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Plan national énergie climat : -9 % d’émissions de GES en 2030, la feuille de route de l’agriculture

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Une baisse de 50 % des émissions brutes de GES en 2030, avec une baisse de 9 % des émissions du secteur agricole, tels sont les objectifs fixés par la France dans son PNEC révisé, remis à la Commission européenne le 10 juillet 2024.

Plan national énergie climat : -9 % d’émissions de GES en 2030, la feuille de route de l’agriculture
Plan national énergie climat : -9 % d’émissions de GES en 2030, la feuille de route de l’agriculture

Une baisse de 50 % des émissions brutes de GES en 2030, avec une baisse de 9 % des émissions du secteur agricole, tels sont les objectifs fixés par la France dans son PNEC révisé, remis à la Commission européenne le 10 juillet 2024.

Le PNEC traduit les objectifs de baisse des émissions de GES que la France se fixe jusqu’en 2030 pour chaque secteur. Il s’appuie sur trois documents nationaux de programmation et de gouvernance en cours de révision et soumis à consultation publique dans les prochains mois : la PPE, la SNBC et le PNACC.

Le scénario de référence de la future SNBC prévoit une baisse des émissions brutes de GES de 50 % en 2030 (et non 55 % comme le prévoit l’UE) par rapport à 1990, ce qui implique de réduire les émissions de 124 millions de tonnes équivalent carbone (MtCO2éq) entre 2022 et 2030. Entre 1990 et 2022, les émissions de GES ont été réduites de 144 Mt : les auteurs du PNIEC indiquent que les efforts à fournir seront conséquents pour tous les secteurs.

Le secteur agricole (hors agroforesterie et UTCATF), deuxième émetteur de GES (19 % du total français), avec une baisse de 9 % demandée, est le moins sollicité des sept secteurs soumis par le PNEC.

Les scénarios établis par les rédacteurs du Plan intègrent des orientations stratégiques pour l’agriculture : objectifs de production de biomasse, de biométhane et de biogaz, réduction des émissions de méthane et de protoxyde d’azote, développement de l’agriculture biologique et des protéines végétales, pratiques d’agroécologie.

Pour l’agriculture, les besoins de financement de ces transitions sont de l’ordre de 1 Md€ /an. Le rapport pointe également le problème du renouvellement des générations. D’ici à 2030, le manque de main d’œuvre atteindra 75 000 emplois (ETP) dans l’agriculture, la sylviculture et le bûcheronnage.

Six plans et stratégies nationaux en cours, dédiés à la transition du secteur agricole

Dans le secteur de l’agriculture, plusieurs stratégies et plans participent déjà à la transition climatique et agro-écologique :

  • Le Plan Stratégique National 2023-2027.
  • La stratégie nationale sur les protéines végétales.
  • Le programme ambition Bio.
  • Le plan Enseigner à produire autrement.
  • Le plan d’investissement du Gouvernement France 2030, doté de 54 milliards d’euros, initié en 2021, comprend un volet agricole.
  • Les travaux en cours autour du troisième PNACC (plan national d’adaptation au changement climatique) prévoient un volet ciblant les secteurs identifiés comme particulièrement vulnérables au changement climatique, dont le secteur agricole.

La France défend par ailleurs le renforcement de l’ambition environnementale de la PAC. Des mesures résultant des États généraux de l’alimentation, organisés par le Gouvernement en 2017, ont également une incidence sur le secteur agro-alimentaire : réglementation sur les produits locaux dans la restauration collective, et lutte anti-gaspillage, notamment.

Les scénarios d’évolution et les leviers de décarbonation du secteur agricole

  • La biomasse est appelée à devenir un vecteur essentiel de décarbonation, ce qui implique de développer considérablement cette production dans le secteur agricole, dans le respect des règles environnementales de la PAC et de la directive RED : elle ne doit pas mettre en péril la production alimentaire, ni les puits de carbone naturels.
  • Dans le scénario tendanciel (la projection des évolutions actuelles) établi par le PNEC, la production globale (agricole et issue du bois) s’établira à 209 TWh en 2030, et le scénario de référence (la feuille de route à mettre en place) demande une production de 230 TWh.
  • Cette hausse implique « un effort conséquent dans le secteur agricole sur les cultures intermédiaires (+14TWh entre 2019 et 2030), les cultures lignocellulosiques (+7 TWh entre 2019 et 2030), les résidus de culture (+11 TWh entre 2019 et 2030), les effluents d’élevage (+5 TWh entre 2019 et 2030) ».
  • Une telle évolution reposera à la fois sur des dispositifs de collecte améliorés, ainsi que sur des modifications importantes des pratiques culturales et des surfaces concernées.
  • La réduction des émissions de méthane, premier poste des émissions de GES de l’agriculture (45 % du total) concourra à atteindre les objectifs. Le développement de la filière de production de biogaz par méthanisation permet de réduire ces émissions, et de nombreux dispositifs dynamisent cet essor :enveloppe d’engagement rehaussée à 9,7 Md€ dans le cadre de la PPE, certificats de production, revalorisation du tarif d’achat de l’électricité et du biométhane.
  • Par ailleurs, le PCAE met à disposition des aides pour moderniser les installations d’élevage, et le PNDAR (Programme national de développement agricole et rural) priorise depuis 2015 la réduction des GES.
  • La production de légumineuses, à l’apport protéique élevé et permettant des pratiques de culture moins émettrices de GES, est également favorisée.
  • La réduction des émissions de protoxyde d’azote (issues à 90 % de l’agriculture dans le total français) doit également contribuer à atteindre l’objectif. Elle est encadrée et conduite dans le cadre de la directive Nitrates, avec le 6e programme d’action Nitrates, de la loi “climat et résilience”, et de la Stratégie nationale sur les protéines végétales. Celle-ci, dotée de 150 M€ dans le cadre du plan France Relance, doit permettre d’ici à 2030 de doubler les surfaces dédiées à ces productions, portées à 2 millions d’hectares (8 % de la SAU).
  • Par ailleurs, le PSN vise un doublement des surfaces en agriculture biologique, portées à 18 % de la SAU en 2027, comme annoncé dans le cadre du programme « Ambition Bio 2027 », présenté en avril 2024.
  • Le Label bas-carbone, lancé en 2019 par le ministère de la Transition écologique, permet de repérer, de financer et d’essaimer des programmes vertueux. ll a connu un fort essor en 2023, avec plusieurs centaines de projets totalisant 2 MtCO2 évités, notamment par deux méthodes : « Carbon Agri » et « Grandes cultures ».
  • Les obligations de compensation pour les vols intérieurs et les centrales à charbon susciteront une forte demande pour les projets labellisés Bas carbone, et les agriculteurs sont invités à se lancer plus avant dans la démarche.

    Une large palette de dispositifs vise à influencer la demande et les modes de consommation alimentaire : l’alimentation représente 21 % des émissions de GES des ménages français. Parmi celles-ci : obligation d’approvisionnement durable et de qualité dans la restauration collective, menus végétariens dans les cantines, déploiement des projets alimentaires territoriaux (PAT), diminution de moitié du gaspillage alimentaire, étiquetage environnemental, introduction d’une nouvelle Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), en cours d’élaboration.

  • Ces mesures font l’objet d’un accompagnement financier par France Relance, à hauteur de 816 M€.

Les politiques et mesures planifiées pour l’agriculture : premières orientations de la Stratégie nationale Bas carbone à horizon 2030

Dans les cultures :

  • Déploiement des leviers bas carbone dans les exploitations, via les mesures inscrites dans le PSN 2023-2027, qui sera expertisé et éventuellement révisé via des diagnostics sur la résilience climatique des exploitations, prévus dans le cadre du Plosarga (Projet de loi d’orientation et de souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture).
  • Baisse de l’utilisation des engrais minéraux azotés (-26 % en 2030) via des pratiques d’optimisation, de diversification des sources d’azote, et via l’allongement des rotations. Le plan France Relance dédie 2,3 Md€ à l’innovation dans l’agriculture.
  • Développement de l’agriculture biologique,

    Soutien aux protéines végétales, avec 2 Mha de légumineuses en 2030,

  • Développement de surfaces de vergers,
  • Développement des cultures intermédiaires, avec 4,8 Mha en 2030,
  • Développement des Projets alimentaires territoriaux et création d’un fonds de souveraineté alimentaire.

Dans l’élevage :

  • Évolution des cheptels (-12 % en 2030 pour les bovins par rapport à 2020 ; -10 % pour les porcins ; stable pour les volailles), et priorité donnée à la consommation de viande locale et durable.
  • Développement des pratiques agroécologiques dans la conduite des troupeaux : part de système de pâturage dominant pour les bovins lait passe de 28 % en 2020 à 45 % en 2030.
  • Gestion des effluents animaux, avec la couverture généralisée à long terme des fosses à lisiers, et l’amélioration des pratiques d’épandage.
  • Dans les consommations d’énergie des exploitations :

    Sortie progressive des énergies fossiles pour les engins agricoles, et itinéraires culturaux de travail du sol moins énergivores : la part d’engins agricoles fonctionnant avec des énergies non-fossiles (biocarburants, HVO100, électricité, H2, BioGNV) passe de 0 % à 7 % en 2030.

  • Dispositifs financiers pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments.

Dans la production de bioénergies et le stockage de carbone dans les exploitations agricoles :

  • Développement de la méthanisation, avec la continuation des politiques existantes,
  • Gestion durable et valorisation des haies, avec + 50 000 km de haies plantées en 2030, et développement de l’agroforesterie (100000 ha en 2030 sur prairies et terres arables),
  • Développement des potentiels de stockage des haies, de l’agroforesterie intraparcellaire et des sols, avec le triplement, à terme, des couverts de culture intermédiaires. Dans la continuité du Projet « 4 pour 1000 », lancé en 2015, le plan France Relance favorise l’augmentation du stockage de carbone dans les sols agricoles, via les actions « Bon Diagnostic Carbone » et « Plantons des Haies ». Le PSN 2023-2027 encourage également la démarche, par exemple avec le bonus « haies gérées durablement », qui rémunère les exploitations ayant au minimum 6 % de haies sur leur surface.