L’AGPB vent debout contre le plan Ecophyto 2030
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A l’occasion de la présentation de ses voeux à la presse, le 17 janvier 2024, le président de l’AGPB, Eric Thirouin, a fait la démonstration de sa ferme opposition au plan Ecophyto 2030. Le recours au Nodu et la mise en oeuvre de plusieurs dispositifs de suivi et de signalement des épandages suscite l’inquiétude et la colère des représentants des producteurs de blé. Un appel à manifester pourrait prochainement être lancé.
« On va dans le mur ! » Lors de la présentation de ses voeux à la presse, le 17 janvier 2024, Eric Thirouin, le président de l’Association générale des producteurs de blé, AGPB, n’a pas mâché ses mots pour marquer son opposition totale au plan Ecophyto 2030. Celui-ci devrait prochainement être publié, suite à la remise du rapport Potier en fin d’année dernière, et l’organisation d’une phase de consultation. « L’avis du Conseil supérieur d’orientation, CSO ne reflète que le compte-rendu des débats où tout le monde a tout critiqué, confie-t-il. Les agriculteurs n’ont par ailleurs pas été invité à intervenir : je me suis exprimé en tant que représentant de la FNSEA mais je n’étais pas convié en tant que président de l’AGPB », poursuit Eric Thirouin.
Le Nodu, une « machine à baffes »
Premier point de désaccord pour le représentant des producteurs de blé : le recours à l’indicateur du Nodu, relatif au nombre de doses utilisées. « C’est une machine à baffes qui nous emmènera dans l’impasse, peste Eric Thirouin. Si les solutions à disposition sont moins efficaces, nous sommes obligés de passer plus souvent ; avoir recours au Nodu consiste à condamner le meilleur d’entre nous. » Pour le président de l’AGPB, chercher à atteindre une réduction de 50 % des produits phytosanitaires au cours des sept prochaines années, reviendrait à condamner 50 % de l’agriculture française. « On ne peut pas être en faveur de la souveraineté alimentaire et d’un niveau de vie décent pour les agriculteurs, et porter une telle politique, déplore Eric Thirouin, qui rappelle qu’au niveau européen, le Parlement européen a mis un coup d’arrêt au règlement SUR et l’objectif similaire qu’il portait, en novembre dernier. « Nous sommes dans la surtransposition totale », poursuit-il.
L’AGPB se montre plus favorable au recours à l’indicateur HRI (indicateurs de risque harmonisé), utilisé au niveau européen, plutôt qu’un dispositif « franco-français ». « La politique du « en même-temps, c’est terminé !, requiert Eric Thirouin. On nous dit d’un côté que d’autres indicateurs vont être choisis, mais tout en gardant le Nodu : vouloir faire plaisir à tout le monde, ce n’est plus possible. »
Inquiétude sur des dispositifs de suivi et de signalement
Le Nodu n’est cependant pas le seul point de crispation dans les rangs de l’AGPB. Le plan Ecophyto prévoit en effet la création d’un site internet, nommé « Phyto Signal », dont l’ambition serait de permettre des signalements de riverains lors de l’application de produits phytosanitaires. « Nous rentrons dans une logique de suspicion, de dénonciation », déplore Eric Thirouin. Selon lui, un autre dispositif serait dans les tuyaux : la mise au point d’un outil numérique, prévu pour 2026, sur lequel les agriculteurs devraient renseigner chaque épandage. « On nous dit que l’anonymat sera garanti, mais nous devrons dire dans quel champ le traitement a été réalisé, regrette le président de l’AGPB. Depuis le Grenelle de l’environnement, toutes les données environnementales sont diffusables. Nous allons jeter en pâture les agriculteurs, nous refusons de prêter le flanc à ces pratiques. »
Appel à manifester
Enfin, ultime sujet de tension : la création dans le plan Ecophyto de zones sensibles liées au taux de nitrates sur les aires d’alimentation de captage. Actuellement, le seuil de potabilité de l’eau est fixé, au niveau européen, à 50 mg/litre d’eau. Ce nouveau zonage abaisserait ce seuil à 40 mg. « Des contraintes seraient donc mises en place pour de l’eau qualifiée partout ailleurs de potable, s’insurge Eric Thirouin. Si nous voulons vraiment faire disparaître l’agriculture française, continuons comme cela », lance le président de l’AGPB. Ce dernier indique prévoir d’appeler les céréaliers à descendre dans la rue pour manifester, afin de demander davantage de cohérence entre les discours officiels et le terrain. Lors de sa conférence de presse du 16 janvier 2024, Emmanuel Macron a en effet rappelé son souhait de ne laisser aucun agriculteur dans l’impasse.