Résidus de pesticides dans les sols, une persistance à surveiller selon Inrae
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La contamination de l’environnement par les résidus de pesticides fait de nouveau parler d’elle. Les milieux aquatiques et l’atmosphère sont déjà contrôlés. Inrae recommande désormais de surveiller les sols. Ses derniers travaux y révèlent une persistance inattendue des pesticides, qui présente des risques pour la biodiversité.
Dans un communiqué publié le 24 mai 2023, Inrae alerte sur la contamination des sols par les résidus de pesticides. « La contamination de l’environnement par les résidus de pesticides fait depuis de nombreuses années l’objet d’une surveillance pour les milieux aquatiques et l’atmosphère, rappelle l’institut. Ce n’est pas encore le cas pour les sols. » Or, des travaux menés par des chercheurs d’Inrae, en collaboration avec des scientifiques de l’Université de Bordeaux, ont révélé une persistance inattendue des molécules de pesticides, « bien au-delà de leur temps de dégradation théorique et à des concentrations supérieures à celles escomptées », signale l’institut. Inrae plaide dès lors pour une surveillance des sols, qui pourrait s’appuyer sur le réseau national RMQS (Réseau de mesure de la qualité des sols), en place depuis plus de 20 ans.
67 molécules différentes retrouvées dans les sols
Suite aux résultats de 2020, jugés alarmants, de l’expertise scientifique collective Inrae-Ifremer concernant l’impact des pesticides sur la biodiversité et les services écosystémiques, Inrae a souhaité poursuivre ses investigations. L’institut a fait échantillonner 47 sites du RMQS, dans toute la France, entre 2019 et 2021, afin de faire rechercher 111 substances par le laboratoire LPTC de l’Université de Bordeaux et le Laboratoire d’analyse des sols d’Arras du centre Hauts-de-France d’Inrae.
Résultat : 98 % des sites étudiés présentent au moins une substance. Au total, 67 molécules différentes ont été retrouvées, majoritairement des fongicides et des herbicides.
Les parcelles de grandes cultures fortement contaminées
« Les parcelles de grandes cultures sont les plus contaminées, avec jusqu’à 33 substances différentes retrouvées dans un seul site, et une moyenne de 15 molécules dans les sols, précise Inrae. Plus inattendu, dans les sols sous forêts, prairies permanentes, en friche ou en agriculture biologique depuis plusieurs années, plus de 32 pesticides différents ont été détectés, à des concentrations majoritairement plus faibles que pour les sites en grandes cultures. »
Le glyphosate et l’AMPA, son métabolite principal, sont les molécules les plus fréquemment détectées : ils sont présents dans 70 % et 83 % des sols. « Des fongicides de la famille des triazoles (époxiconazole) ou des fongicides inhibiteurs de succinate de la déshydrogénase (SDHI) sont également retrouvés dans plus de 40 % des sites, tout comme des insecticides de la famille des pyréthrinoïdes comme la téfluthrine », poursuit l’institut. Et de préciser que le risque majeur estimé pour les vers de terre est dû aux insecticides et aux fongicides. « Les risques de toxicité chronique pour ces vers de terre sont modérés à forts pour toutes les parcelles cultivées », conclut Inrae.