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Projet Capriv, des enseignements précieux pour limiter la dérive des pesticides

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Le projet Capriv, conclu en décembre 2022, étudiait le potentiel des haies et des différentes buses de pulvérisation des pesticides vis-à-vis de la limitation des dérives. Et les résultats intéressent : l’Efsa étudie actuellement les données du projet liées aux buses. Le chapitre des haies pourrait quant à lui alimenter des discussions et politiques territoriales.

Des capteurs ont été fixés sur des mannequins pour simuler l’exposition de riverains. - © D.R.
Des capteurs ont été fixés sur des mannequins pour simuler l’exposition de riverains. - © D.R.

Maîtriser la pulvérisation des pesticides et limiter l’exposition des organismes non-cibles : cet enjeu dépasse aujourd’hui le secteur agricole. Il agite les ONG environnementales, mobilise les élus ruraux et inquiète les riverains. La science, aussi, s’empare du sujet. Le projet Capriv, lancé en 2020 et conclu en décembre 2022, impliquait l’Anses, Inrae, mais aussi les instituts techniques des grandes cultures (Arvalis), des fruits et légumes (CTIFL) et de la viticulture (IFV).

Les buses tiennent leurs promesses

Deux grands sujets ont été abordés : l’efficacité des buses anti-dérive et la présence de haies autour des parcelles. Prises seules, les buses s’avèrent déjà tenir leurs promesses. Quatre types de buses ont été testés : à fente classique, ou à injection d’air homologuées à 66 %, 75 % et 90 % de réduction de dérive. « Les pourcentages de limitation annoncés se retrouvent bien dans nos résultats, note Benjamin Perriot, qui a suivi le projet pour Arvalis-Institut du végétal. Avec une buse à 90 %, la dérive sédimentaire, c’est-à-dire les gouttelettes que l’on retrouve au sol, est infime à partir de 2 mètres de la zone protégée. »

Les haies présentent de leur côté un potentiel de barrage non-négligeable, quelle que soit la buse utilisée. « Une haie permet de réduire la dérive de plus de 70 % à elle seule », rapporte Benjamin Perriot. Partant de ces constats, une conclusion plus globale s’impose : « C’est la combinaison des moyens qui permet de limiter au mieux les dérives des produits, synthétise Benjamin Perriot. Associer la haie avec une buse à injection d’air réduit la dérive de plus de 90 % par rapport à la buse de référence utilisée sans haie. »

Approfondir le sujet des haies

Quelles peuvent être les retombées de ce type de travail ? Benjamin Perriot est conscient de l’enjeu sociétal, mais reste prudent. « Les haies sont un moyen de limiter les dérives, mais les questions qui s’ensuivent dépassent nos protocoles techniques, pose-t-il. Faut-il imposer aux résidents, aux agriculteurs ou aux collectivités d’en planter ? L’aménagement du territoire dépasse notre rôle d’institut technique. » De plus, des études complémentaires restent à mener. Pour le volet grandes cultures de Capriv, seules les haies « basses taillées au carré de type buissonnantes » ont été analysées. « Une suite possible, pour ce projet, serait de tester d’autres haies et barrières physiques », suggère Benjamin Perriot.

L’Efsa se penche sur les données de Capriv

De manière plus concrète, les données générées par les protocoles de Capriv ont été transmises à l’agence européenne de sécurité sanitaire, l’EFSA, à la demande de cette dernière et de l’Anses. « Les modèles d’homologation des produits phytosanitaires actuels se basent sur un seul type de buse à injection d’air homologuées à 50 % de réduction de dérive, un chiffre bien inférieur au matériel disponible aujourd’hui », explique Benjamin Perriot. Les données de Capriv pourraient permettre d’ajuster les distances de sécurité au mieux à condition qu’elles s’avèrent performantes aussi d’un point de vue agronomique. « Sur le terrain, il y a des a priori sur ces buses, et leur qualité de pulvérisation pour protéger les plantes, glisse Benjamin Perriot. C’est une piste de travail que nous explorons chez Arvalis pour accompagner les producteurs. »