiré de Dephy ?

Nicolas Munier-Jolain : Le projet a démarré en octobre 2020, mais les échanges initiaux datent de 2019. Dès la première réunion téléphonique, l’ensemble des mots-clés et des codes de Dephy ont été évoqués. Par exemple, l’importance de former des réseaux de vraies fermes, la vision systémique de l’exploitation, ou évidemment le souhait de réduire les usages de produits phytopharmaceutiques. Par ailleurs, la coordination a été confiée à une structure française, l’Inrae. C’est à partir d’un consortium français comprenant également l’APCA et l’Acta que nous avons contactés les 31 partenaires d’IPM Works, à partir de nos réseaux respectifs. Pour nous, Français, le lien avec Dephy est évident. Nous avons proposé un dispositif similaire. Je trouve remarquable la manière dont nos partenaires se sont appropriés ce modèle. Mais nous sommes restés attentifs à ne pas imposer « notre » système, et sommes restés ouverts. Les Anglais, par exemple, ont suggéré des comparaisons intra-parcellaires, qui ne correspondent pas à l’approche plus appliquée de Dephy. Mais cette pratique a ses atouts, elle est très visuelle. Dans la lettre d’information du réseau de septembre, nous avons proposés à l’ensemble des animateurs de s’approprier ce dispositif.

R.A. : Un an après son lancement, où en est le projet ?

N. M.-J. : Notre objectif était de créer 22 groupes de 10 à 15 agriculteurs. Cette première étape est finalisée. Les animateurs, ou hub coachs, sont identifiés et ont déjà commencé à réaliser une enquête initiale sur les exploitations. L’idée est de caractériser les utilisations de produits phytosanitaires, la prise de l’agriculture intégrée. Ce travail sera achevé d’ici à la fin d’année. Il permettront une comparaison avec une enquête similaire dans deux ans. Déjà, des évènements de démonstration ont pu avoir lieu dans certains pays. Pour cinq des seize pays impliqués, il n’a pas été nécessaire de construire des groupes, car des réseaux étaient déjà constitués. C’est le cas de la France avec les 3000 fermes Dephy, mais aussi de l’Angleterre, les Pays-Bas, l’Allemagne et la Suisse. Dans ces pays, nous organisons un inventaire des rencontres organisées.

R.A. : Quelles sont les échéances et objectifs d’IPM Works ?

N. M.-J.  : Le projet, financé à hauteur de 6 M€ dans le cadre de H2020, se déroule sur quatre ans. Après une phase de structuration et de fonctionnement aux niveaux nationaux, nous organiserons de « cross visits », des visites croisées, d’un pays à l’autre. La démonstration et l’échange d’informations sont au cœur du dispositif, davantage que la recherche pure et dure. La communication entre pairs est le maître-mot, d’agriculteur à agriculteur, mais aussi de conseiller à conseiller. Nous avons quatre ans pour fluidifier et harmoniser cette logique. Un équivalent à Ecophytopic va voir le jour, IPM Tool box, en lien avec un autre projet européen, IPM Decision, qui vise à lister les OAD phytosanitaires existant au niveau européen.

Le but est surtout d’être prêt à proposer un changement d’échelle en 2024, autrement dit démultiplier le nombre de groupes suivis, mais aussi toucher d’autres pays, idéalement l’ensemble des États membres. C’est en tout cas le souhait de Bruxelles. Nous devrons être prêts à proposer des formations aux conseillers agricoles de toute l’Europe.