Vivescia lance Transitions pour financer, avec l’aval, l’agriculture régénérative
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Dégager jusqu’à 150 € de plus par hectare de céréales pour financer une agriculture régénérative : telle est l’ambition du programme Transitions, présenté le 8 septembre 2023 par Vivescia, à la foire de Châlons. L’objectif affiché est d’accompagner 1000 exploitants en 2026 et de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030.
« Je dois vous faire une confidence : dans la vie d’un président de coopérative, il y a des journées plus compliquées qu’aujourd’hui ! ». Christoph Büren était tout sourire, le 8 septembre, à la foire de Châlons, pour donner le coup d’envoi du programme Transitions, porté par sa coopérative Vivescia. En gestation depuis deux ans, l’initiative a pour objectif de « dérisquer » l’évolution des pratiques vers une agriculture bas carbone, régénérative et favorable à la biodiversité, en levant les freins techniques et économiques. La coopérative ambitionne d’accompagner mille de ses adhérents d’ici à 2026. 200 agriculteurs se sont déjà engagés dans cette voie pour la campagne 2024, pour une durée de trois ans.
Des objectifs de résultats à atteindre
Les exploitants engagés dans le programme seront rémunérés entre 100 et 150 € par hectare et par an. « Cela va au-delà de la compensation des coûts agronomiques, précise Valérie Frapier, directrice de la RSE chez Vivescia. Cette prime découle de notre modèle économique de mutualisation des coûts, avec nos partenaires de l’aval ». (voir encadré)
Pour accéder à cette rémunération supplémentaire, les agriculteurs doivent respecter des obligations de résultats, en matière de couverture des sols, de carbone restitué au sol, d’émissions de gaz à effet de serre et de maintien de la biodiversité. « Nous avons construit un socle agronomique innovant, qui prône une approche système, en incluant les cultures n’étant pas collectées par Vivescia, explique Savine Oustrain, directrice recherche et innovation de la coopérative. Nous ne voulions pas d’un énième cahier des charges imposé aux agriculteurs. » Chacun des indicateurs se base sur un référentiel reconnu comme la méthodologie grandes cultures du label bas carbone ou la certification environnementale. Le caractère non figé du socle agronomique est par ailleurs souligné. Des travaux de quantification de la biodiversité sur les exploitations, prévus pour la fin de l’année, devraient ainsi venir nourrir le cadre existant.
Un vaste plan de formation des agriculteurs et des TC
« La philosophie du programme est de récompenser les agriculteurs pionniers engagés de longue date, mais aussi ceux amorçant leur transition, précise Armand Gandon, chef de projets bas carbone chez Vivescia et coordonnateur de Transitions pour l’amont agricole. Les agriculteurs bénéficient d’un appui financier et technique, contractualisé sur trois ans. » Un diagnostic de l’exploitation, réalisé en amont, permet de vérifier l’éligibilité de l’exploitation au programme. Une plateforme concentrant l’ensemble des données a spécialement été conçue. Un outil d’imagerie satellitaire permettra de vérifier l’atteinte des objectifs.
La coopérative prévoit d’accompagner cet effort d’un vaste plan de formation, à destination des agriculteurs et des techniciens. Pour les premiers, les formations commenceront dans les prochaines semaines et représenteront huit demi-journées par an. Entre 30 et 80 TC devraient pour leur part être formés.
Servir d’exemple
Avec le programme Transitions, Vivescia souhaite réduire de 20 % ses émissions de gaz à effet de serre, entre 2023 et 2030. « C’est ambitieux, mais nous pourrons nous appuyer sur de nombreux leviers déjà à disposition des agriculteurs, comme la fertilisation, qui a un poids majeur dans l’émissions de GES », souligne Armand Gandon, qui mentionne également la piste des engrais décarbonés. Une ambition que la coopérative souhaite mettre au service d’autres structures. « Nous lançons le mouvement qui ne demande qu’à grandir, assure Christophe Büren. Nous voulons être un laboratoire de transition. La vocation naturelle de ce programme est d’être dupliquée dans d’autres territoires : nous le serons et je m’en réjouis ! »
Un partage des coûts entre l’amont et l’aval
En parlant de « coalition autour du bas carbone » lors de son intervention, en mai dernier, au Congrès des céréaliers, Christophe Büren, président de Vivescia, avait esquissé un des piliers du programme Transitions : la mutualisation de la prise en charge du risque pris par les agriculteurs, en adaptant leurs pratiques. Les entreprises partenaires de Vivescia (Grands Moulins de Paris, Malteurop, Delifrance) sont ainsi associées à la démarche. Tereos, Saipol, Avril et Roquette ont également officiellement rejoint le navire. Les représentants de la coopérative ont profité de s’exprimer devant un très large auditoire pour appeler d’autres acteurs de l’aval à sauter le pas. « Les clients vont payer pour la décarbonation de l’agriculture, résume Christophe Büren. L’État et les Régions devraient nous aider pour la partie formation. » Sur ce dernier point, la coopérative est en cours de réponse à différents appels à projets ouverts dans le cadre de France 2030.