Une charte pour un approvisionnement durable des méthaniseurs
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Le 31 mars, sept structures spécialisées dans le négoce de biomasse et l’approvisionnement de méthaniseurs ont signé une charte « de bonnes pratiques pour un développement vertueux et raisonné de l’approvisionnement des méthaniseurs de France ». Face au besoin croissant de biomasse pour créer du biogaz, l’enjeu est de mieux cadrer l’offre et la demande.
Les objectifs de la Programmation pluriannuelle de l’énergie vont entraîner une hausse des unités de méthanisation, qui connaît déjà depuis dix ans une forte dynamique. Elle fixe une production entre 14 et 22 TWh à horizon 2028 pour le biométhane injecté, contre 4,3 TWh en 2021. Cela nécessitera une mobilisation croissante de biomasse de diverses origines, avec des risques de tensions sur les territoires. Afin de permettre un développement durable des unités de méthanisation, sept entreprises ont signé la charte « de bonnes pratiques pour un développement vertueux et raisonné de l’approvisionnement des méthaniseurs de France », le 31 mars au salon Bio360 Expo à Nantes.
70 Mt de biomasse en plus
« Avec les objectifs de la PPE, il faudra 70 millions de tonnes de biomasse en plus », indique Cyril Flamin, expert biogaz, intrants, agronomie et digestat chez Engie. Si la quantité de la ressource disponible n’est pas source d’inquiétude - elle a été estimée par l’Ademe à 130 Mt - l’identification et la mobilisation durable des ressources organiques pour alimenter les méthaniseurs constituent des sujets stratégiques. « Un responsable de méthaniseur a besoin d’identifier les ressources sur son territoire dont il n’a pas toujours connaissances, poursuit-il. La filière est en croissance, il faut la professionnaliser. »
Les sept structures signataires sont spécialisées dans le négoce de biomasse et l’approvisionnement de méthaniseurs : AgriCarbone, D-Carbone, Enia, iNex, Margaron, Organix (Suez) et Valbenne (TotalEnergies). Elles se connaissent bien puisqu’elles travaillent ensemble au sein du groupe biogaz du Comité stratégique de filière nouveaux systèmes énergétiques. Leur savoir-faire et les services qu’elles proposent convergent vers une meilleure rencontre de l’offre et de la demande.
Donner de la valeur à des coproduits
« La coopérative Natup nous a contacté en novembre car elle ne savait pas quoi faire de sorgho grain utilisé dans des essais qui n’avaient pas fonctionné, étaye Amaury de Souancé, co-fondateur d’AgriCarbone. Nous avons chiffré la valeur de la matière, nous l’avons collectée, transportée, stockée, puis livrée à un méthaniseur. Cela a permis de donner de la valeur à un coproduit. »
La mise en place de solutions digitales, au travers notamment de market places pour mettre en lien l’offre et la demande, fait partie des solutions pour mieux encadrer l’approvisionnement des méthaniseurs, valoriser des ressources mal exploitées ou déclassées, et les tracer.
Le juste prix
L’objectif de la charte, qui se décline en quatre axes (voir ci-après), est aussi de donner un juste prix à cette matière, dans un contexte de hausse des cours des matières premières agricoles, et de mieux cadrer les prix par une politique de contractualisation. « Une matière première peut s’acheter le triple selon le territoire et la saison », explique Louis Baillet, directeur stratégie et développement gestion de flux chez Suez Organique et chef de projet chez Organix.
Plus de 1300 méthaniseurs sont en service en mars 2022, dont 80 % d’origine agricole.
Les quatre grands principes de la charte
1. Fournir une expertise au service des producteurs de matières organiques et des opérateurs d’unités de méthanisation en recherche d’intrants, pour optimiser la valorisation durable de ressources méthanisables et structurer des données (traçabilité, qualité, quantité, production, valorisation) ;
2. Assurer à l’acheteur une transparence sur les ressources vendues, leurs origines et leurs caractéristiques ;
3. Inciter à la durabilité des systèmes, en favorisant les circuits courts et les logiques d’économie circulaire dans la rencontre de l’offre et de la demande, et en sensibilisant les acteurs aux problématiques agronomiques et environnementales liées à la mobilisation des biomasses, notamment d’origine agricole (fertilité organique des sols, stockage de carbone) ;
4. Promouvoir un partage de valeur équitable entre apporteurs de matières et méthaniseurs, en proposant des coûts d’intermédiation raisonnables et en accompagnant les producteurs et les bénéficiaires des ressources dans la construction de tarifs raisonnables pour le producteur et le consommateur.