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L’autorité environnementale renouvelle ses doutes quant à l’efficacité des programmes d’actions nitrates

Le | Politique

Plus de trente ans après l’adoption de la directive européenne sur les nitrates, les programmes d’actions français ne sont pas à la hauteur de l’enjeu de la réduction de la pollution des eaux. C’est le constat formulé, une nouvelle fois, par l’autorité environnementale, dans une note publiée le 23 novembre. Selon les auteurs du document, les programmes en vigueur auraient très peu de chance d’améliorer la qualité de la ressource.

L’autorité environnementale renouvelle ses doutes quant à l’efficacité des programmes d’actions nitrates
L’autorité environnementale renouvelle ses doutes quant à l’efficacité des programmes d’actions nitrates

Faisant état du « faible écho » donné à ses précédents avis, plutôt critiques, sur les programmes d’actions nitrates, l’Autorité environnementale a publié, le 23 novembre, une note pour « rappeler les enjeux majeurs relatifs à la maîtrise de cette pollution et mettre en évidence l’impasse dans laquelle se trouve cette politique publique ». Comme elle l’avait déjà fortement souligné dans son avis diffusé en novembre 2021, l’entité explique considérer comme « peu probable que cette septième génération de programmes, sans rupture avec la génération précédente, permette à la France d’améliorer la qualité des eaux et de réduire les émissions atmosphériques ».  Pour rappel, l’arrêté définissant les modalités du septième programme d’actions national nitrates a été publié au Journal officiel le 9 février 2023, avec près d’un an et demi de retard.

Des évaluations environnementales insuffisantes

Pour expliquer la faiblesse, selon elle, des programmes mis en œuvre, l’autorité environnementale pointe du doigt des évaluations environnementales « rarement satisfaisantes ». Les auteurs de la note regrettent ainsi que ces évaluations « ne comportent pas de modélisation des incidences des activités agricoles sur l’environnement qui permettrait de faire le choix de dispositions en fonction de leur capacité à réduire l’impact de la fertilisation ».

« Entre 2000 et 2020, tandis que les ventes d’engrais ramenées à l’hectare cultivé se sont stabilisées, la teneur en nitrates dans les eaux a augmenté de 8 % à l’échelle nationale, ce qui traduit la faiblesse de l’ensemble des mesures prises dans les programmes d’actions nitrates », estime l’autorité environnementale. 

Des politiques publiques pas assez coordonnées

À cela s’ajouterait un manque de cohérence entre le PAN et les autres politiques publiques cherchant à réduire l’empreinte carbone du secteur agricole, comme la stratégie nationale bas carbone, en cours de révision, le plan protéines ou le plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques, Prepa. « Les synergies possibles des programmes d’actions nitrates avec [ces stratégies] ne sont pas recherchées », déplore l’autorité environnementale. Un constat similaire est tiré en ce qui concerne le plan stratégique national, PSN, déclinaison française de la Pac post 2023, celui-ci n’intégrant pas de mesures spécifiques sur les flux de nitrates dans les masses d’eau, au sein des Maec, par exemple. 

« Les liens de cette septième génération de programmes avec les programmes en faveur de la transition agroécologique ne sont pas présentés, ce qui ne permet pas de démontrer leur inscription dans une stratégie d’ensemble d’amélioration des performances environnementales de l’agriculture », résume le document. Ce dernier souligne par ailleurs une certaine défaillance du suivi de ces programmes, les achats de fertilisants ne faisant pas l’objet de déclaration annuelle au code postal acheteur, comme c’est le cas pour les produits phytosanitaires.

Appel à une révision totale du processus

Appelant de ses vœux « un programme d’actions sur les nitrates vraiment ambitieux et appliqué, et pleinement intégré dans une véritable stratégie d’ensemble d’amélioration effective des performances environnementales de l’agriculture », l’autorité environnementale plaide en faveur d’une révision de « l’ensemble du processus » de lutte contre les pollutions par les nitrates. Elle liste comme piste d’action : l’élargissement des désignations des zones vulnérables, une révision du PSN « sans laquelle l’ensemble des programmes visant à réduire l’empreinte environnementale de l’agriculture sont voués à l’échec », ou encore l’allongement de la durée des programmes d’action pour permettre aux agriculteurs d’adapter leurs pratiques.