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Le changement climatique pousse les appellations d’origine à évoluer

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Les producteurs en AOP ont eu, cette année, du mal à respecter les cahiers des charges, pourtant obligatoires, du fait de la sécheresse. L’INAO a dû intervenir pour accorder des dérogations. L’institut réfléchit à des adaptations plus pérennes. Explications avec Carole Ly, directrice par intérim de l’INAO.

Le changement climatique pousse les appellations d’origine à évoluer
Le changement climatique pousse les appellations d’origine à évoluer

L’Institut national de l’origine et de la qualité, INAO, a reçu 19 demandes de modification de cahiers des charges des appellations d’origine protégées (AOP), suite à la sécheresse estivale, dont 15 sont des appellations laitières (12 AOP et 3 IGP au moment où nous écrivons ces lignes). C’est 30 % de plus que l’année sèche de 2019. Et ce n’est pas fini.  « Environ la moitié des 51 appellations laitières sont touchées, explique Carole Ly, directrice par interim de l’INAO. Nous devrions recevoir d’autres demandes du Massif central, des Alpes, du Pays Basque ou encore du Jura. » Les producteurs en AOP doivent respecter un cahier des charges strict. Or, cette année, certains points n’ont pas pu être cochés, comme le nombre de jours minimal de mise à l’herbe des animaux du fait de l’absence de végétation dans les prairies.

Modifier en garantissant la qualité et la typicité

« Les modifications temporaires des cahiers des charges sont permises par le règlement européen, clarifie Carole Ly. Nous essayons de traiter les demandes le plus vite possible en Comité. Nous regardons les justificatifs fournis, les modifications demandées et leurs impacts sur la qualité et la typicité des produits. Les modifications temporaires sont données dans le respect de la qualité des produits. » Outre les AOP laitières, l’INAO a reçu d’autres demandes de modifications des référentiels comme celle des producteurs de piment d’Espelette. « Ils ont dû irriguer, et les piments n’avaient pas tous la bonne taille », explique Carole Ly.

Bouger de manière pérenne les lignes

Si cette année a été exceptionnelle, les agriculteurs sont de plus en plus confrontés au changement climatique. La filière vigne travaille depuis 2016 sur des pistes d’adaptation qui ont déjà abouties à des modifications de cahiers des charges. Un consortium a par ailleurs été lancé entre l’INAO, FranceAgriMer, l’Institut français de la vigne et du vin (IFV), Inrae et la filière viticole regroupée au sein du Comité national des interprofessions des vins à appellation d’origine et à indication géographique (CNIV), pour mettre en place un plan d’action commun sur ces questions, notamment en termes d’innovation. « À l’INAO, ce qui nous importe est de voir ce qui a ou aura un impact à terme sur les cahiers des charges, ajoute la directrice par intérim de l’institut. Par exemple, nous autorisons que 5 % de la surface du vignoble soit plantée avec des nouveaux cépages plus à même de résister à la sécheresse et de diminuer les traitements phytosanitaires. » Les filières animales travaillent également à adapter les pratiques. Ce qui pourrait, là aussi, faire évoluer les cahiers des charges des appellations. « En élevage, les professionnels réfléchissent par exemple à l’introduction d’arbres ou de haies qui font de l’ombre, ou encore à l’utilisation de certaines variétés dans les prairies semées », livre Carole Ly.